Je ne sais pas qui est cet homme qui s'avance dans notre direction mais sa présence met Kimi dans tous ses états. Depuis le temps que je la côtoie au lycée, je ne l'ai jamais vue aussi nerveuse qu'à cet instant.
Je m'interroge : qui est ce type ? Et que lui a-t-il fait pour qu'elle appréhende à ce point de se retrouver face à lui ? Je n'ai pas de réponses à apporter à ces questions mais quelque chose me dit que la situation pourrait bien dégénérer.
L'homme fait encore quelques pas pour finalement s'immobiliser à un mètre à peine de nous. Kimi le fixe d'un air orageux. Je peux deviner dans ses yeux la colère qui l'assaille, une colère sourde qui ne demande qu'à jaillir.
Après que le silence ait régné en maître durant plusieurs secondes, c'est finalement l'inconnu qui se décide à initier la conversation.
_ Bonjour Kimi, comment vas-tu ? dit-il ainsi, sobrement.
Ces banalités, sans doute simplement destinées à briser la glace, ne sont pas du goût de Kimi qui assène aussitôt en retour :
_ « Bonjour Kimi, comment vas-tu ? » c'est tout ce que tu trouves à me dire après toutes ces années ? Quoique je devrais peut-être me sentir flattée que tu te souviennes de mon prénom, et encore plus que tu sois capable de me reconnaître.
_ Que voulais-tu que je te dise d'autre ? lui rétorque-t-il en haussant les épaules d'une manière nonchalante qui me fait immédiatement lui trouver un côté déplaisant.
Une mauvaise première impression qui tend à se confirmer par la suite.
_ Je ne sais pas moi, c'est vrai que ce n'est pas évident. Qu'est censé dire un père à la fille qu'il a abandonnée lorsqu'il la recroise par hasard au détour d'une rue ? lâche sèchement Kimi.
A la lueur de cette remarque pleine d'hostilité, je comprends mieux dans quelle situation je me trouve. Cet homme n'est autre que le père de Kimi, un père qui si je me fie à ses dires, l'aurait abandonnée. Si tel est le cas, il n'est pas étonnant qu'elle lui en veuille. Comment un parent peut-il aller jusqu'à renier son enfant ? C'est tellement injuste. Le seul fait d'imaginer que Kimi ait pu subir cela a le don de me révolter.
On aurait pu penser que le père de Kimi se serait contenté de baisser la tête et de susurrer quelques mots d'excuse. Mais il n'en fait rien. Pire encore, il a même le culot d'essayer de se justifier :
_ Tu sais bien que ce n'est pas aussi simple Kimi. Avec ta mère, on ne se supportait plus et...
_ Vous ne vous supportiez plus ? La faute à qui ? Si tu ne l'avais pas trompée, ça se serait peut-être mieux passé entre vous, tu ne crois pas ? le coupe-t-elle, en proie à une exaspération qui ne fait que grandir.
Sans lui laisser le temps de répondre, elle tonne de plus belle :
_ Et peu importe que votre couple se soit porté mal. Moi je n'y étais pour rien, tu n'avais pas le droit de me laisser comme tu l'as fait !
_ Je comprends que tu sois en colère mais tu ne sais pas tout...
_ Si, je sais tout. Maman m'a dit que tu n'avais jamais voulu d'enfant. J'ai été conçue accidentellement. Quand je suis née, tu as pris sur toi pour essayer de m'élever, enfin si l'on peut dire que tu m'as élevée pendant un temps car tu n'étais jamais là. Et puis un jour, tu as estimé que tu en avais fait assez et tu t'es tiré. C'est vrai que c'était une bonne solution. Ainsi tu te débarrassais du fardeau que j'étais à tes yeux et tu retrouvais ta liberté.
Kimi est interrompue dans sa démonstration lorsqu'une jeune femme fait son apparition.
_ Où étais-tu passé ? Ça fait dix minutes que je te cherche partout, lance-t-elle à son père après l'avoir embrassé.
Ce dernier semble soudain beaucoup plus embarrassé.
_ Oh pardon, je vous ai peut-être interrompus, s'écrie-t-elle en posant tour à tour les yeux sur Kimi et sur moi avant de nous questionner, et d'ailleurs vous êtes ?
Comme Kimi reste silencieuse, se contentant de fusiller son père d'un regard noir, je réagis le premier.
_ Simon... Je suis... un jeune... lycéen... Oui voilà, je vais au lycée... je bredouille ainsi, faute de mieux.
Elle accueille ma réponse d'un air perplexe avant de relancer Kimi :
_ Et vous alors ? Vous êtes ?
Kimi restant résolument plongée dans son mutisme, la jeune femme réitère encore sa question mais, cette fois, elle s'adresse à son compagnon :
_ Qui est cette charmante jeune fille ?
Désormais, l'assurance du père de Kimi s'est bel et bien envolée et il a toutes les peines à trouver ses mots pour répondre. Je peux voir à l'expression qui couvre son visage à quel point il est mal à l'aise.
_ Elle est... Enfin c'est... commence-t-il par balbutier.
Il est empêché de poursuivre quand Kimi sort enfin de sa réserve et s'écrie d'un ton déterminé :
_ Je m'appelle Kimi et, ne lui en déplaise, je suis sa fille.
_ Ah... laisse-t-elle échapper en retour, visiblement sous le choc de cette annonce.
Mais Kimi est décidée à ne pas en rester là. Alors elle renchérit :
_ Et vous vous êtes la femme pour laquelle ils nous a abandonnées, ma mère et moi ?
_ Euh... Je...
_ Au fond je le comprends. Vous êtes jeune, belle et je suppose que vous n'avez pas d'enfant. D'ailleurs, j'espère que vous n'envisagez pas d'en faire avec lui car si tel est le cas vous risquez d'être déçue. Robert n'a jamais voulu d'enfant. Malheureusement, il a fallu qu'il m'ait moi alors il s'est attelé à faire comme si je n'existais pas jusqu'à carrément me rayer de sa vie, ajoute encore Kimi d'un air provoquant.
_ Ça suffit Kimi ! tonne son père, piqué au vif.
Elle s'apprête à insister mais elle n'en a pas l'occasion car deux gamins accourent soudain jusqu'à son père pour venir s'agripper à ses jambes.
_ Papa, c'est quand qu'on rentre à la maison ? Mamie est fatiguée, lance l'un d'eux en désignant du doigt une vieille dame qui vient de se laisser tomber sur un banc public à deux pas de là.
Il a dit papa ? Mince, la situation est encore pire que je le pensais.
_ Papa ? relève Kimi.
_ Je vais tout t'expliquer, tente de réagir son père.
_ Ne te fatigue pas, j'ai très bien compris. En fait, tu voulais des enfants, c'est de moi que tu ne voulais pas.
_ S'il te plaît, ne le prends pas comme ça...
_ Non, tu as raison, il ne faut pas que je le prenne comme ça, réplique-t-elle, la gorge nouée.
Elle s'approche tout près de lui puis, sans crier gare, elle le gifle vigoureusement. Tandis qu'il tient sa joue meurtrie, elle assène :
_ Voilà qui est une réaction plus adaptée.
Après quoi, elle tourne les talons et presse le pas pour s'éloigner au plus vite de son père. Comme je me retrouve seul face à lui, je ne peux me retenir de lui faire part de ma profonde indignation :
_ Vous devriez avoir honte de vous.
Puis je me lance à la poursuite de Kimi, réfléchissant à ce que je vais bien pouvoir lui dire pour tenter d'apaiser sa tristesse que je devine immense.
La suite dès samedi ! ;)
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Juste un mec bien
RomanceDepuis le décès tragique de sa mère, Nolan doit faire avec une colère et une agressivité qui ne le quittent jamais et qui lui ont déjà valu d'être viré de son ancien lycée. Contraint par son père de quitter Paris, la ville dont il est originaire, po...