Azylis (Chapitre 56)

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Je me laisse tomber sur une caisse de bois poussiéreuse et pousse un long soupir. Mon dos me fait souffrir et tous mes muscles semblent absolument vouloir aujourd'hui me rappeler leur existence.

Nous nous sommes réfugiés dans la salle souterraine d'une tour à moitié effondrée, Christian, Sarah, Maly et moi.

Certains de nos soldats viennent régulièrement nous apporter des nouvelles et je ne peux m'empêcher de me détendre légèrement en voyant le jeune homme qui vient de nous parler quitter la pièce. Je prends la parole lorsque la porte claque derrière lui :

-On dirait bien qu'Edilyn respecte la trêve... Et aucun de nos dragons n'a été poursuivie par la brigade.

Mais Christian, au lieu de sourire, esquisse une grimace de fatigue. La seule lampe qui éclaire la pièce clignote une fois sur deux et je dois froncer les sourcils pour l'apercevoir. Il répond :

-Ça m'inquiète tout ça Azylis...

Sarah acquiesce avant de se tourner vers moi et de poursuivre :

-Edilyn n'aurait jamais accepté la trêve si elle n'était pas certaine d'y trouver son bénéfice...

Je me lève de mon siège improvisé et passe une main dans mes cheveux collés par la sueur à mon front.

-Mais que peut elle encore espérer ? Si elle se bat jusqu'au bout, ce qui est probable, nous avons calculé que de toute façon avec tous nos hommes nous gagnerons... Qu'est-ce qu'elle espère ?

Ma voix est exaspérée mais Maly se lève doucement à son tour et vient se planter devant moi.

-Justement Azylis, c'est ce qu'il faut qu'on découvre. Tes deux généraux, je suis d'accord avec eux pour une fois. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond...

Je pousse un énième soupir avant d'esquisser un petit sourire à l'intention de mon robot.

-Ok. Alors qu'est-ce que tu proposes ?

-M'infiltrer dans le palais. Ils utilisent toujours des robots dans mon genre et je ne suis pas un modèle unique...

Le cri jaillit de ma bouche avant même que j'ai réfléchi :

-Non ! Edilyn te connaît !

Maly me tire la langue avec son habituelle impolitesse et ses manière d'enfant :

-Sûrement, mais elle a autre chose à faire que penser que je vais venir l'espionner non ? On peut tenter de toute façon... Et c'est notre seule solution !

Je grimace puis rétorque avec un sourire à la fois inquiet et amusé :

-Je déteste quand tu as raison.

Elle remarque d'un ton docte :

-Alors tu dois me détester souvent. J'ai toujours raison.

Et elle tourne les talons en éclatant de rire avant de lancer aux deux autres :

-Alors, on prépare un plan ? Que je ne reste pas trop dans ce fichu palais sans savoir quoi faire...

***

-Maly, on avait pas parlé de discrétion ?

Mon robot, assis à califourchon sur le dos de Rebelle, m'adresse une épouvantable grimace.

-Ne t'inquiète pas Azylis, Rebelle ne me déposera quand même pas juste devant le palais...

Je lève les yeux au ciel, essayant de calmer mon appréhension et me contente de répondre :

-Non, tu es juste censée sauter en parachute sur l'une des terrasses... Je ne vois pas en quoi c'est discret...

Elle me regarde quelques secondes puis fronce le nez avant de lâcher :

-Désolé de te le dire mais franchement je te préfères quand tu évites d'être trop raisonnable...

Je ne réponds rien mais m'approche brusquement du dragon. Je grimpe sur son dos, juste derrière Maly, et rétorque en m'accrochant aux écailles :

-Parfait, j'attendais un commentaire de ce genre... On y va ?

-Eh ! Je n'ai pas dit suicidaire non plus...

Je me contente de dire à mon dragon sans répondre à Maly :

-Décolle !

-Pas de problème petite humaine !

Et nous quittons la terrasse de verre sous les yeux ahuris de Christian qui vient d'arriver. Maly observe tandis que le vent vient soulever nos cheveux :

-Je parie ce que tu veux qu'il est en train de se maudire d'avoir pu te laisser deux minutes toute seule...

Je corrige avec un sourire :

-Non, il se maudit de nous avoir laissées seules toutes les deux !

Maly acquiesce :

-Là je crois que tu as raison. Même si je ne comprendrai jamais pourquoi il persiste à penser que j'ai une mauvaise influence !

Je ne réponds rien tandis que Rebelle vire brusquement et que la mer apparaît devant nous. Et le palais...

Malgré moi, je sens toujours une émotion me saisir brusquement lorsque je le vois apparaître. Il est magnifique...

Mais je réussis aujourd'hui à surmonter mes sentiments et me penche vers Maly :

-J'ai ta parole ? Si ça tourne mal, même si tu n'as pas toutes les informations voulues, tu reviens immédiatement d'accord ?

Elle acquiesce avant de rétorquer :

-Crois-moi si tu veux mais Lydie comme moi, on tient beaucoup à notre double vie...

La gorge nouée par l'émotion, je n'ai pas le temps de répondre car nous survolons tout à coup le palais. Quelqu'un nous verra forcément... Mais il existe une toute petite part de chance pour que le parachute et sa passagère passent inaperçue. Ou que l'on ne sache pas qui s'est introduit de cette façon dans le palais et que l'on ne soupçonne pas les robots...

Maly s'écarte légèrement de moi tandis que Rebelle effectue un demi-tour. Quelques secondes plus tard, nous survolons l'une des terrasse et Maly se jette dans le vide en serrant les sangles de son petit parachute argenté. Il s'ouvre sous mes yeux et elle atterris en douceur sur la plateforme. Elle se redresse immédiatement et je la vois m'adresser un sourire tandis que nous reprenons de la hauteur.

Alors que les tours du château disparaissent derrière moi et que je lutte contre une anxiété grandissante, Rebelle murmure dans mon esprit :

-Ça va Azylis ?

-Oui.

Je note avec un petit sourire qu'elle m'a appelée par mon prénom. Alors que nous tournons derrière une grande tour fortement abîmée par les récents combats, et que je pose d'un geste instinctif ma main sur mes nombreuses cicatrices qui me couvrent le corps, je reprends doucement la parole :

-Rebelle, tu te souviens de ton rêve ?

-Le canyon de verdure avec le nid, les dragons sauvages ?

-Je suis certaine qu'on y arrivera. Vraiment.

Il me semble sentir le sourire de la dragonne lorsqu'elle répond de sa voix grave :

-Moi aussi. C'est bien pour ça que je combats à tes côtés.

Intemporel T5 & 6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant