CHAPITRE 175

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— Je leur ai donné un jour de plus pour nous livrer le melon manquant.

La voix de Gavin résonna dans la salle de réunion attentive, oscillant entre l'agacement latent et quelque chose qui ressemblait à de l'impuissance. Les bras croisés contre sa poitrine, Tonie lui lança un regard par-dessus la table alors qu'il passait une main fatiguée dans ses cheveux bouclés.

— On y retourne demain matin avec les gars, continua Gavin.

La lumière de fin d'après-midi entrait faiblement par la grande fenêtre dans le dos de Negan—une lumière terne et pâle qui donnait mal au crâne à la Ranger.

Elle n'avait pas fermé l'oeil de la nuit, trop occupée à purger son âme dans la cuvette des toilettes. Sa gorge était encore sensible de l'attaque de Simon, sa trachée irritée et sa nuque rigide. Les bleus qui entouraient son cou ressemblaient à un collier morbide—renforçaient son teint pâle et le blanc anormal de ses cheveux.

Mais elle s'en fichait.

Elle était bien trop occupée à se ressasser jusqu'à l'étourdissement ce que sa némésis lui avait confié la veille au soir. À digérer ces paroles, ces souvenirs qu'il lui avait confié. À combattre la petite voix qui s'était réveillée en elle et qui lui proposait de réévaluer son jugement.

— Ezekiel a toujours été réglo, déclara la voix grave de Negan, installé à sa place en bout de table.

Tonie releva la tête, clignant des yeux pour s'extirper de sa réflexion lancinante. Elle observa cette longue silhouette nonchalamment installée dans son fauteuil. La façon dont ses jambes étaient étendues sur le bord de la table, les chevilles croisées, et ses coudes plantés dans les accoudoirs.

Lucille était là, elle aussi. Posée sur la table, ses pointes meurtrières à la vue de tous. Tonie pouvait presque voir le sang—invisible—de ses victimes passées s'étendre sur cette longue table.

— C'est surtout Richard qui pose problème, dernièrement, déclara Gavin.

Tonie tourna la tête, son regard glissant jusqu'à la chaise vide à gauche de Gavin. La chaise de Dwight.

Negan l'avait libéré de sa cellule en début de journée pour qu'il parte à la recherche de Sherry. Évidemment, il ne trouverait rien. Tonie avait eu la confirmation, un peu avant le lever du soleil, que la brunette était bel et bien loin de cet endroit.

Un simple message sur biper—un biper qu'elle avait déniché avec son double quelques jours plus tôt dans un bureau inutilisé d'un des bâtiments secondaires, au cours d'une de ses explorations, et qu'elle avait réparé sur ses temps libres.

1511. La quinzième et la onzième lettre de l'alphabet. OK. Juste ça. Le code qu'elles avaient convenu si Sherry s'en sortait.

Tonie s'était débarrassée du biper aussitôt après avoir reçu le code.

La Ranger était obligée d'avouer qu'elle ressentait une certaine fierté d'avoir réussi cette évasion au nez et à la barbe de tout ce beau monde qui se croyait invulnérable. Une fierté devant ces visages déconfits et dubitatifs et ces conversations à mi-voix glanées au détour des couloirs—des conversations qui se demandaient tous "comment?".

— Alors, c'était lui qu'il fallait sanctionner.

Laura, cette fois.


Tonie cligna encore des yeux, peinant à rester dans la discussion.

— Jared a... dévié au dernier moment, expliqua Gavin en retenant un soupir.

Tonie l'observa alors qu'il pinçait les lèvres, comme s'il semblait ennuyé de cette information. De ce que son cerveau avait difficilement enregistré jusqu'ici, le Royaume ne s'était pas acquitté de leur livraison du matin—une histoire d'un melon manquant—et un des représentant d'Ezekiel (Richard, donc) semblait rechigner à ces visites hebdomadaires depuis quelques temps.

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