Sua Sponte

CHAPITRE 76

- D'abord je dis un truc que j'ai jamais fait. Et si toi tu l'as déjà fait, tu dois boire. Si tu l'as jamais fait, c'est moi qui bois. Et après on inverse. Tu connais vraiment pas ce jeu ?

Adossé contre un fauteuil poussiéreux à même le sol de la cabane dans laquelle ils avaient élu domicile depuis environ une demi heure - endroit qu'il avait remarqué quelques semaines plus tôt pendant une excursion avec Michonne - Daryl soupira doucement en regarda Beth qui lui faisait face, un coude posé sur sa jambe repliée et sa main triturant distraitement sa lèvre inférieure.

Après avoir passé la nuit entière à rester éveillés pour surveiller la horde qui était passée sur la route depuis leur cachette dans le coffre de la Lincoln, les deux amis s'étaient remis en route à travers les bois, jusqu'à ce que la cadette Greene ne soulève la demande improbable de vouloir boire un verre d'alcool.

Ils avaient échangé quelques phrases houleuses avant que le Redneck ne finisse par céder à contre coeur, repris leur marche sous un ciel gris et une chaleur plus clémente, avant de tomber sur un club de golf planté au milieu de nulle part où la jeune femme avait fini par se mettre à pleurer face à la bouteille de Schnaps qu'elle avait trouvé au bar. Complètement sur les nerfs depuis leur départ de la prison, Daryl avait finit par faire voltiger la bouteille à travers la pièce en décrétant que le premier verre de Beth ne serait certainement pas du Schnaps à la pêche, et il l'avait conduit jusqu'au cabanon, où le garçon savait qu'il contenait une caisse entière remplie d'alcool frelaté.

A présent la cadette Greene s'était mise en tête de passer le temps autour d'un verre, amenant dans la foulée l'idée du je n'ai jamais, vu qu'ils ne pouvaient pas s'aventurer dehors à moins de deux heures de la tombée de la nuit.

Pour être honnête Daryl ne savait pas vraiment quoi faire face au trop plein d'émotions adolescentes de la jeune fille. Pendant que lui ne voulait que se perdre entièrement en se retranchant dans un silence endeuillé, elle continuait à persister sur le fait qu'il fallait continuer à avancer, l'entrainant malgré lui dans ses demandes les plus improbables, le forçant à faire la conversation, à devoir ressentir quelque chose, bref, tout ce qu'il ne voulait pas. A partir du moment où il avait perdu Tonie plus rien n'avait d'importance. Il préférait se flageller mentalement.

- J'ai jamais eu besoin d'un jeu pour m'allumer la tronche. Il répondit enfin dans un grognement.

- Attends, t'as commencé ? Elle demanda, assise face à lui derrière la petite table basse de fortune.

- Comment tu connais ce jeu ?

- Mes amis y jouaient. Elle répondit en haussant une épaule. Moi je les regardais. Okay, je commence. Elle ajouta en ramenant ses jambes sous elle. Je n'ai jamais.. tiré à l'arbalète. Donc tu dois boire. Elle expliqua en relevant ses iris bleus sur l'archer.

- Tu parles d'un jeu.. Grommela Daryl en tendant la main pour attraper son bocal à moitié rempli de moonshine.

- C'était pour s'échauffer. Elle rétorqua pendant qu'il buvait une gorgée du liquide translucide. À ton tour maintenant.

- Euh.. Il réfléchit en reposant son verre, avant de ramener sa main à ses lèvres. Je sais pas. Il marmonna dans sa barbe, mal à l'aise.

Il n'avait jamais été très démonstratif, encore moins quand il fallait parler de lui. Personne ne s'était jamais intéressé à sa pauvre petite vie pathétique jusqu'à Tonie. Et Tonie n'était plus là.

- T'as qu'à dire le premier truc qui te passe par la tête. Proposa Beth en esquissant un sourire encourageant.

- Je suis jamais sorti de Géorgie. Il finit par répondre de sa voix rauque.