Chapitre 113 (Kimi)

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Je prends une longue inspiration pour tenter de calmer le stress immense qui m'assaille et j'entre enfin dans la maison. A peine ai-je mis un pied dans le hall que ma mère fait irruption devant moi et s'écrie :

_ Kimi, tu es rentrée ! Je me suis tellement inquiétée !

Elle s'approche de moi dans l'intention de me prendre dans ses bras. Mais, sans un mot pour elle, je l'esquive et me dirige dans le séjour. Elle m'emboite le pas et quand elle me rejoint, je lui lance d'un ton sec qui trahit ma colère :

_ Tu voulais qu'on parle. Je suis là, alors parlons.

_ En effet, je crois qu'il le faut, me répond-t-elle d'une voix mal assurée qui témoigne de sa grande nervosité.

Il s'en suit plusieurs secondes d'un silence tendu, le calme avant la tempête. C'est finalement moi qui suis la première à déclencher les hostilités :

_ Tu es censée me dire la vérité sur ce qui s'est réellement passé avec mon père, pour reprendre les mots que tu as prononcés quand tu étais au téléphone avec Simon.

_ La vérité, oui...

Comme elle tarde à se lancer, j'ajoute en croisant ostensiblement les bras et en la fusillant d'un regard impatient :

_ Alors, j'attends.

_ Très bien. Mais avant que je ne commence à te raconter, tu ferais bien de t'asseoir, et moi aussi d'ailleurs.

Elle va prendre place sur le divan. Je l'imite en prenant soin de laisser quelques mètres entre nous. Elle consacre encore un instant à choisir ses mots et se décide enfin à me livrer son récit.

_ Comme tu le sais, j'ai rencontré Robert lors de ma dernière année d'études à la faculté de droit. Nous étions dans la même promotion. Entre nous, ça a été le coup de foudre et ensuite les choses sont allées très vite, sans doute trop vite. Notre diplôme en poche, nous nous sommes immédiatement installés ensemble. Il a décroché un travail de juriste dans un grand cabinet d'avocat niçois où il a exercé le temps de passer le concours du barreau. Quant à moi, je me suis lancée dans une carrière de commerciale en intégrant une grande entreprise de Prêt-à-porter. Nous gagnions tous les deux confortablement notre vie et nous avons voulu faire des projets. Nous avons commencé par nous marier, un an et demi seulement après notre rencontre. Et puis nous avons envisagé de fonder une famille. Seulement voilà, pendant des mois on a essayé d'avoir un enfant, en vain. J'ai fait une première fausse couche, puis une seconde...

_ Tu ne m'en as jamais parlé... je m'interromps, saisie par son émotion.

_ J'aurais peut-être dû. Mais le fait est que ce souvenir m'est terriblement douloureux et que j'ai fait le choix de n'en parler à personne, considérant que ce triste épisode de ma vie ne concernait que moi. Robert non plus n'en a jamais parlé, enfin je crois mais après tout je n'en suis pas sûre. Peut-être s'en est-il confié à sa nouvelle... Bref, passons.

Me raconter cela est très éprouvant pour ma mère et il lui faut marquer un temps de silence avant de trouver le force de poursuivre.

_ Mes fausses couches ont porté un coup très dur à notre couple. Robert et moi, nous nous sommes éloignés, chacun ruminant sa frustration et son chagrin dans son coin et ne pouvant s'empêcher de juger l'autre responsable de cet échec. Notre relation se délitait et Robert n'a rien trouvé de mieux à faire pour arranger les choses que d'aller voir ailleurs. La psy que je consultais à l'époque a expliqué son comportement par un supposé besoin de reconquérir sa virilité suite aux difficultés rencontrées dans sa quête de paternité. Moi je ne voulais rien savoir. J'avais l'intention de le quitter. Nous étions d'ailleurs sur le point de nous séparer quand il s'est produit un miracle. Ce miracle, ça a été toi. Alors qu'on ne l'espérait plus, je suis tombée de nouveau enceinte et cette fois j'ai pu mener ma grossesse à son terme. On a pris cette chance qui nous était donnée comme un signe du destin que nous devions rester ensemble. On était si heureux de ta naissance. Alors on a fait comme si nos problèmes n'existaient plus. Robert m'a une nouvelle fois juré fidélité et moi je l'ai cru, aveuglée par mon désir de maintenir coûte que coûte l'unité de notre famille. Mais voilà, un jour où j'étais allée faire quelques courses en ville, je l'ai surpris bras dessus, bras dessous, avec une autre femme. J'ai ainsi compris qu'il n'avait jamais cessé de me tromper. J'étais hors de moi. On a eu une violente dispute et dans un élan de fureur je lui ai avoué que moi aussi je l'avais trompé.

Juste un mec bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant