LES ENFANTS DE LA PESTE(juillet 833)Bastian Corbinian, homme de main de Rovoff

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Tout est presque revenu à la normale

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Tout est presque revenu à la normale. Sauf que maintenant c'est nous qui faisons la loi.

Le gouvernement a eu besoin de rappeler toute l'armée dans les trois Murs afin d'aider à la récupération de tous les cadavres des victimes de la peste. Maintenant que c'est fait, il n'a pas jugé utile de reformer une garnison souterraine, déléguant ce boulot au patron. En gros, c'est nous la garnison souterraine maintenant ! Et comme il est en bons termes avec le major des brigades spéciales, obtenir cette responsabilité sur le long terme a pas été difficile. Mais comme ils ont encore leur mot à dire, ils ont réussi à négocier quelques descentes par mois, histoire de vérifier que tout se passe bien.

Le plan avance comme prévu.

La prochaine étape sera de faire en sorte que la petite criminalité se réinstalle doucement, de façon à détourner l'attention des autorités des trafics du patron. Ce sera à nous de maintenir ce subtil jeu d'équilibres : laisser les petits truands agir comme ils veulent sans leur laisser trop de mou afin que le coin redevienne pas le coupe-gorge qu'il était avant. Le patron tient à ce que les bas-fonds atteignent un certain niveau économique, afin d'attirer des clients du dessus qui auraient soif d'aventure. Reconstruire des troquets, des bordels et des boutiques prendra du temps mais le processus a déjà commencé, sans même qu'on s'y attende.

L'illustre philanthrope anonyme - décidément, il est partout celui-là - a décidé de lancer un vaste chantier de reconstruction des bas-fonds en vue d'en faire un endroit plus vivable. Si le gouvernement a accepté de participer, c'est pas lui qui finance le plus, alors il a pas craché dessus.

Plus de maisons en bois, pour éviter les incendies, de la pierre, bien résistante et les rues seront repavées. C'est bien beau tout ça, mais l'essentiel c'est la population, qui a pas changé. Les habitants des bas-fonds sont peut-être moins nombreux, mais ils sont pas plus riches. Le gouvernement acceptera pas que des personnes qualifiées, comme les professeurs ou les médecins, aillent vivre en bas, quand bien même ils en trouveraient. Le décor sera plus charmant mais la faune locale toujours aussi glauque. Le patron compte un peu là-dessus. Des gens honnêtes avec quelques sous en poche, des richards qui se feront détrousser de temps en temps - eh, après tout, ils avaient qu'à pas descendre, ces cons-là - et des petits truands pour camoufler les grands, et qu'on pourra embaucher de temps en temps pour nous arranger des coups.

Pourvu que tout se passe comme ça, mais rien n'est joué.

Notre principale utilité durant la durée des travaux, c'est de gérer l'accès à l'escalier, et autant dire qu'on s'en met plein les poches. On a monté un nouveau système pour appâter les miséreux qui ont plus d'espoir, ou qui en ont encore trop pour vouloir rester dans le noir. On fait payer le droit de passage de l'escalier le même prix qu'avant ; mais on délivre plus automatiquement les papiers de citoyens. Si ces gueux veulent pouvoir vivre là-haut en toute sécurité, ils doivent payer un énorme supplément pour les obtenir. Hé, c'est malin ! Ceux qui ont pas les moyens tentent leur chance là-haut tout de même, sans les papiers. S'ils se font choper, c'est soit retour à la case départ, soit la taule, donc parfait pour nous.

Y en a beaucoup qui essaient. Du coup, même si les documents de citoyenneté partent pas très vite, le nombre de clients compense. Y en a bien qui ont râlé en criant à l'escroquerie, mais, eh, ma bonne dame, c'est comme ça maintenant, si t'es pas contente, retourne t'enterrer dans ton tas d'ordures !

Ah oui, y a aussi la gestion des jeunes. Ceux-là ont réchappé en masse de la peste, et depuis, ils sont intenables. Le patron veut qu'on les soigne parce qu'ils constituent notre futur vivier de délinquants. Mais la plupart mériteraient juste des claques dans la gueule. Quand ils sont pas au boulot sur les chantiers de constructions, on les retrouve ivres morts ou en train d'agresser des braves gens qui ont rien demandé. Tout doux, mes agneaux ! On peut s'amuser mais en restant polis ! Molestez pas les clients de notre cher patron ! Il en a besoin ! Et la réputation des bas-fonds, vous y pensez ?

Quelle réputation ? Bah. Quand tous les quartiers auront été rénovés, tous ces jeunes euphoriques d'être en vie devront se trouver de nouvelles sources de revenus. La cambriole, la prostitution, la contrebande, ou n'importe quel autre boulot honnête, c'est pas ce qui manque comme débouchés. Le tout sera de rendre tout ça suffisamment discret pour que les commerçant de la surface et les touristes continuent de commercer et de déambuler sans trop de crainte. Ce sera de notre ressort de maintenir cette harmonie. Leur serrer la vis,à ces ingrats, mais pas trop. Sinon, les brigades spéciale auront envie de fourrer leur gros nez dans les affaires des bas-fonds. On les laissera procéder à quelques petites arrestations de temps en temps pour leur montrer notre bonne volonté.

Si la patron est confiant, je le suis aussi. Mais faudra qu'il fasse gaffe à pas se reposer sur des ratés dans le genre de ceux auxquels il a refilé la dope. Les truands incapables, c'est mauvais pour le business.

Les Chroniques de Livaï ~ Tome 1 [+13]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant