CHAPITRE 166

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Il aimait ces matinées tranquilles. Silencieuses. Ces battements de calme qui s'étiraient entre le réveil et le moment où il poserait sa main sur la poignée de la porte de sa chambre. Ce moment où il remettrait sa veste sur ses épaules et le rôle qui allait avec.

Il pouvait se délester de Lucille, la laisser se reposer, posée à la verticale contre le bras de son fauteuil.

Juste là, pendant ces quelques minutes où il n'avait pas à prétendre, à jouer, à se forcer, il pouvait laisser son esprit le ramener là où il le souhaitait. Profiter du soleil matinal qui entrait à flot par la grande fenêtre à sa gauche et qui réchauffait son visage. Savourer quelques gorgées de café. Réfléchir tranquillement à la façon dont il voulait que sa journée se déroule. Le calme... Le silence...

— Negan !!

Ouaip, il avait fait une connerie en la ramenant derrière ses murs...

Installé dans un des larges fauteuils du coin salon, Negan ferma un instant les yeux en sentant sa sérénité se dissiper aussi rapidement qu'une bougie qu'on souffle, ses lèvres pincées laissant échapper un soupir las alors qu'il entendait des claquements de talons furieux résonner dans le couloir et s'approcher de sa chambre.

Moins de cinq secondes plus tard, la porte s'ouvrait à la volée sur la silhouette farouche de Tonie, habillée d'un débardeur noir qui découvrait ses bras tatoués et d'un pantalon cargo kaki.

— C'est quoi ce bordel ?! elle cracha entre ses dents serrées, ses iris gris l'épinglant sur place.

Son visage était crispé sous la colère qui faisait vibrer son regard étonnant, ses cheveux d'un blanc immaculé avalant la lumière pâle et vive qui plongeait sur ses traits fins depuis la fenêtre. Nom de Dieu, elle était vraiment flippante quand elle s'y mettait... Un genre de mi-ange, mi-guerrière sanguinaire qui peut vous arracher la tête à mains nues.

Il avait presque du mal à reconnaître que c'était la même personne avec qui il avait discuté la veille au soir. Toute cette fragilité contenue qu'elle avait laissé entrevoir s'était évaporée en même temps que les dernières heures de la nuit. La seule chose qui restait de cette parenthèse c'étaient les cernes sous ses yeux, profondes et sombres—comme une fatigue latente qu'elle subissait à chaque seconde.

— Et bonjour à toi aussi, Tonie, il lâcha en affichant un sourire innocent.

Tonie fronça un peu plus les sourcils, les poings sur les hanches, l'éclat doré dans son iris gauche scintillant sous un rayon de lumière alors qu'on entendait de nouveaux pas pressés résonner depuis le couloir.

Negan leva une main apaisante quand deux de ses hommes arrivèrent sur le pas de la porte, le visage rouge et la respiration essoufflée d'avoir couru après la Ranger pour l'empêcher de déranger leur chef—sans grand succès, évidemment. C'était à se demander pourquoi il perdait son temps à la faire surveiller, vu qu'elle semblait prendre un malin plaisir à échapper à leurs regards.

— Laissez-nous, ordonna calmement Negan à ses hommes.

Les deux types échangèrent un regard en coin confus, mais ils se retirèrent sans faire d'histoire, refermant la porte après eux. Tonie leur lança à peine un regard avant de reporter son intérêt sur son ennemi.

Negan garda un visage impassible, le sourire innocent et le regard goguenard, juste ce qu'il fallait, alors qu'elle le fixait avec une intensité qui lui fit penser qu'elle était probablement en train de se demander s'il elle ne ferait pas mieux de lui enfoncer son poing dans la tronche une bonne fois pour toutes.

Finalement, Tonie redressa légèrement le menton, inspirant longuement par le nez.

— J'ai fais une rencontre étonnante ce matin, elle déclara d'une voix calme, malgré que la fin de ses mots était presque mangée par la colère qui continuait de bouillir contre son palais. Tu as eu une longue journée, hier, apparemment.

Sua SponteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant