Sua Sponte

CHAPITRE 141

Debout à côté de Rick devant l'autel de la chapelle récemment rénovée, Tonie cala ses mains sur ses hanches en observant les visages graves qui leur faisaient face. La lumière grisâtre du début de soirée glissait à travers les vitraux colorés, alors que la pluie fine continuait de crépiter discrètement sur le toit. À droite et à gauche des deux leaders, assis sur une chaise, Jesus et Andy gardaient un visage solennel baissé vers le sol.

Le groupe était revenu de La Colline un peu moins d'une heure plus tôt, avec assez de vivres pour tenir un mois et une nouvelle lourde à annoncer. Il allaient à nouveau devoir se battre. Une partie des habitants avait été rassemblé dans la chapelle sans attendre, et ils attendaient à présent la suite de l'histoire, après avoir été briefés sur les dernières informations et présentés à Jesus et Andy.

— On peut travailler avec La Colline, reprit enfin Tonie, en parlant assez fort pour que tout le monde l'entende. Maggie a conclu un accord. On va avoir de la nourriture. Des oeufs, du beurre, des légumes frais...

Assit bien droit sur un banc du premier rang à côté de Daryl, le chaton de la jeune femme se lécha les babines avec impatience, sa queue touffue remuant lentement à ses pieds.

— Mais ils ne vont pas se contenter de donner tout ça sans rien demander en retour, reprit Tonie avec gravité. Ces Saviors... Ils ont presque tué Daryl, Sasha et Abraham sur la route. Tôt ou tard, ils nous trouverons, comme ces Wolves l'ont fait. Comme Jesus l'a fait, elle ajouta, en désignant le garçon d'un léger mouvement de main. Ils tueront quelqu'un ou plusieurs d'entre nous. Et ensuite, ils essaieront de nous soustraire à leurs lois. Et on essaierait de les en empêcher. Mais d'ici là, dans ce genre de combat, en ayant le ventre vide, on pourrait perdre.

— C'est la seule façon d'être sûrs, aussi sûrs qu'on puisse l'être, de pouvoir gagner, enchaîna Rick, à droite de la Ranger. Et il faut qu'on gagne. On le fait pour La Colline, c'est vrai. Mais c'est comme ça qu'on garde cet endroit. C'est comme ça qu'on nourri cet endroit.

— Ça doit être une décision de groupe, reprit Tonie, en croisant les bras sur sa poitrine. Si quelqu'un a une objection, c'est le moment de s'exprimer.

Un nouveau silence lourd et gluant s'étira à la suite du discours des deux leaders, assombrissant un peu plus les visages solennels. Il y eut quelques regards en coin, comme si chacun tentait de jauger les réactions de l'autre, jusqu'à ce qu'un léger craquement ne se fasse entendre dans le fond de la nef, faisant se retourner toutes les têtes.

Tonie observa Morgan se lever lentement et fixer un instant le sol, comme s'il cherchait la meilleure façon de délivrer son avis, avant qu'il ne relève la tête vers eux en prenant la parole de sa voix posée.

— Vous êtes sûrs qu'on peut le faire ? il demanda, avant de lancer un regard en biais au reste de la communauté. On peut les battre ? il ajouta, en reportant son attention sur Rick et Tonie.

— Ce que ce groupe a fait, déclara calmement Rick, ce qu'on a appris, ce qu'on est devenu, chacun d'entre nous... Oui, il affirma sans une once d'hésitation, en croisant le regard de la militaire qui opinait du chef. On en est sûrs.

— Alors, tout ce qu'on a à faire, c'est de leur dire ça, reprit Morgan.

— Ils ne font pas de compromis, temporisa Tonie.

— Ce n'est pas un compromis, enchaina aussitôt le maître zen.

Il changea de jambe d'appui dans un mélange d'impatience, d'inquiétude nerveuse et d'agacement.

— C'est un choix que vous leur donnez. C'est une porte de sortie, pour eux comme pour nous.

— Si on essaie de parler aux Saviors, on perd notre avantage et notre sécurité, argumenta Rick, son bras gauche appuyant ses paroles. Non, il faut qu'on s'attaque à eux avant qu'ils ne s'attaquent à nous. On peut pas les laisser vivre.