Sua Sponte

CHAPITRE 88

Une frange de sueur poisseuse roulant sur son front maculé de sang, Tonie traversa à toute allure le toit sur lequel elle était en enfilant la lanière de son sniper autour de son buste, fuyant les balles qui pleuvaient dans sa direction, avant de se jeter dans les airs en prenant un maximum d'élan.

Avec l'impression de vivre le moment au ralenti, la jeune femme baissa ses prunelles grises sur la ruelle qui s'ouvrait quinze mètres sous ses pieds où un groupe de rôdeurs titubaient en grognant de concert, avant qu'elle ne sente ses pieds retomber brutalement sur le toit du bâtiment voisin, et elle se pencha en avant en roulant sur elle-même pour amortir sa chute, avant de récupérer son fusil et de se relever dans la foulée.

La Ranger tourna sur elle-même en ouvrant le feu sur l'homme qui la visait à vingt mètres sur un toit voisin, l'abattant facilement, avant de se remettre à courir sous le soleil brûlant du milieu de journée pour rejoindre l'échelle accolée au mur ouest. Elle tira encore une fois sur une autre silhouette mouvante qui la gardait dans son viseur sur sa gauche, et elle agrippa le premier barreau de l'échelle pour descendre le plus vite possible, ses iris affutés surveillant les mouvements en contrebas, avant de s'arrêter à hauteur d'une fenêtre poussiéreuse qui donnait sur une salle illuminée par une multitude de bougies, positionnée à environ cinq mètres du sol. Tonie lança un nouveau regard vers les nombreux Macchabées qui déambulaient quelques mètres plus bas, avant de relever son sniper qu'elle gardait dans sa main pour tirer sur la vitre crasseuse. Le verre se brisa en mille morceaux sous l'impact puissant, et elle posa son pied droit sur le rebord en jetant un coup d'oeil à l'intérieur, avant de passer rapidement par l'ouverture quand de nouvelles balles sifflèrent à ses oreilles.

Elle se réceptionna facilement au sol, et elle releva aussitôt son arme devant elle en observant les alentours, le bruit de ses pas lents et attentifs résonnant doucement contre les murs hauts alors que les fusillades continuaient de résonner au-dehors. Tournant la tête à droite et à gauche, la militaire s'avança précautionneusement à travers la salle en regardant les bougies innombrables, fronçant les sourcils face aux petites flammes orangées qui vacillaient sous les minces sifflets de vent qui s'infiltraient à travers les murs.

À défaut d'une simple salle, la grande pièce ressemblait plutôt à un endroit de prières, en témoignaient les nombreux noms peints au sol dont certains étaient accompagnés d'objets personnels. Sur le mur à sa droite, inscrit en lettres géantes, était affiché le mantra des habitants du Terminus, comme un rappel à l'ordre de leur passé qui semblait les avoir complètement déconnecté de la nouvelle réalité. « Plus jamais. Plus confiance. Nous en premier, toujours ».

Tonie crispa doucement la mâchoire en lisant le message placardé en lettres noires tout en continuant de traverser la salle, avant que le cliquetis d'une arme qu'on actionne ne résonne dans son dos, l'immobilisant.

- Pose ton arme et tourne toi. Ordonna une voix tremblante de femme. Je veux voir ton visage. Elle ajouta avec haine.

Tonie serra les dents en glissant un instant ses iris à l'éclat doré sur le côté, avant de ramener son intérêt devant elle, où les râles affamés de quelques rôdeurs lui parvenaient de derrière une porte fermée située à environ cinq mètres, les ombres des cadavres agités glissant sur le sol bétonné par l'interstice du bas.

- Tout de suite ! Hurla la femme dans son dos.

La Ranger redressa lentement le menton, son visage barbouillé de sang figé dans une expression de rage alors que la respiration furieuse et apeurée de la femme cognait contre ses tympans, et elle glissa son index contre la détente de son fusil dans un geste délicat et à peine perceptible, avant de se retourner d'un coup en ouvrant le feu.