CHAPITRE 118

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— Pourquoi il lui a donné une seconde chance ?

La question de Tonie s'éleva doucement dans l'air encore tiède de la fin de soirée. Installée à côté de la Ranger qui tenait une Judith endormie dans ses bras, Maggie releva un visage interrogateur vers son amie qui observait Glenn, qui plaisantait avec Carol et Rosita de l'autre côté de la grande table. L'étincelle dorée dans son iris pétilla un instant quand il rencontra la lueur d'une des bougies posées sur la table.

— Nicholas, reprit Tonie.

Elle sentit ses mâchoires se contracter d'elles-mêmes, comme si elles trouvaient que le prénom du garçon n'avait rien à faire dans sa bouche.

— Tu connais Glenn, finit par répondre l'aînée Greene en lançant un regard amoureux vers le Coréen. Il sauve les gens. Même les gens comme Nicholas. C'est ce qu'il est. Je pouvais pas l'accepter non plus, elle ajouta après un silence. Et puis j'ai repensé à Tara, et comment on était chacune de chaque côté de ce grillage, le pire jour de ma vie.

Tonie pinça doucement les lèvres en observant le profil de Maggie, le souvenir douloureux du visage décapité d'Hershel brûlant ses rétines.

— Et aussi quand vous avez débarqué à la ferme, continua son amie de sa voix douce. Je sais pas si tu t'en rappelles, mais on était loin d'être les meilleurs amis du monde à ce moment-là.

— C'est vrai, reconnut Tonie dans un sourire.

— Et pourtant, toi, Daryl, Tara et toutes ces personnes, reprit Maggie en englobant leur groupe d'un regard protecteur, vous êtes pour moi les personnes les plus importantes au monde aujourd'hui. Les choses peuvent s'arranger, elle ajouta, alors que Tonie plissait le front en relevant ses iris gris vers elle. On peut arranger les choses.

La Ranger approuva d'un faible hochement de tête, son regard hypnotique se baladant sur les traits délicats de son amie qui lui offrait un sourire. Les multiples conversations qu'elle avait eu dans la soirée ne cessaient de se confronter les unes aux autres sous sa boîte crânienne, certaines arguant qu'il fallait privilégier la méfiance perpétuelle tandis que d'autres se ralliaient aux paroles d'apaisement de Michonne, Glenn ou Maggie.

Alexandria était un endroit béni pour sa famille. Ils pouvaient enfin dormir à l'abri du monde extérieur et espérer avoir un futur décent, qui ne serait pas seulement constitué d'un perpétuel regard méfiant par-dessus l'épaule. Mais Tonie savait aussi que l'ignorance des habitants de la communauté envers ce nouveau monde effrayant pouvait à tout moment jouer contre eux et tout faire basculer. En fait, une partie d'elle était furieuse de voir que certains avaient pu tranquillement vivre jusqu'à présent sans passer par tout ce qu'elle et sa famille avaient vécu. Comme si le manque d'expérience  était un affront direct aux parts de sombreur qui vivaient en elle. Encore plus pour quelqu'un comme la Ranger, qui avait déjà connu la guerre avant tout ça. Une fois les problèmes énoncés, l'équation restait simple. C'était sa famille avant tout le monde. Toujours. Et peu importe le prix. C'était ancré dans son ADN, tatoué sur sa peau, ravalé mille fois.

Un petit gémissement de Judith la ramena à l'instant présent alors que la fillette se réveillait brièvement entre ses bras, et elle lui caressa tendrement le dos en déposant un baiser sur son front, reprenant la parole dans un murmure.

— Oui, ma puce, il est temps d'aller au lit.

Elle lança un regard en coin à Maggie qui observait la petite fille d'un regard brillant de plusieurs émotions, et elle retroussa le coin de ses lèvres. Elle connaissait ce regard.

Sua SponteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant