Chapitre 126

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Ángel

J'aspire une longue taffe de nicotine en laissant mon regard se perdre sur elle, serpentant tel une ombre son corps jusqu'à ses fesses. Osant lever ma main pour frôler de mes doigts, ses cuisses laiteuses et parsemé de graines de beautés. Son épiderme frissonne et elle fais un mouvement qui m'incite à retirer ma main avant qu'elle ne se réveille. Un nuage grisâtre prend forme au-dessus de son postérieur et je coince ma clope entre mes lèvres avant de me retirer du lit. Elle exige de moi de ne pas la quitter, je sais au fond de mon âme que ses mots ne seront pas désobéis. Pourtant, les vices de la vie vont corrompre cette promesse personnelle. Je le sais. Car je connais la vie. Dans de cruelles circonstances, je n'ai ni gémi ni pleuré. Meurtri par cette existence, je suis debout, bien que blessé. Ce putain de destin me nargue. Continuera de me narguer. Et ce soir, il va atteindre le paroxysme du narquois. Car ce soir on passe à l'action. Ce soir c'est brume épaisse de haine. Ce soir c'est océan de sang. Ce soir nos destin seront scellés dans les mains de Belzébuth. Ce soir, sera peut-être le dernier.

Cependant, j'ai assez de jouet en ma possession pour m'improviser joueur, pour affronter les vices de la vie en étant encore plus vicieux. J'enfile ma veste en m'orientant vers le lit, m'accroupissant à sa hauteur pour mieux contempler son visage séraphique. J'ancre chaque détail d'elle dans ma tête, pour ne jamais l'oublier. Graver son visage dans mon esprit comme du silex sur de la roche.

je t'incombe cariño. Tant que tu m'aime, je t'incomberai.

Une toile légère lancée au-dessus de l'abîme, si légère et si fine, si harmonieuse et si pacifique, que la souffrance et la mort, pour un temps, bat en retraite pour me permettre d'admirer cariño. Seul un mort sait étreindre un mort ; seule une ombre sait en embrasser une autre. De la naissance à la mort, de la mort à la naissance, nous ne cessons, par le souvenir, par le rêve, d'aller comme l'un vers l'autre, à notre propre rencontre, alors que croît en nous la distance. La mort, s'aboule à petits pas obscur pour me condamner. Et je veux pas partir les mains vides. J'emporterai son lac d'innocence dans ma tombe. J'emporterai son miel avec moi en enfer. Je l'attendrai entre les flammes. J'attendrai ses lèvres. Car elle ne cesse de faire flamber ce feu, je suis née entre les flammes mais la braise qu'elle a installé en moi, n'est autre qu'une brûlure au cœur, intense, d'un sentiment indescriptible.

Un dernier regard sur elle, aussi long qu'interminable. Car un éternel insatisfait je suis. Un éternel gourmand je fais. Un éternel accro je demeure. Avec une douleur au torse, je la quitte et me barre pour rejoindre la mort qui m'attend depuis toujours. Une fois dehors, je grimpe dans la caisse en compagnie du ciel endormis. La portière claque, le moteur gronde, je démarre en trombe, poussant directement la cinquième, le pied sur l'accélérateur qui appui comme s'il fallait écraser cette putain de pédale. J'accélère pour tuer mon destin, pour tuer ma damnation, pour me guérir de mon existence. J'accélère pour faire taire mes pensées, pour ménager ma haine, pour gérer mes pulsions meurtrière. J'accélère pour accentuer la vitesse, pour arriver plus vite, pour en finir rapidement. J'accélère.

Mais ça ne me rassasie pas. La rage continue de cette inégalité terrible, de cette disproportion effrayante dans la destinée, qui met entre ma conscience et moi un intraversable espace, un abîme, tout un monde de haines sourdes, d'envies rentrées, de vengeances futures... disproportion rendue à chaque minute plus sensible, plus rongeante, plus ravalante par les caprices de cet haines mortelles et légitimes, de désirs de meurtre, ouais putain, de meurtre, car j'exprime quelque chose de bas, d'ignoble. Nous sommes plusieurs dans moi. Dans ce plusieurs, une bavarde, par instant, prend le pouvoir avec un dégoût qui me rejette si violemment hors de l'humanité moral. Cet bavarde : c'est la haine. Je ne suis plus conscient un seul instant d'être en décalage avec la réalité. Je suis dans ma propre réalité. Une réalité constituée de sang et de plomb.

PRATA O PLOMO T.1 & 2 [ En cours d'édition chez AMZ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant