Déluge

Alia

Il est sûr de lui. Il repère l'endroit et se glisse à l'extérieur comme un chat. Je n'ai même pas le temps de l'apercevoir mais je suis certaine qu'il est déjà dans l'eau. Elle doit être glacée en cette saison mais je n'ai pas l'impression que cette question l'ait effleuré. Il s'est séparé de sa tunique, a pris de la poussière sur le sol et s'est sali le torse. Je suis restée pour le moins déconcertée.

_ La pâleur de notre peau n'est pas vraiment un bon camouflage.

Ce n'est certainement pas ce qui m'a troublée. Concentrée ! Me reprendre, c'est important, pour Cyrène. Mes yeux discernent parfaitement le garde appuyé au bastingage. La distance ne me gêne pas. Je respire à fond l'air frais de la nuit. Le sel marin chatouille mes sens. J'aime vraiment la nuit, son silence, son murmure, le ressac perpétuel sur la grève. Au loin, l'étoile de l'Atlantide lance timidement sa lumière intermittente. Assurément cette nuit est belle.

Il surgit délicatement de nulle part, comme porté par les vagues, entre mer et air, comme s'il n'avait jamais quitté l'eau. Méphistès dit d'eux qu'ils sont fils de Poséidon plus que d'Aphrodite ; sûrement de leur union, d'après moi. Je n'ai en revanche aucune difficulté à croire ce que le pirate raconte quand il affirme que les Atlantes ne nagent pas. C'est la mer qui les guide. Je commence à m'en rendre compte.

La seconde suivante, il a disparu. Le garde se tient brusquement la cheville, comme piqué par un insecte. Il n'y a plus qu'à attendre. Encore, encore... encore : vraiment robuste celui-là. Un peu, voilà : il s'effondre enfin. La prochaine fois, je doublerai les doses. Les Hyksos ont décidément une constitution résistante.