Chapitre 89 (Amandine)

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J'aurais dû me douter que ça arriverait

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J'aurais dû me douter que ça arriverait. Kimi a recroisé son père et voilà que les secrets du passé menacent de resurgir. Je me revois en train d'expliquer à David qu'il ferait mieux d'être sincère avec Nolan, arguant que s'il ne lui dit pas toute la vérité sur la mort de sa mère il risque de le découvrir par lui-même et de très mal le prendre. Des conseils pleins de sagesse que je ferais bien de m'appliquer à moi-même car le fait est que je suis très mal placée pour donner des leçons d'honnêteté. Et pour cause, j'ai menti à ma fille au sujet des circonstances qui ont amené son père à quitter la maison.

Le problème avec les mensonges, c'est qu'ils finissent toujours par se savoir, c'est pourquoi je dois tout avouer à Kimi. Plus tôt je le ferai et mieux ce sera. Peut-être qu'en lui disant maintenant, elle parviendra à me pardonner. Peut-être oui, mais je n'en ai aucune certitude, c'est d'ailleurs là ce qui me terrifie.

Je dois lui dire, et en même temps j'ai tellement de mal à franchir le pas. J'hésite sur la façon de lui annoncer, et puis il y a la peur. La peur de sa réaction qui, je l'imagine, sera mauvaise. Elle se sentira sûrement trahie et je me demande comment faire pour éviter que ce sentiment de trahison ne vienne remettre en cause la relation de confiance que nous avons bâtie toutes les deux au fil des années. Je comprends mieux les difficultés que rencontre David pour parler à son fils. Ça n'est vraiment pas facile...

J'ai beau avoir agi dans la seule intention de protéger Kimi, je me sens coupable de ne pas m'être montrée complètement honnête avec elle. Je lui ai raconté une histoire dans laquelle je tenais le beau rôle, une histoire qui faisait de son père un odieux personnage et de moi une victime alors que la réalité est beaucoup plus subtile que cela. Elle a cru à cette histoire pendant un temps. Mais il semble évident que ce temps est désormais révolu.

Lorsque je rentre à la maison, je n'en mène pas large. Je me sens comme un athlète qui après de longs mois d'entraînement et de sacrifices attend fébrilement le verdict de la compétition. Au moment de franchir le seuil de chez moi, je suis littéralement tétanisée par l'enjeu. Je sais que je n'ai rien à gagner et tout à perdre. Le couperet va tomber et je crains les conséquences.

_ Kimi, c'est moi. Je suis rentrée, je lance timidement dans la maison silencieuse.

J'entends aussitôt ma fille dévaler les marches de l'escalier qui mène à sa chambre. Je me prépare à affronter ses questions et me promet d'y répondre avec vérité.

Kimi s'approche de moi. Elle me détaille un instant d'un air impassible et je m'étonne de voir qu'elle ne semble ni en colère ni triste. En fait, son calme tranche avec son émoi de la veille. Sans doute la nuit a-t-elle su l'apaiser quelque peu.

_ Tu voulais qu'on parle toutes les deux, on peut le faire maintenant, je lui propose dans un sourire crispé.

Elle marque quelques secondes d'hésitation qui me paraissent durer une éternité. Puis, prenant le contrepied de tout ce que j'imaginais, elle me répond :

_ Parler de quoi ? Tu ne m'as pas dit que papa avait eu d'autres enfants, c'est vrai. Mais je ne vais pas t'en vouloir d'avoir essayé de me protéger, car je sais bien que c'est pour ça que tu l'as fait. Alors c'est oublié.

_ Vraiment ? je lui lance, circonspecte. Mais tu te demandes sûrement pourquoi ton père est parti ?

_ J'y ai pensé toute la nuit et j'ai fini par prendre une résolution. Je vais arrêter de m'encombrer l'esprit avec ce genre de question. Mon père est parti, c'est ainsi. Pourquoi a-t-il fait ça ? Lui seul le sait, et comme tu l'as dit toi-même, c'est tant pis pour lui s'il n'a pas su voir la fille extraordinaire que je suis. 

Voyant que je me trouve stupéfaite, elle s'enquiert :

_ Qu'est-ce qu'il y a ?

_ C'est juste que hier tu avais l'air tellement peinée et énervée que je suis un peu surprise de te voir aussi positive aujourd'hui.

_ Je ne veux plus me gâcher la vie avec le passé. Je redoutais de revoir mon père. A présent que c'est fait, je veux me tourner définitivement vers l'avenir, s'écrie-t-elle d'un ton optimiste.

_ Tu es sûre de ce que tu dis ? je la questionne encore.

_ Mais oui. Arrête de t'inquiéter, tout va bien, m'assure-t-elle avant d'ajouter tout en s'emparant de sa veste dans le hall, bon il faut que je te laisse.

_ Tu vas où ?

_ Faire les boutiques avec Stella. Je profite qu'elle soit blessée, elle ne trouve jamais le temps de m'accompagner sinon.

Elle file vers la porte et tandis qu'elle arpente déjà l'allée qui traverse le jardin, je la retiens :

_ Kimi !

_ Oui ?

Il faut que je lui dise tout maintenant. Il faut que je lui dise !

Mais la peur est trop forte et finit par l'emporter :

_ Ne rentre pas trop tard, d'accord ? J'aimerais bien qu'on passe du temps toutes les deux ce soir.

_ Promis ! me dit-elle d'un air enjoué avant de disparaître dans la rue adjacente.

Quant à moi, je regagne l'intérieur de la maison avec le terrible pressentiment que je vais regretter d'avoir manqué cette occasion de révéler la vérité à ma fille.

La suite dès jeudi ! ;)

Juste un mec bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant