Chapitre 99 (Féri)

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<<< Point de vue FERI >>>

Je garde les yeux rivés sur mon GPS pour m'assurer de ne pas manquer ma destination. Je roule au pas sur les routes d'un quartier résidentiel assez chic durant quelques instants et je me gare devant une somptueuse villa. Je franchis à pied le portail marquant l'entrée de la propriété, profitant qu'il soit ouvert, puis je remonte une allée bétonnée jusqu'à parvenir sur le seuil de la demeure. Je sonne et quelques secondes plus tard, la porte s'ouvre sur un homme d'une cinquantaine d'années. Je présume qu'il s'agit du père de Nolan mais je le questionne tout de même pour m'en assurer, craignant que l'adresse indiquée par Nolan sur sa fiche d'inscription au club de boxe ne soit erronée, à l'image de sa signature.

_ Monsieur Rive ?

_ C'est moi, qui le demande ? me dit-il en retour.

Nolan m'a donc donné la bonne adresse. C'est déjà ça, je n'avais aucune envie de parcourir toute la ville à la recherche de son domicile.

Je m'apprête à lui répondre mais il me coupe l'herbe sous le pied.

_ Excusez-moi, je suis bête, vous êtes sans doute le technicien pour le wifi. Vous n'imaginez pas combien je suis content de vous voir. Je dois envoyer des contrats à des clients mais allez savoir pourquoi il n'y a plus de connexion internet. Je pense que c'est la box qui est en panne mais je n'en suis pas certain. Venez avec moi, je vais vous montrer, me dit-il ainsi en m'invitant à le suivre à l'intérieur de la villa.

Il me prend donc pour un technicien en téléphonie. Quelle ironie, je suis à peine capable de me servir de mon téléphone portable. C'est Stella qui a insisté pour que j'en ai un. D'après elle, c'est un impératif pour vivre au 21ème siècle. Ce que j'en pense ? Un impératif, je ne sais pas, mais je dois bien reconnaître qu'il est assez pratique d'être joignable partout et tout le temps.

Tandis que nous nous trouvons déjà au milieu du salon et que nous nous approchons dangereusement d'un boîtier noir dont je suppose qu'il doit s'agir de la box défectueuse, je lui confie :

_ Pardon, mais je crois que vous m'avez pris pour quelqu'un d'autre. Je ne suis pas technicien, fort heureusement. En fait, mon nom est Féri, et je suis professeur au lycée Costa.

_ Oh vraiment ? Dans ce cas, en effet, je vous ai pris pour quelqu'un d'autre. Cela dit, je dois bien avouer que je suis surpris de trouver un professeur sur le pas de ma porte.

_ Oui, veuillez excuser cette visite incongrue. Je n'ai pas pour habitude de me rendre au domicile de mes élèves. Mais je ne viens pas en tant que professeur pour tout vous dire.

_ Ah bon, en quelle qualité sinon ? me demande-t-il encore, comme il ne comprend décidément pas ce que je fais chez lui.

_ Au lycée, j'enseigne le sport à Nolan. Et je suis aussi le président du club de boxe Le Vaillant, c'est moi qui ait proposé à votre fils de venir boxer et c'est moi qui l'entraîne.

L'amabilité qui couvrait jusque-là le visage de Monsieur Rive disparaît soudainement au profit d'un air sombre qui me fait aussitôt songer que son attitude à mon égard va être beaucoup moins cordiale dans les secondes qui suivent. Je ne m'y trompe pas. Furieux, il me prend immédiatement à partie :

_ Alors comme ça, c'est vous ? C'est vous qui avez poussé mon fils à faire de la boxe ? 

Il fait un pas vers moi et me défie d'un regard orageux. L'espace d'un instant, je me crois revenu à mes années de boxeur, j'ai l'impression de revivre le moment de la pesée où les deux adversaires se fixent droit dans les yeux, jouant à qui va le plus intimider l'autre. Sauf que là, je veux tout faire pour éviter que notre entrevue ne vire à l'affrontement.

Juste un mec bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant