Les Chroniques de Livaï ~ Tome 1 [+13]

COMMENT DEVENIR UN EXPLORATEUR ?(mai 844)Isabel Magnolia

On va faire une petite promenade sur le Mur Maria aujourd'hui. Enfin, c'est pas vraiment une promenade, on sera de corvée de nettoyage, mais ça fait tellement longtemps qu'on me parle du Mur Maria que je suis impatiente de le voir ! Il paraît qu'on peut apercevoir des titans quand on est tout en haut.

On est bons pour partir en expédition à ce que j'ai compris. Je suis restée couchée dans mon lit toute la nuit les yeux ouverts en arrêtant pas de me le répéter à voix basse ; comme si j'y croyais pas trop... Je finis par penser que ces titans sont bien réels ; autrement, pourquoi tout cet entraînement ? Ils ont l'air de vraiment croire en ce qu'ils font, tous ces gens. Furlan et Livaï commencent aussi à se dire que tout ça, c'est pas des conneries, et qu'on va vraiment affronter des géants bouffeurs d'hommes dehors. Je suppose que j'aurais plus de doute quand je les verrais.

Je me sens pas si effrayée. On a beau dire qu'ils sont redoutables, certains sont revenus, pas vrai ? Pourquoi pas moi ? Si j'en crois mes résultats, je suis pas mauvaise. En tout cas assez bonne pour faire crever Sairam de jalousie. Il arrête pas de me chercher des poux, il m'énerve... Tanja m'a félicitée du bout des lèvres, en souhaitant que je revienne. Elle peut toujours pas se battre à cause de sa blessure, alors elle pourra pas venir. Dommage, ça aurait été chouette ! Elle a l'air vraiment inquiète pour moi... C'est agréable, comme ça, quand je suis obligée de quitter Livaï et Furlan pour l'heure du coucher, j'ai au moins quelqu'un à qui parler. A part elle, je n'ai aucune amie...

On a eu des super notes tous les trois. Livaï a fait des trucs absolument déments si j'en crois les ragots. Ca m'étonne pas de frérot ! C'était sûr qu'il leur en mettrait plein la vue ! Furlan est pas très content de nous - il a fait en sorte de pas avoir des notes trop hautes, mais elles sont quand même suffisantes pour les chefs d'escouade -, il aurait préféré qu'on foire tout, histoire qu'on reste ici. Mais Livaï lui a fait une réflexion intelligente : Smith sera de la partie. Et s'il porte les documents sur lui, et qu'il meurt quelque part en terre inconnue, on est marron. C'est très juste.

Furlan a réfléchi et conclu que lors de l'expédition, il y aura moins de monde pour les surveiller, et récupérer ces papiers devrait être plus facile. Aucun de nous ne sait exactement comment ça va se dérouler car pas mal de trucs lors des expéditions sont le fruit du hasard ; on peut tomber sur d'anciennes ruines inconnues, ou suivre un chemin déjà emprunté pour rallier un avant-poste sûr. On peut galoper pendant des heures ou bien faire des haltes souvent, ça dépend de ce qui se présente. Tout ça en évitant les titans qui voudraient nous gober.

J'enfile mes bottes, puis ma veste. J'ai remarqué depuis peu que les marques du harnais s'était profondément imprimée sur mon corps, c'est pas très joli. Mais Tanja m'a dit que ça voulait dire que j'étais un vrai soldat maintenant, et que je devais en être fier. Même la douleur musculaire doit être assumée avec courage. Des masseurs pro viennent de temps en temps visiter les régiments, surtout le bataillon, car les explorateurs utilisent leur harnais tous les jours, contrairement aux autres soldats qui restent bien cachés dans les Murs.

Je salue Tanja et je cours aux écuries seller Liesa. C'est ma pote maintenant ! On dirait qu'elle me reconnaît chaque fois que j'arrive. J'ai toujours un bout de pain d'hier soir pour elle. On va cavaler, ma grande ! Et demain, c'est le grand jour ! Je me demande si tu es déjà allée à l'extérieur... Moi non, alors tu m'aideras un peu, ok ?

Je rejoins Livaï et Furlan dans les prairies qui entourent la forteresse du bataillon. Frérot utilise sa technique magique pour monter - vu qu'il est pas très grand, il a eu du mal au début, les chevaux du bataillon sont mastocs ! Il prend son élan, vise l'étrier avec son pied et se hisse. C'est assez classe, je dois dire. Mais de toute façon, personne oserait se foutre de lui, ah ah !

Notre petite équipe fait route vers le sud. Sairam peut pas s'empêcher de faire des commentaires navrants sur notre ignorance à propos du Mur Maria. J'ai remarqué qu'il avait pas trop peur de frérot, mais il se calme quand il est dans les parages. Furlan a l'air tendu ; on dirait qu'il a la frousse... Frérot, lui, reste silencieux, mais tout son corps semble tendu en avant, vers notre destination.

On dirait qu'il hume l'air... C'est vrai que plus on avance, et plus ça sent bon autour de nous... Un parfum indéfinissable... qui me rappelle pourtant quelque chose... quelque chose que j'ai jamais vu mais dont j'ai sans doute rêvé...