CHAPITRE 169

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— Voilà à quoi ressemble la vie, ici. Tous les jours, au quotidien.

Daryl lança un regard autour de lui, considérant la vie qui se déroulait tranquillement derrière les murs du Royaume. La lumière d'une nouvelle journée qui commençait caressait de ses rayons encore pâles les membres de la garde qui faisaient leur course matinale, le linge propre qui était étendu sur des fils accrochés entre deux bâtiments, les potagers verdoyants... Il finit par reporter son attention sur Ezekiel, debout devant eux. Le « roi » avait le regard perdu sur un petit groupe d'enfants — la plupart estropiés d'un membre — qui s'entraînaient à tirer à l'arc sur de grandes cibles clouées à des bottes de foin.

— Mais ça n'a pas été sans en payer le prix, reprit Ezekiel en se tournant vers eux, son sceptre dans les mains.

Il avait le visage grave, presque peiné, et Daryl su immédiatement que leur proposition—malgré toutes les belles paroles et histoires larmoyantes de Rick—était tombée à l'eau.

— Et j'en voulais plus, continua Ezekiel en s'approchant d'eux. Je voulais qu'on s'agrandisse. Créer d'autres endroits comme celui-ci.


Il lança un regard à la ronde, arrêtant son intérêt sur Rick.

— Des hommes et des femmes ont été estropiés, il déclara d'un ton grave. Des enfants ont perdu leurs parents. Parce que je les aient envoyé se battre contre les décharnés quand je n'en avais pas besoin.

— C'est différent, cette fois, rétorqua calmement Rick, en s'approchant d'Ezekiel.

— Non.

— Ça l'est, insista doucement le shérif. Les morts ne nous contrôlent pas. Le monde ne ressemble pas à ça derrière vos murs. Tout le monde n'a pas la belle vie comme vous. Certains n'ont même rien du tout.

— Je dois m'inquiéter de mon peuple, rappela tristement Ezekiel.

Rick secoua brièvement la tête, ravalant un soupir d'agacement, avant de lancer un regard déçu à Ezekiel.

— Vous vous faite appeler « roi », ne put s'empêcher de soulever Daryl, sa voix rocailleuse claquant l'air tiède du début de journée alors que Rick esquissait quelques pas frustrés sur le goudron. Vous agissez clairement pas comme tel.

Il en avait sa claque d'attendre. D'espérer. De repousser l'inévitable. Il voulait prendre les armes et aller toquer à la porte de ces Saviors. Réclamer sa femme haut et fort. Mettre à terre tous ceux qui avaient pris part à leur descente aux enfers. Plus les minutes passaient, plus les jours défilaient, et plus ce besoin de revanche devenait viscéral—devenait une part entière de lui.

— Tout ceci... reprit Ezekiel avec gravité, en s'avançant vers Daryl, est venu à un prix. C'étaient des vies, il continua, avant de pointer les enfants qui s'entraînent au tir à l'arc. Des bras, des jambes.

Daryl soutint son regard, refusant de comprendre son opinion, refusant de voir autre chose que l'idée claire et précise que lui avait en tête. Évidemment qu'il comprenait, au fond, le point de vue d'Ezekiel. Mais il voyait aussi que cette paix que le roi chérissait tant était toute relative—tout comme la leur. Un chateau de cartes prêt à être soufflé au moindre coup de vent. Ils vivaient tous sur un compromis. Leur routine, leur quotidien baigné de calme et de paisibilité, n'était en fait que le choix des Saviors. Ces derniers étaient arrivé, avaient posé leurs règles, et voilà.

Ezekiel se détourna de lui après un dernier regard, s'avançant vers Rick.

— La paix que nous avons avec les Saviors n'est pas facile, mais c'est toujours la paix. Je dois me raccrocher à ça, il expliqua, alors que Rick changeait de jambe d'appui en hochant la tête à contrecoeur. Je dois essayer.

Sua SponteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant