Chapitre 21

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Nue devant le miroir de la salle de bains, je repousse mes cheveux humides derrière mon épaule, tout doucement pour ne pas réveiller la douleur de ma blessure qui saigne toujours. Et je regarde ce que me renvoie mon reflet avec la gorge douloureusement comprimée. Mes paupières enflés s'écarquillent alors que mes yeux rouges et irrités ne se détachent de ma clavicule meurtrie. J'ai envie de vomir face à ce que je vois. Ma poitrine se compresse si fort que ça me noue l'estomac, et il me faut me pincer les lèvres de toutes mes forces pour retenir mes larmes. Quelle horreur..

Trois points sous la forme de triangle avec un Á au milieu. Mais qu'est-ce que c'est que ça ?

Une chaleur humide envahit progressivement mes yeux face à cette vue insoutenable, je plonge sans plus tarder mon visage dans mes mains pour étouffer mes pleurs.

Qu'est-ce qui se passe dans ma vie, purée? J'ai l'impression de voir le monde différemment maintenant, un peu comme si je mettais des lunettes avec un filtre gris. Je suis détruite à petit feu. Je ne sais même pas quoi dire de plus, je suis dans le vide de mon désespoir.

Je pensais pas qu'un jour quelqu'un réussirait à me détruire mentalement comme ça. Je ne vais pas bien. J'ai atteint mes limites.

Je survis à une journée d'enfer mais je n'ai jamais l'occasion de m'en réjouir puisque la journée suivante devient elle aussi un supplice.

Je n'avais jamais été aussi stressée. Mon corps n'avait jamais été autant noyée dans la peur. J'ai été blessée un million de fois avant, mais cette année s'est accompagnée d'un niveau de douleur jamais atteint jusque-là.

J'aimerais pouvoir avancer jusqu'à un moment où les choses reprendraient enfin du sens. J'aimerais effacer cette partie de ma vie parce que je crois malgré tout qu'un jour, les choses iront mieux – c'est juste maintenant que ça ne va pas. Que ça ne va pas du tout.

Ça toque soudainement à la porte de la salle de bain, me faisant sursauter, je pose mes mains sur le lavabo.

_ minha filha tu vas bien ? Ça fais longtemps que t'es enfermé dans la salle de bain. Je m'inquiète. Lance mon oncle depuis le couloir

J'ouvre le robinet et passe un coup d'eau froide sur mon visage avant d'attraper ma serviette pour l'enrouler autour de mon corps.

_ je vais bien, j'ai finis.

Un silence s'installe, durant lequel j'enfile mes sous-vêtement et un tee-shirt large qui appartenait à mon père, puis un short blanc.

_ je t'attends pour le dîner.

Je coince une mèche de cheveux rebelle derrière mon oreille et grimace lorsque le tissu de mon tee-shirt se frotte à ma blessure.

Il n'est pas humain. Il n'a rien d'humain, c'est un monstre. Et je comprends maintenant le sens de toute ses phrase, "je n'ai rien à perdre". Bien sûr, parce que les monstres ne sont pas des monstres s'ils ont peur de quelque chose. C'est le pire des cauchemars sur terre, il n'a rien à perdre, rien...il peut faire tout ce qui lui passe par la tête, sans une once de remords, c'est ça qui le rend aussi dangereux, c'est ça qui le pousse à faire ce qu'il veut de moi, parce que les conséquences de ses actes n'ont aucune répercussions sur sa conscience. Je suis même pas sur qu'il en ai une, de conscience. Il pas de cœur.

Je finis par sortir de la salle de bain et rejoins mon oncle dans la cuisine. Il me fixe longuement tandis que je m'installe en face de lui. Je tente un sourire forcé en attrapant doucement mes cheveux pour les jeter derrière mon dos.

_ c'est quoi au menu ? Demandé-je en essayant de paraître bien

_ Moqueca de Camarao, dit-il peu convaincue de mon état

PRATA O PLOMO T.1 & 2 [ En cours d'édition chez AMZ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant