Chapitre 6

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Le trafiquant finit par revenir vers nous en replaçant son talkie-walkie dans la ceinture de son short.

_ Os olheiros a viram entrando ontem à noite, em uma van vermelha, dit-il à l'autre. ( Les guetteurs l'ont bien vue entrer hier soir, à bord d'une camionnette rouge )

Les deux trafiquants posent alors leurs regards austères sur moi. J'ai la bouche entrouverte, le souffle court, ne comprenant pas ce qu'il se passe, et le fait de ne pas comprendre augmente encore plus mon angoisse.

L'un des trafiquants avance d'un pas, j'essaie de reculer, mais le mur derrière moi me rappelle que je n'ai nulle part où aller. Je baisse instantanément la tête, les doigts tremblants, tandis que le trafiquant est si proche de moi qu'une odeur amère et herbacée avec une nuance de terre m'emplit les narines.

_ Vous allez aller au quartier général pour annoncer la présence de ta cousine, dit-il.

Il marque une pause en regardant Avani, comme s'il laissait le temps à l'information de monter dans le cerveau d'Avani. Je me demande si elle ressent la même terreur que moi à cet instant, si elle doit également lutter pour garder son calme, pour ne pas céder à la panique qui menace de la submerger.

Puis il continue en jonglant cette fois entre nous deux :

_ Si ce n'est pas fait, tu sais ce qu'il va se passer.

Avani hoche la tête.

_ On va y aller maintenant.

Le trafiquant acquiesce, et recule enfin sans nous quitter du regard. Un instant plus tard, il fait signe à l'autre trafiquant, et les deux se détournent pour rejoindre le stand de viande grillée où leur brochette les attend. Ils les prennent, l'un d'eux attrape la salière et saupoudre sa viande, tandis que le propriétaire du stand garde la tête baissée sur la préparation de sa viande, avant qu'ils s'éloignent pour de bon.

Je croise le regard du vendeur qui retourne une poignée de brochette sur le grill en essuyant la sueur sur son front avec le dos de sa main, puis je relâche mon souffle, et je me mets à respirer difficilement, en me sentant étouffer, et je pose mes paumes de mains sur le mur en appuyant mon dos dessus, tentant de reprendre maîtrise de mes jambes affaiblies par la peur. J'ai vraiment cru que c'en était fini pour moi.

_ Allez, bouge-toi, on doit aller au quartier général. Pourquoi ton oncle ne l'a pas fait ? Il sait très bien comment fonctionne la favela ! Lance-t-elle en passant une main dans ses cheveux.

Je tourne mes yeux encore écarquillés vers Avani, tentant d'assimiler ce qu'elle vient de dire, mais j'ai l'impression que mon esprit est encore anesthésié par l'adrénaline.

Tout ce que je parviens à articuler faiblement, c'est :

_ Je... Je veux rentrer, Avani...

Elle braque un regard noir sur moi, qui ne m'apporte aucun réconfort. Elle semble déterminée, mais tout aussi hantée par ce qui vient de se passer. Je ne suis pas seule dans cette confusion et cette peur. Pourtant, elle continue de me toiser, comme si la seule option était de se rendre là où les trafiquants le veulent.

_ Tu crois que t'as le choix ? Si tu n'annonces pas ton arrivée, le Cartel te prendra pour un ennemi et te tueront. Aucun étranger ne peut rester dans la favela alors arrête de faire la fragile et suis-moi avant que ça ne soit trop tard !

Mes yeux s'embuent de larmes en entendant ces paroles qui rendent mon esprit encore plus flou qu'une seconde auparavant. Je n'arrive pas à réfléchir, je n'arrive pas. Et Avani ne me laisse même pas le temps d'assimiler la situation, qu'elle s'est déjà mise à marcher. Je lance un dernier regard autour de moi, voyant le propriétaire du stand en train de me regarder en biais, le chaton à quelques pas qui s'est jeté sur ma dernière brochette de viande pour dévorer les morceaux qui y restent.

PRATA O PLOMO T.1 & 2 [ En cours d'édition chez AMZ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant