Chapitre 4

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Quelque chose de chaud me chatouille les paupières et m'incite à les entrouvrir légèrement. Mais la lumière du jour, trop vive, m'oblige à les refermer aussitôt en grimaçant. Il me faut un petit moment avant de me décider à les rouvrir pour découvrir que la chambre est baignée de soleil. Je me redresse doucement, levant la main devant mon visage pour créer un rempart entre mes yeux sensibles et les rayons du soleil. C'est déjà le matin visiblement. Et pourtant, j'ai l'impression d'avoir à peine fermé l'œil cette nuit. Je pousse un soupir en baissant la main et m'assois plus correctement sur le lit. J'ai mal dormi, je n'ai pas arrêté de me tourner et retourner dans mon lit pour trouver une position confortable. Faut dire que c'est pas facile de trouver le sommeil dans un endroit pareil. En-dehors de la chaleur qu'il fait dans cette petite pièce, il y a les souvenirs de la veille. Je sens mon estomac se nouer à cette pensée. La fusillade m'a fait comprendre que le quotidien dans une favela est encore pire que ce que j'avais imaginé. Je n'ai aucune envie de mettre les pieds dehors. L'idée de sortir me rend affreusement anxieuse parce que les chances de se faire violer ou tuer sont probablement au-dessus de la moyenne ici.

La cacophonie de la favela se fait déjà entendre, s'introduisant par la fenêtre et passant à travers les murs fragiles. On pourrait même entendre un rat respirer si on tend bien l'oreille. Quelle heure est-il, en fait ? J'ai l'impression qu'il est tôt, mais il y a tellement de bruit que ce ne sont peut-être pas les habitants qui sont matinaux, mais plutôt moi qui me suis réveillée tard.

Je sort du lit à contre cœur, tellement l'angoisse m'envahît et me tiraille les intestins.

Je m'oriente vers la salle de bain en grimaçant encore sous les frappes du soleil. Je fais ma petite commission et me lave les mains dans le lavabo rouillé avant d'arpenter la casa pour vérifier la présence de mon oncle, je le vois devant l'entrée, prêt à sortir.

_ tu vas où ? Demandé-je précipitamment avant qu'il ne sorte et me laisse toute seule

Il se retourne, surpris par le son de ma voix, puis un sourire étire gentiment ses lèvres en me voyant.

_ je dois aller bosser en ville, je fini en fin d'après-midi.

J'acquiesce timidement de la tête, ne sachant pas vraiment quoi dire ou faire d'autre. Il finit d'accrocher sa sacoche-banane à sa taille et ouvre la porte. Il reste un instant immobile, comme s'il hésitait, puis il pivote une nouvelle fois dans ma direction.

_ il y a un terrain à seulement quelques pas d'ici, les jeunes se regroupent l'as bas, il y a des chances que tu te fasse une amie, mais rentre avant que le soleil ne se couche. Dans les alentours de dix-sept heures, c'est préférable.

_ je ne pense pas que je sortirai aujourd'hui.

Ni demain d'ailleurs. Je ne pense pas quitter la casa avant au moins mes dix-huit ans. Et quand ce jour arrivera, ce sera pour quitter la favéla. Je m'en fait la promesse. Il hoche la tête en comprenant la raison, puis c'est suivis d'un sourire qu'il quitte la casa pour de bon. Une curieuse sensation me bouleverse. Je me retourne en soufflant bruyamment et passe mes mains sur mon visage à plusieurs reprises jusqu'à arriver dans ma chambre. Le tout premier objet qui me frappe, c'est le lit. Simple lit de sangle supportant un matelas. L'ameublement de la pièce est des plus simples : un lit et une armoire qui semble s'effondrer d'un instant à l'autre.

Je m'agenouille près de ma valise violette et je la fais basculer doucement sur le côté pour l'ouvrir. Mes doigts cherchent dans le fouillis jusqu'à trouver ma trousse de toilette, des sous-vêtements et une tenue qui ira avec la température qu'il fait aujourd'hui. Je les attrape un par un avant de me redresser en serrant mes affaires contre moi pour aller dans la salle de bains. Je dépose le tout sur la vieille machine à laver et me déshabille, avant de m'engouffrer sous la douche.

PRATA O PLOMO T.1 & 2 [ En cours d'édition chez AMZ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant