Le juge-arbitre déclare la reprise du combat. C'est parti pour le troisième round. Les premiers instants sont marqués par une certaine retenue. Cari et moi, nous restons à bonne distance l'un de l'autre, nous contentant de quelques frappes qui ne ressemblent en rien à des attaques et qui sont en fait destinées à jauger l'adversaire. Nous sommes conscients que nous entrons dans un moment décisif et aucun de nous ne veut prendre de risques. Il n'est pas question de manquer une offensive et de se faire contrer.
Je suis le premier à déclencher réellement les hostilités. A la faveur d'une brusque accélération, j'envoie une droite qui finit dans les gants de Théo Cari. J'enchaîne avec un coup circulaire, puis je tente un direct. Mais il ne se désunit pas et pare chacune de mes tentatives avec autorité. Il a visiblement repris du poil de la bête. Je n'en attendais pas moins venant de lui.
Définitivement revenu dans le match, il m'attaque à son tour et parvient à me coincer dans les cordes. Là, il me frappe incessamment, espérant que je vais enfin céder. Mais j'amortis chacun des coups qu'il me porte et je parviens finalement à me sortir de cette situation délicate sans encombre.
Je profite qu'il commette une erreur de placement pour lui assèner une violente frappe dans les côtes. Il lâche un cri de douleur et réplique d'un crochet du gauche que je reçois dans l'abdomen. Le souffle coupé, je suis plié en deux tandis qu'il continue à cogner sur moi. Je me réfugie derrière mes gants et me bats pour tenir ma garde malgré la souffrance. Au prix d'un effort énorme, je résiste.
D'un côté comme de l'autre, la fatigue se fait sentir. Aucun de nous deux ne semble en mesure de hausser son niveau pour mettre en danger l'adversaire. On se rend coup pour coup.
Plus que quelques secondes, Cari lance un dernier assaut. Je serre les dents et encaisse, encore et toujours. Il ne me mettra pas KO aujourd'hui.
L'arbitre déclare le combat terminé. Les spectateurs nous applaudissent bruyamment tandis que nous regagnons nos coins. Cette liesse me fait chaud au coeur. Le public est visiblement ravi de la lutte acharnée que nous venons de livrer.
Quand je fais mon retour dans mon coin, Féri et Stella me couvrent de félicitations. Mais je n'y prête pas vraiment attention. A ce moment-là, je n'ai qu'une obsession, celle de savoir si j'ai gagné le combat. Aucun des deux boxeurs n'ayant été mis hors d'état de combattre avant la fin du temps imparti, il revient au juge-arbitre de désigner le vainqueur en attribuant des points pour chaque coup net que nous avons porté. Celui qui obtient le plus de points remporte le combat.
Je me refais le fil de la partie pour savoir qui de Cari ou de moi a été le plus efficace. Je sais que je perds le premier round. Le deuxième me semble avoir été à mon avantage. Quant au troisième, difficile à dire tant il a été équilibré. Je sonde Féri mais il se montre tout aussi indécis que moi.
_ Je n'en sais rien Nolan. C'était tellement serré entre vous. Mais quoi qu'il arrive, tu peux être fier de ce que tu as fait.
De nouveau, j'ignore ce compliment du coach. Dans mon esprit, toujours la même question qui tourne en boucle : vais-je me qualifier pour le prochain tour ?
L'arbitre nous fait enfin signe de le rejoindre au centre du ring. Il attrape mon poignet ainsi que celui de mon adversaire. Il est sur le point de rendre son verdict. Mon coeur bat si fort qu'il en fait trembler ma cage thoracique. Je ferme les yeux et me concentre sur mon bras, croisant les doigts pour que l'arbitre le soulève et consacre ainsi ma victoire. Plusieurs secondes s'égrènent sans que rien ne se passe. Et puis soudain, j'entends la foule qui se met à hurler et qui scande le nom de mon adversaire. Je rouvre les yeux pour en avoir le coeur net mais au fond de moi j'ai déjà compris. L'arbitre vient de lever le bras de Cari. C'est lui qui remporte le combat aux points. Mon parcours aux championnats de France s'arrête là, dès le troisième tour.
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Juste un mec bien
RomanceDepuis le décès tragique de sa mère, Nolan doit faire avec une colère et une agressivité qui ne le quittent jamais et qui lui ont déjà valu d'être viré de son ancien lycée. Contraint par son père de quitter Paris, la ville dont il est originaire, po...