Sua Sponte

CHAPITRE 93

- Trois balles. Déclara Tonie en vérifiant le chargeur de son Beretta, tout en suivant Daryl qui marchait rapidement devant elle en traversant l'étage en construction de l'immeuble dans lequel ils se trouvaient. On est en plein milieu de la ville et il était en train de voler nos armes. Elle ajouta d'une voix hachée par la frustration, en lançant un regard absent sur sa gauche.

Elle ramena son attention sur la nuque de son archer qui restait silencieux devant elle, avant de pincer les lèvres alors qu'il tournait sur sa droite pour rejoindre une porte de service.

- Tu croyais que j'allais le tuer ? Elle reprit, incapable de contrôler sa colère. Je visais sa jambe. Est-ce que ça aurait pu le tuer ? Peut-être, j'en sais rien. Mais il était en train de nous voler. Elle ajouta, alors qu'ils arrivaient devant la porte.

- C'est juste un foutu gamin. Rétorqua Daryl de sa voix rauque en appuyant sur la poignée verrouillée, avant d'attraper son couteau pour essayer de forcer la serrure.

- Un foutu gamin qui a prit nos armes ! Tu sais ce qui passe quand on se retrouve à poil ? Elle balança en se remettant à faire les cent pas derrière le garçon qui continuait de forcer la serrure avec son couteau. On se fait buter par ceux qui ont eu l'intelligence de protéger leurs munitions ! Et dans ce monde, ça risque pas de prendre longtemps avant que ça nous retombe sur le coin de la gueule ! C'est pas parce que t'as soudainement choisi d'adopter ton mantra de bouddhiste que le monde va se transformer en un foutu camp de bisounours !

- J'ai pas dit ça ! Répliqua l'archer en se tournant vers elle pour la fusiller de ses prunelles sombres. Mais c'est pas une raison pour buter tous ceux qui croisent notre route ! T'as vu ce gosse ?! Il était terrifié ! Et toi, t'allais lui tirer dessus sans réfléchir !

- J'allais lui tirer dessus parce que c'est comme ça que ça marche maintenant ! Elle explosa en se postant devant lui, braquant ses iris à l'éclat doré dans le regard furieux du Redneck qui respirait rapidement. Tu tue, ou tu te fait tuer. C'est aussi simple que ça. Elle reprit d'une voix grave. Tu baisses ta garde une seconde, et un connard comme le Gouverneur se pointe devant ta porte pour te rappeler à l'ordre. T'as déjà oublié ?

- Non, j'ai pas oublié ! Il hurla de toute la puissance de sa voix enrouée par un sanglot violent, alors que Tonie cillait plusieurs fois face à sa réaction. Bordel, j'ai pas passé une seule journée depuis qu'on a quitté la prison sans repenser à ce qui s'est passé ! Tu crois que t'es la seule à t'en vouloir pour ça ? Il lâcha en balançant un bras furieux en l'air.

- À ton avis, pourquoi je les aient tous achevés au Terminus !?

- C'est exactement ce que je dis ! Si je t'avais pas lâché ce jour-là, si j'avais pas joué au con, t'aurais jamais eu à traverser tout ça toute seule !

Tonie entrouvrit lentement les lèvres face à la confession de son amant, troublée par les larmes qu'elle voyait s'accumuler au bord de ses paupières alors qu'il arpentait le sol de sa démarche nerveuse.

- Parce que tu crois que ça aurait été différent ? Tu crois que j'aurais été différente aujourd'hui ? Elle reprit en sifflant sa réplique entre ses dents. Qu'on ait été ensemble ou pas, ça n'aurait rien changé, Daryl ! Si c'est ce que tu crois, alors c'est que tu me connais mal ! Parce que la personne que tu vois devant toi, c'est exactement la même que j'étais quand j'ai signé pour entrer dans l'armée !

- Non, c'est faux et tu le sais très bien ! Il rétorqua violemment. T'es pas juste une machine de guerre, Tonie ! Et je sais que t'as besoin de personne pour te sauver, mais tu peux pas renier le fait que t'es complètement flippée depuis que t'as perdu ta fille !

La jeune femme fit un pas en arrière face à la brutalité des mots employés par l'archer, le souvenir de Rosie revenant hanter sa rétine avec agressivité alors qu'un sanglot humide venait s'enrouler autour de son palpitant effréné.