Ca me plaît pas trop, cette ambiance... J'ai l'impression que quelque chose se trame pas loin de nous... Les gars de Rovoff ont toujours l'air confiants et suffisants en temps normal, mais là, ils ont l'air d'avoir de la merde au fond du falzar. Le genre de merde qui part pas au lavage...
Devoir me restreindre sur l'utilisation du harnais, ça me fait chier, ouais, je le dis. Isabel est pas très contente non plus. Mais Furlan est catégorique, si on dépasse les douze bonbonnes par mois, on risque d'être dans le rouge. Je m'en remets à son jugement, mais j'espère que ça durera pas.
Les affaires marchent toujours plutôt bien, mais le montant de notre loyer a aussi augmenté, alors on doit boucler plus tôt le soir. Furlan se tâte pour monter aussi nos prix, mais ça serait pas raisonnable, on perdrait beaucoup de clients. On en est pas à se serrer la ceinture - même si le harnais d'Isabel nous a pas mal coûté, et qu'on en sent encore les effets aujourd'hui -, mais tout le monde doit faire gaffe tant que cette crise est pas passée. Les potes vont moins souvent au bar ou au bordel. Je crains qu'ils ne se trouvent d'autres distractions moins discrètes...
Isabel, Furlan et moi, on s'est trouvé de nouvelles sources de revenus depuis peu ; des clients qui proposent des missions particulières. De l'escorte, de l'espionnage, ce genre de truc. Pas d'assassinat, j'ai été bien clair là-dessus, et Furlan est d'accord. Mais on utilise le harnais qu'en cas de vraie nécessité. Ca peut être pratique pour certaines choses, comme monter la garde sur le chargement d'un marchand du quartier est - seulement si c'est plus rentable de le protéger que de le voler -, mais pour espionner, c'est pas idéal, à cause du bruit. Dans ces cas-là, on va à pattes.
Isabel est surtout là pour surveiller nos arrières, Furlan et moi on se garde le gros du travail ; s'il faut cogner, c'est moi qui m'y colle. Ca marche très bien comme ça entre nous ; on connaît nos forces, nos faiblesses et comment les utiliser. On se soutient et on se protège les uns les autres.
Je crois n'avoir jamais eu d'amis comme eux. Non, je viens d'y réfléchir de nouveau, et je confirme : ce sont mes meilleurs amis. Je tuerais quiconque s'en prendrai à eux. Je leur dirai sans doute jamais, mais je le sais ; je les aime...
J'aime quand Furlan me tend mon foulard propre avant de sortir, pour pas que j'attrape froid ; quand il vient prendre le bouquin sur lequel je me suis endormi pour le ranger à sa place... Et Isabel, qui pense toujours à me demander si j'ai encore faim, ou si je veux pas qu'elle vienne dormir avec moi parce qu'elle déteste m'entendre crier dans mon sommeil...
Je sais pas comment leur rendre ça... J'ai jamais su... C'est pas dans mes habitudes de montrer mes sentiments ; surtout ceux-là... Ils doivent se rendre compte que je leur suis reconnaissant de leur prévenance envers moi, à quel point je suis heureux qu'ils me considèrent comme un simple être humain qui a parfois besoin de se reposer sur quelqu'un... Je sais que ma force leur fait peur parfois, qu'ils en comprennent pas l'origine, tout comme moi, et qu'en toute logique ils devraient s'éloigner de moi le plus possible.
Mais ils le feront jamais. Ils m'acceptent comme je suis, avec mon sale caractère et mes manières froides. Quand ils me jugent, c'est toujours pour que je sois meilleur. Je me déteste de pas pouvoir exprimer tout ça de vive voix... Je voudrais les prendre dans mes bras et les serrer... leur dire merci d'être là... Mais j'ai pas les mots...
Enfin, je peux au moins leur payer un gueuleton pour la peine. Sur mes deniers personnels. On ira au troquet du vieux Rodolf et sa bonne femme, leur ragoût est excellent et tient bien au corps. Où ils sont ?
Les voilà. En train d'astiquer leurs harnais. Assise par terre, Isabel raconte à Furlan qu'elle a plumé Fester aux cartes hier soir - ce qui m'étonne guère, Fester sait pas y faire, même en trichant - et que les gars lui ont payé un coup. Furlan lui répond qu'il se demande comment une fille qui sait pas combien font deux plus deux peut gagner aux cartes, et Isabel lui envoie son torchon dans la tronche en râlant.
Je les regarde un moment, sans les déranger. Puis je toussote un peu pour signaler ma présence et Isabel se lève d'un bond, le sourire aux lèvres, en me demandant si on a une mission spéciale aujourd'hui. Non, je lui réponds, je voulais juste vous inviter à manger. Vous voulez ? Isabel explose de joie - elle a toujours faim - et Furlan pousse tout le matériel dans un coin en s'essuyant les mains.
On sort tous les trois de la planque et Furlan informe Hagen qu'on va en ville quelques heures. Il nous répond d'un signe et on se dirige vers le centre-ville et sa foule habituelle.
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Les Chroniques de Livaï ~ Tome 1 [+13]
FanficL'histoire de Livaï comme vous ne l'avez jamais lue. Le personnage le plus populaire de L'Attaque des Titans, le soldat le plus fort de l'humanité... Qui est-il vraiment ? Qu'a-t-il dans le coeur ? Qu'est-ce qui a fait de lui ce qu'il est ? Je me su...