Il était à peine dix heures quand Carl se planta devant la maison trop silencieuse de Tonie et Daryl. Les rayons du soleil étaient blancs et vifs, et auréolaient déjà Alexandria d'une chaleur lourde malgré l'hiver qui continuait d'étendre sa cape sur la région. Un énième paradoxe du monde étrange dans lequel ils évoluaient tous.
L'adolescent lança un regard absent au chaton qui se frottait contre ses chevilles, attardant son attention sur la queue baissée dans un signe de tristesse latente. L'animal émit un petit miaulement mélancolique, et Carl lâcha un soupir entre ses lèvres.
— Je sais... il marmonna en se remettant en mouvement.
Il contourna la petite maison par la droite pour rejoindre le garage, dont la porte était légèrement entrouverte sur quelques centimètres. Il agrippa la poignée et remonta le volet roulant, balançant son regard sur la pièce baignée de lumière matinale. La moto de Tonie était garée sur la gauche, ses éléments mécaniques luisant dans le soleil ascendant. Un espace vide détonait étrangement à côté de la bécane, là où la moto de Daryl aurait dû se trouver. Le sac de frappe de la jeune femme, accroché au plafond sur la droite, lui semblait beaucoup trop immobile à son goût.
Cinq jours avaient passé depuis cette nuit en Enfer. Cinq jours depuis que Abraham, puis Glenn, avaient été brutalement mis à mort. Cinq jours depuis qu'ils s'étaient séparés de Daryl, Maggie et Sasha, qui s'étaient rendus à La Colline avec les corps de leurs deux amis. Cinq jours depuis qu'il avait vu le regard de son père se briser entièrement. Cinq jours depuis qu'il contenait cette rage brûlante dans le fond de son estomac.
Carl observa le chaton renifler tous les endroits où l'odeur de ses maîtres s'attardait, avant de se diriger vers le rouleau de bandage blanc posé sur un établi. Il n'arrivait pas à comprendre. Il n'arrivait pas à comprendre comment son père n'avait pas déjà établi un plan pour secourir Tonie. Comment il n'avait pas déjà réuni tous le monde et déclaré la guerre à Negan et ses hommes. Ça le rendait dingue de le voir aussi... absent. Aussi soumis. Oui, ils avaient perdu deux des leurs. Mais c'était pas la première fois, il pensa en commençant à enrouler la bande autour de ses doigts ( il pouvait presque entendre la voix de Tonie lui dicter la bonne façon de faire ). C'était pas la première fois qu'ils devaient faire face à des tortionnaires, à des cinglés. Loin de là. Alors pourquoi est-ce que son père refusait de répliquer ?
Carl termina de protéger ses mains avec le bandage, et il retira son chapeau pour le poser sur un meuble proche, avant de se tourner vers le sac de frappe. L'élément imposant semblait le jauger avec hauteur, comme s'il attendait de voir ce qu'il avait dans le ventre. Carl sentit une nouvelle pulsion de colère soulever sa poitrine, et il balança son poing droit dans le tissu épais, ses lèvres relâchant en même temps un grognement d'effort et de frustration un peu timide. Sous l'oeil du chaton qui s'était lové au milieu d'un carré de soleil qui tombait sur le sol bétonné, il enchaîna les mouvements, répétant les exercices que Tonie lui avait appris, équilibrant sa vision encore balbutiante. Uppercut. Overcut. Jab. Cross. Encore. Crochet du droit. Crochet du gauche. Jab. Overcut. Encore.
Chaque coups porté contre le sac de frappe assouplissait la laisse qui retenait sa colère, faisait rebondir contre sa rétine chaque passage ignoble de cette nuit glaciale. Bientôt, ses expirations devinrent plus féroces, plus impatientes, à mesure que son visage et que son corps se couvraient d'une sueur d'effort.
« Leçon numéro trois. Même si ton adversaire fait deux fois ton poids et ta taille, tu peux quand même le battre. »
C'est pas parce que Negan avait les hommes et les moyens qu'il était invincible. Personne ne l'était.
« J'ai pas l'intention de me laisser intimider par ces types. Tout ce qu'ils ont réussi à faire c'est de me mettre un peu plus en rogne contre eux et, crois-moi, c'est pas quelque chose qu'ils ont envie de voir. »
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Sua Sponte
Fanfiction"Son coeur battant à cent à l'heure, Tonie continuait de fixer Glenn et le Shérif qui avançaient lentement, observant avec inquiétude les corps décharnés qui se retournaient de plus en plus à leur passage à mesure que la pluie les nettoyait de l'ode...