Sitôt que je mets les pieds dans le hall du lycée, Nolan vient à ma rencontre. A en juger par l'air joyeux qui étire son visage, il semblerait qu'il ait passé un excellent week-end.
_ Simon, comment vas-tu ?
_ Bien, mais pas autant que toi apparemment, je lui réponds avant de lui faire remarquer, tu as très bonne mine ce matin !
_ Tu sais que ce week-end, j'ai disputé mon premier tournoi de boxe ? me dit-il tout en trépignant d'excitation.
Si je le sais ? La semaine passée il n'a fait que parler de ça.
_ C'est bien ce que tu m'avais dit, oui. Alors, comment ça s'est passé ? je lui demande, bien que je n'aie aucun doute sur sa réponse.
Avec l'immense modestie qui le caractérise, il me lance en retour :
_ A la perfection ! J'ai été incroyable ! J'ai dominé tous mes combats de la tête et des épaules jusqu'à obtenir une victoire écrasante en finale du tournoi et ainsi décrocher mon ticket pour les championnats de France !
_ Félicitations, c'est super et totalement mérité quand on sait combien tu t'es entraîné dur ces dernières semaines, je m'écrie, sincèrement ravi pour lui.
_ Je vais participer aux championnats de France, tu te rends compte ! renchérit-il avant de fondre sur moi et de m'enlacer vigoureusement, provoquant la circonspection des autres élèves qui se demandent bien quelle est la raison d'une telle effusion.
Après plusieurs secondes, il me libère enfin de son étreinte et tandis que nous arpentons le couloir en direction de la salle de sciences, il continue inlassablement de me conter son exploit sportif, à tel point que j'en connais bientôt les moindres détails.
Parvenus au bout du couloir, nous nous arrêtons pour attendre avec d'autres de nos camarades de classe que le cours qui précède le nôtre se termine. Kimi arrive à son tour. Elle se dirige vers nous, ignore totalement Nolan qui semble très mal le prendre si l'on en croit le rictus de contrariété qu'il arbore, et se hisse sur la pointe des pieds pour me faire la bise, un privilège qu'elle réserve à ses amis les plus proches et auquel j'ai droit depuis ce jour où nous avons croisé son père en ville. Je dois dire que je suis assez fier d'être salué de la sorte par une fille aussi populaire que Kimi. D'ailleurs, l'attention qu'elle me porte a grandement contribué à améliorer mon image au lycée. Fini les brimades venant des autres garçons, j'ai même l'impression que certains d'entre eux commencent à me respecter.
Tout en continuant de traiter Nolan comme un fantôme et de faire littéralement comme s'il n'existait pas, elle me lance :
_ On se voit toujours ce soir après les cours ?
Tandis que Nolan accueille sa question d'un air sidéré, je lui réponds dans la foulée :
_ Bien sûr.
_ Super alors, me dit-elle dans un sourire avant de s'en aller retrouver ses copines.
Dès qu'elle s'est éloignée, Nolan me fait remarquer :
_ Décidément, ça va mieux entre vous. Et vous vous voyez souvent.
_ Ça va mieux oui, disons qu'on a appris à se connaître. Si on se voit régulièrement, c'est parce-qu'il faut bien avancer l'exposé de français, je me justifie, comme je décèle un air suspicieux dans sa voix.
_ Oui enfin, comme l'exposé a été décalé, vous avez plus de temps qu'il n'en faut pour le préparer.
J'aurais dû me douter que je ne pouvais pas me retrancher derrière l'excuse de notre projet commun en français pour expliquer mon rapprochement avec Kimi. Féru de parapente, notre professeur a malencontreusement raté sa réception et s'est fracturé le tibia. Il a dû être opéré et va rester convalescent plusieurs semaines provoquant le report de notre examen. Je vais donc devoir trouver autre chose pour satisfaire la curiosité de mon ami. Et je ne peux évidemment pas lui parler de la rencontre avec le père de Kimi, j'ai fait la promesse de garder cela pour moi.
_ C'est vrai, mais autant anticiper. Je n'aime pas travailler avec la pression du temps, je feins encore.
_ Anticiper hein ? me dit Nolan sur un ton désobligeant qui a le don de m'irriter.
D'ordinaire j'aurais ruminé mon agacement en silence, mais là, sans que je ne sache vraiment pourquoi, l'envie me prend de lui reprocher ses indiscrétions sur Kimi et moi.
_ Anticiper oui. Et puis d'abord, de quoi tu te mêles ? Quand bien même je verrais Kimi pour autre chose que pour travailler, je ne vois pas en quoi ça te concerne.
Nolan se fige un instant, visiblement stupéfait de me voir faire preuve de tant d'aplomb.
_ Justement ça me concerne, proteste-t-il avec véhémence.
_ Ça te concerne parce-que c'est ton ex ? C'est ça que tu veux dire ?
_ Ce n'est pas du tout ce que je veux dire.
_ Ah non, alors qu'est-ce que tu veux dire ?
_ Si je dis que ça me concerne, c'est parce-que tu es mon ami. Tu as déjà ramassé une fois à cause de Kimi. Je ne veux pas que ça recommence. Je ne veux pas que tu te fasses des idées et que tu morfles à nouveau. Tu peux comprendre ça ?
Il s'en fait pour moi, je ne peux pas lui en vouloir pour ça. Et dire que je commençais à me demander s'il n'était pas jaloux que je passe du temps avec Kimi.
_ Je ne vais pas morfler comme tu dis. Je sais bien qu'il ne se passera jamais rien avec Kimi. Elle a été très claire sur le fait qu'elle n'est pas amoureuse de moi. Mais ça ne nous empêche pas de nous apprécier et de nous côtoyer, je plaide d'un ton radouci.
_ Et toi alors ? me demande-t-il ensuite.
_ Moi quoi ? je relève à brûle-pourpoint.
_ Tu l'aimes toujours ?
Si je l'aime encore ? C'est évident. Mais je ne vais surtout pas lui dire, sans quoi je suis bon pour qu'il me sermonne toute la journée.
_ Je ne l'aime plus, je feins donc en m'efforçant de me montrer convaincant.
_ Tu en es sûr ? renchérit-il, comme il semble tout de même en douter.
_ Aussi sûr qu'il est possible de l'être, je lui confirme avec détermination.
Nolan laisse filer quelques secondes avant de finalement me dire :
_ Bon et bien si tu ne l'aimes plus, c'est très bien.
_ C'est très bien oui, je répète en guise de conclusion à cette conversation qui m'embarrasse quelque peu et tandis que nous pénétrons dans la salle de classe.
La suite dès samedi ! ;)
VOUS LISEZ
Juste un mec bien
RomanceDepuis le décès tragique de sa mère, Nolan doit faire avec une colère et une agressivité qui ne le quittent jamais et qui lui ont déjà valu d'être viré de son ancien lycée. Contraint par son père de quitter Paris, la ville dont il est originaire, po...