UN GARCON MANQUE(avril 830)Bettina Jördis

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On a plus de petit bois pour le feu, alors je suis allée en chercher

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On a plus de petit bois pour le feu, alors je suis allée en chercher. On a presque plus d'allumettes aussi, il va falloir penser à en chiper de nouveau.

Maintenant, Livaï se lève tôt - quand il a dormi - pour raviver le feu le matin. Il place les seaux d'eau tout à côté et quand je me lève, ils sont encore tièdes. C'est tellement agréable de se laver à l'eau tiède ! Le froid ne semble pas vouloir se tirer des bas-fonds, alors la moindre source de chaleur est la bienvenue.

On a nos propres coins pour la toilette, mais une fois je l'ai vu tout nu. J'ai vraiment pas fait exprès ! Finalement, il est pas si maigre qu'il le paraît, c'est sa petite taille qui donne cette impression. Il a pas des muscles aussi développés que Parsifal, évidemment, mais il l'est presque autant que Jochem en fait. Cette découverte me fait oublier son âge, pendant un moment... Bah, je sais pas quel âge il a, peut-être qu'il le sait pas lui aussi ; je connais pas mon âge non plus... Le passage du temps est pas le même sous terre, on pense pas aux années, mais aux jours.

J'ai déjà vu des tas de garçons à poils, ça m'effraie pas du tout, mais je sais pas, avec Livaï c'est pas pareil. Peut-être que ça me gêne parce que je le sais plus jeune que moi et je suis sûre qu'il a jamais vu une fille nue, lui.

Livaï s'est déjà enroulé dans le tricot de son côté, et moi, couchée, je me tâte la poitrine en me disant qu'il y a pas grand chose de féminin chez moi. Plus j'y pense et plus ça m'embête. Je me dis chaque matin en me levant que mes seins ont peut-être un peu grossi, mais non. Ca me désespère un peu. Ressembler à un garçon est pratique au quotidien, mais... je m'aime pas moi-même. Pourquoi j'aurais pas le droit de ressembler à une "vraie" fille ? Parce que je vis dans ces taudis ?

Ma vie a aucun sens, aucun but... Ca sert à quoi de se lever de son lit, si c'est pour aller se chauffer toute la journée près d'un brasero pour pas crever de froid et tenir jusqu'au lendemain et recommencer ? A quoi ça mène !? Je suis pas jolie, je sais rien faire à part voler... Même Livaï doit me voir comme un simple copain de mouise, il est avec moi parce que c'est plus facile de s'en sortir à deux ! Il s'en fiche de moi, oui, sans aucun doute. J'en ai assez d'avoir froid et d'être seule, je voudrais que quelqu'un me serre dans ses bras... Je voudrais disparaître, ou mourir...

Une main se pose sur moi dans l'obscurité. Je sursaute malgré moi, je me sens rarement tranquille, surtout quand j'ai des idées noires. Mais c'est une main très douce, qui ne me fait pas du tout mal, qui se pose sur ma joue et touche mes larmes. Je sanglotais sans m'en rendre compte. Je reconnais cette main, celle de Livaï ; je la prends souvent dans la mienne pour souffler dessus après que Livaï ait amené les seaux jusqu'à la planque ; elles sont toujours toutes rouges après. C'est une main qui est capable de tuer mais aussi de caresser ; une main avec un ongle rongé ; une main qui en cherche une autre... Livaï, est-ce que tu es triste et seul, toi aussi ? Est-ce que ça a toujours été comme ça pour toi ? Tu veux... un câlin ?

Je tire sur sa main et il tombe sur mon lit, presque à plat ventre. Je le serre très fort, ses bras m'entourent et ses mains fourragent dans mes cheveux. Tu aimes les cheveux courts, Livaï ? Ca fait pas trop garçon ? Je les laisserai pousser si tu préfères. Je voudrais tellement que tu me vois vraiment comme une fille... J'ai honte de penser ça, mais je sens ses lèvres sur mon front, et tous mes remords s'effacent.

Livaï est plus un enfant ; c'est un homme, un vrai. Un enfant aurait pas fait la peau à Parsifal et Yvo ; il aurait pas tué ce gros porc pour me sauver ; il porterait pas des seaux remplis d'eau à lui tout seul tous les jours ; et il me tiendrait pas comme ça dans ses bras. En fait, il lui manque plus qu'une chose pour se sentir vraiment un homme... Pas vrai, Livaï ?

Je crois que je pourrais tout te donner... Tu es la seule chose qui me fait encore tenir debout... Même si tu es là que pour profiter de moi, je m'en fiche. Moi aussi je profite de toi, à ma façon. Je veux sentir tes cheveux dans mes yeux, tes lèvres sur les miennes, et ta main, juste là, là où ça me démange, là où ma féminité manque, mais se rappelle toujours à moi... Je veux être une vraie femme pour toi... Et toi, tu en as envie aussi ?

Tes mains se promènent sur moi et m'explorent un peu. Et ben, tu aimes l'aventure, on dirait ! Tu es pas si timide finalement ! Tant mieux, ça me facilitera les choses. Je l'attrape par la nuque et je glisse ma langue dans sa bouche. Ca réchauffe tout mon corps... Ca ne fait que quelques mois mais, bon sang, ce que ça m'a manqué ! Jochem aimait pas trop m'embrasser, il trouvait ça niais. Livaï me repousse pas du tout, il semble aimer ça, même si durant la première seconde, j'ai eu l'impression qu'il luttait un peu. T'inquiète pas, c'est pas sale. Quand on en a envie, c'est pas sale du tout ; c'est même très bon...

Tu penses être prêt ? Moi, je le suis. Je le suis depuis longtemps déjà. Laisse-moi te montrer... Je sais que tu me feras pas de mal... et je t'en ferai pas non plus... Je veux juste... que tu m'aimes...

Mon héros...

Les Chroniques de Livaï ~ Tome 1 [+13]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant