CHAPITRE 92

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- Tu crois qu'elle va ressembler à quoi la formation ?

Allongée sur le petit lit inférieur dans une chambre d'appoint du bureau de recrutement de l'armée, Tonie cilla lentement en entendant la voix de sa future coéquipière qui gigotait brièvement sur le lit supérieur, avant de hausser une épaule indifférente en fixant le panneau qui la surplombait et qui était maculé de messages gravés par d'anciennes nouvelles recrues qui étaient passées dans cette pièce.

- De la sueur et des cris. Elle répondit enfin en tendant une main pour attraper un crayon qui traînait sur le bureau à sa gauche.

Rosie gloussa en entendant la répartie de la jeune femme, et elle soupira doucement en fixant encore quelques secondes le plafond, avant de se redresser pour se pencher par dessus le bord de son matelas quand elle entendit sa collègue gratter dans le bois sous son dos.

- Qu'est-ce que tu fais ? Elle demanda, ses longs cheveux ébène coiffés en une multitude de tresses fines tombant devant ses iris rieurs.

- On reviendra probablement jamais ici. Éluda Tonie d'un haussement d'épaule, en se concentrant sur ses initiales. Alors, je laisse ma marque pour ceux qui nous suivront. Elle ajouta en tournant un visage amusé vers la jolie métisse. Tu veux essayer ?

- Carrément ! Scanda Rosie en se redressant, avant de descendre de son lit pour venir s'allonger à côté de la blondinette.

Tonie lui tendit son stylo pour qu'elle grave ses initiales, observant son travail d'un regard absent tandis que son esprit recommençait à divaguer. Pendant plusieurs minutes, on n'entendit que le grattement de la pointe du crayon s'enfoncer légèrement dans le bois.

- Eh, Tonie ? Reprit Rosie après un long silence, en observant leurs initiales inscrites côte à côte.

- Ouais ?

- Qu'est-ce qui t'a poussé à t'inscrire ?

La blondinette réfléchit un instant à la question de son amie en mordillant sa lèvre inférieure, ses prunelles grises lisant sans les voir les nombreux messages anciens qui courraient sur le panneau. Elle se remémora le diagnostique de son médecin, qui lui avait annoncé qu'elle ne pourrait probablement jamais avoir d'enfant. Le regard abattu de son fiancé quand elle lui avait appris, quelques jours plus tôt, qu'elle rompait leurs fiançailles. Le visage de son principal, au moment où elle était venu lui dire qu'elle arrêtait ses études de droit.

- J'avais juste besoin.. de passer à autre chose. Elle répondit enfin dans un murmure.

Rosie hocha lentement la tête sans rien dire, ne voulant pas pousser sa curiosité trop loin, et elle pinça les lèvres en rêvant aux jours qui se profilaient devant elles, tandis que Tonie restait silencieuse à fixer ses initiales.

-

Son arc relevé à mi-hauteur entre ses mains, Tonie lança un regard sur sa droite pour surveiller les quelques rôdeurs matinaux qui erraient sur le trottoir d'en face en continuant de longer le mur du parking souterrain à sa gauche, suivant Daryl qui ouvrait la marche d'un pas furtif, alors que les rayons dorés du soleil de début de journée - témoin insensible de la déchéance de la civilisation - inondaient par endroit les bâtiments silencieux et les débris qui jonchaient le sol.

Ils s'arrêtèrent à l'intersection de Fairlie Street, lançant un regard vers le carrefour où un groupe d'une quinzaine de Macchabées titubaient bêtement en rond en grognant de concert, et Tonie fit un léger signe de tête à l'attention du Redneck pour lui désigner un immeuble qui se dressait de l'autre côté de l'avenue. Le garçon jaugea la hauteur d'un rapide coup d'oeil, avant d'arrêter son regard sur une passerelle qui enjambait la route adjacente et qui reliait le bâtiment à celui contre lequel ils étaient accolés.

Sua SponteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant