Prologue

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Déjà plusieurs heures que nous roulons. Je regarde le paysage défiler à vive allure à travers la vitre. De part et d'autre de la chaussée, des bois secs à perte de vue dans lesquels des milliers de cigales poussent la chansonnette à tue-tête. Il est midi passé. Le soleil frappe de toute son intensité et l'intérieur de la voiture est une véritable fournaise. A côté de moi, David, mon père, est en train de conduire, reprenant à voix basse les paroles de tubes passés de mode que diffuse la radio.

Bientôt, il jette un oeil sur moi et me dit :

_ Tu comptes faire la gueule encore longtemps ?

_ Je ne fais pas la gueule.

_ Ah bon. Alors pourquoi tu n'as pas dit un mot de tout le trajet ?

_ Sûrement parce-que je n'ai rien à dire.

_ Tiens donc...

Mon père pousse un soupir avant d'ajouter :

_ Écoute, je sais que tu n'es pas ravi de déménager. Mais, tu verras, ce sera l'occasion de prendre un nouveau départ.

_ Tu es bien le seul à avoir envie d'un nouveau départ. Moi je me sentais très bien à Paris.

Cette fois, mon père me lance, avec plus de fermeté :

_ Je veux bien être sympa mais il y a des limites. La vérité c'est que si tu ne t'étais pas fait virer de ton ancien lycée nous n'aurions peut-être pas été obligés de partir.

_ C'est ça, fais comme si c'était de ma faute. Si on est parti, ça n'a rien à voir avec moi. C'est parce-que tu as décidé pour une raison obscure que j'ignore qu'aller se perdre en province allait nous faire du bien. Alors ne me mets pas ça sur le dos !

_ Je persiste à penser que ça va nous faire du bien. Je n'en pouvais plus de la capitale. J'étouffais... Oh et puis merde, je n'ai pas à me justifier. C'est encore moi le père ici. Alors toi tu fais ce que je te dis et si ça ne te plaît pas c'est pareil.

_ Comme d'habitude tu n'en as rien à faire de ce que je pense...

_ Qu'est-ce que tu as dit ?

_ Rien, je bredouille en retour, conscient que le fait d'insister ne ferait qu'envenimer les choses.

Si nous avons ne serait-ce qu'un point commun mon père et moi, c'est bien que nous sommes tous les deux des têtes de mule. Alors, quand nous ne sommes pas d'accord ce qui arrive relativement souvent, inutile d'espérer nous réconcilier. Aussi, je ne vais pas gaspiller mon énergie à essayer de le faire changer d'avis.

De prime abord, je pourrais m'estimer heureux. Nice, c'est plutôt pas mal comme destination. Il y a la mer, du soleil, des jolies filles, des matchs de foot, et tout ce qu'il faut en commerces et en distractions pour un jeune de mon âge. C'aurait pu être pire, j'aurais pu me retrouver dans un coin perdu et pluvieux comme pas possible avec rien à faire d'autre que de regarder des vaches toute la journée.

Mais aucune ville, aussi belle et agréable à vivre soit-elle, ne peut rivaliser avec Paris. Ce n'est pas pour rien que l'on dit que c'est la plus belle du monde. Son charme est incomparable mais surtout Paris c'est chez moi. Là où je suis né. Là où j'ai grandi. Là où j'ai mes repères. Là où j'ai mes amis. Là où j'ai vécu avec ma mère quand elle était encore de ce monde.

Il va pourtant falloir que je m'y fasse parce-que quelque chose me dit que je vais passer un certain temps à Nice.

Juste un mec bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant