Chapitre 13 (David)

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Dring...

Au bout de quelques instants, Amandine vient m'ouvrir et se jette aussitôt dans mes bras. Durant plusieurs secondes, nous nous embrassons langoureusement, comme deux amants qui s'aiment et se retrouvent après une longue séparation. Puis, elle me traîne jusqu'à sa chambre à coucher tout en me susurrant à l'oreille :

_ On a du temps à rattraper.

Amandine est l'une des raisons qui m'a poussé à m'installer à Nice, pour ne pas dire la principale. J'y pensais depuis un moment déjà alors, quand Nolan s'est fait viré de son lycée, je me suis dit qu'il était temps de franchir le cap et de quitter Paris où plus rien ne nous retenait pour aller la retrouver.

Quand je l'ai rencontrée, ma femme venait de mourir. Je n'en finissais plus de sombrer, incapable de combler le vide immense qu'elle avait laissé dans ma vie. Bien sûr, je n'envisageais pas de me remettre avec quelqu'un avant un bon moment. En fait, je n'envisageais pas de me remettre avec quelqu'un tout court. Je me croyais perdu pour l'amour. Comment pourrais-je aimer aussi fort que j'avais aimé Nora ? Ça me semblait parfaitement impossible. Pourtant, quand j'ai vu Amandine à ce séminaire, j'ai tout de suite eu le coup de coeur. Un coup de coeur qui s'est avéré réciproque.

Très vite, nous avons entamé une liaison, profitant de mes déplacements professionnels pour nous retrouver dans des hôtels ici et là. Nous avons choisi de garder notre relation secrète pour l'instant. Amandine n'en a pas informé sa fille. Quant à moi, je n'ai encore rien dit à Nolan. Il est toujours très éprouvé par la perte de sa mère et je ne voudrais pas prendre le risque de le destabiliser plus qu'il ne l'est déjà en faisant entrer une nouvelle femme dans notre vie. Il semble aller mieux depuis quelque temps au point que je me mets à espérer que ses problèmes de violence soient enfin derrière lui. Aussi, je ne veux rien faire qui puisse remettre en cause cet équilibre qu'il est en train de trouver.

Je suis étendu sur le matelas. Mon amante s'est lovée contre moi. Sa tête posée sur mon torse, elle écoute mon coeur battre pour elle. Soudain, elle se décide à rompre le silence :

_ Pourquoi ce sourire ?

_ Quel sourire ? je lui demande.

_ Celui sur ton visage. Tu m'as l'air heureux...

_ Ça c'est parce-que je suis heureux. Après l'enfer qu'ont été ces derniers mois, c'est un peu comme si j'étais au paradis ici avec toi.

_ C'est vrai ça ?

_ Bien sûr que c'est vrai. J'ai l'impression de voir enfin le bout du tunnel.

Amandine resserre son étreinte et me questionne :

_ Et avec Nolan ?

_ Je ne pensais pas dire ça un jour mais ça va mieux. J'ai le sentiment qu'il fait des efforts pour que les évènements de l'année passée ne se reproduisent pas. L'autre jour, il a même accepté de voir un psy.

En même temps, je ne lui ai pas vraiment laissé le choix en le mettant devant le fait accompli comme je l'ai fait. 

_ C'est positif tout ça ! me dit Amandine d'un ton enthousiaste.

_ Je crois, sauf qu'il a dû rester à peine cinq minutes dans le bureau du thérapeute avant d'en sortir en trombe, m'assurant qu'il n'y remettrait plus jamais les pieds.

_ Au moins, il a essayé et il a vu que ça n'était pas pour lui.

_  C'est vrai qu'il a eu le mérite d'essayer. En tout cas, je le trouve beaucoup plus apaisé. Depuis qu'on est ici, on ne s'aboie plus dessus et on fait même des choses ensemble, c'est dire !

_ C'est super ça !

_ Pourvu que ça dure...

_ Pourquoi ça ne durerait pas ?

_ Parce-que Nolan reste Nolan. Il est imprévisible. Avec lui, je ne suis jamais à l'abri d'une mauvaise surprise.

_ Mais tu l'as dit toi-même, il s'est calmé.

_ Espérons-le, oui.

A cet instant, mon téléphone se met à vibrer sur la table de chevet. Je me contorsionne pour l'attraper tandis qu'Amandine essaye de m'en empêcher :

_ Non, s'il te plaît, ne réponds pas. On est bien là tous les deux, me supplie-t-elle.

_ Je préfère quand même répondre. On ne sait jamais, si c'est important.

_ Parce-que tu attends un coup de fil important ?

_ Non, pas particulièrement. Mais j'aime autant répondre quand même si ça ne te dérange pas ?

Et pour cause. En bon homme d'affaires que je suis, j'ai l'habitude de n'ignorer aucun appel.

_ Vas-y. Fais si ça te rassure, me lance-t-elle, compréhensive.

Je décroche et une voix me dit aussitôt :

_ Monsieur Rive ?

_ Lui-même. Qui est-ce ?

_ Mérédith Barais, proviseure du lycée Costa.

Nul besoin d'être devin pour savoir que ça ne sent pas bon. D'expérience, quand un proviseur appelle, ça n'est jamais pour annoncer une bonne nouvelle. C'est plutôt tout le contraire.

_ C'est au sujet de votre fils.

Ça, je m'en serais douté.

_ Il y a un problème ? je demande en sachant déjà à quoi m'en tenir.

_ En effet. Il a eu une altercation assez violente avec l'un de ses camarades à l'issue du cours de sport. Nous les avons séparés et mis en retenue. Si vous pouvez venir au plus vite pour qu'on puisse régler ça.

_ Bien sûr, j'arrive tout de suite.

Je raccroche et, voyant l'air catastrophé qui couvre mon visage, Amandine s'enquiert :

_ Qu'est-ce qu'il se passe ?

_ Nolan, il s'est battu, je lui confie simplement tout en me rhabillant.

_ Merde...

_ Qu'est-ce que je te disais ? Avec lui, on n'est jamais sûr de rien. Bon, j'y vais. J'espère qu'il ne l'a pas trop amoché au moins, qu'on ait une chance d'éviter l'exclusion.

_ Tu me tiens au courant, hein ? me dit-elle, navrée.

_ Évidemment... je réponds en filant de ce pas.

C'était trop beau pour être vrai. Il a fallu que Nolan recommence à se battre, et ce dès son deuxième jour dans son nouveau lycée. Décidément, je ne sais plus par quel bout le prendre. C'en devient désespérant. Que vais-je bien pouvoir faire de lui s'il se fait exclure à nouveau ? Je n'en sais rien et je préfère ne pas penser à cette hypothèse. Pour l'heure, je dois me rendre le plus rapidement possible au lycée, histoire de savoir ce qu'il en est exactement.

Juste un mec bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant