Chapitre 1 - 6

26 6 0
                                    

Quelques hommes, dont Christophe, se réunirent pour discuter de la situation. Le corps de certains des morts n'avaient pas pu être libérés. Ils n'allaient pas tarder à pourrir. Il n'était pas possible de laisser les dépouilles ainsi. L'un deux proposa, aussi horrible que ce fut, de les découper, pour les sortir par morceaux et les enterrer, et malgré le dégoût que leur inspirait cette idée, il la considérèrent longuement.

Ils auraient pu aussi brûler le train tout entier, mais il restait encore deux blessés bloqués à l'intérieur, et même s'il était probable que leur décès fut proche, il était impossible d'imaginer attendre jusqu'à là pour brûler ce qui devait l'être.

La seule solution qu'il leur restait était donc d'attendre le jour, et de tout tenter pour désincarcérer les corps proprement, aussi bien les vivants que les morts, en prenant le temps de se faire les outils nécessaires.

Ensuite... ils brûleraient ce qui devait être brûlé et ceux qu'ils ne pourraient pas enterrer.

La nuit était déjà avancée lorsque Christophe rejoignit son petit groupe. Au travers des feuillages, on pouvait admirer un ciel limpide, illuminé de milliers d'étoiles et deux lunes. La première était celle qu'il avait déjà remarquée dans l'après midi, d'une taille proche de celle dont il avait l'habitude sur terre, elle semblait un peu plus colorée, presque mauve. La seconde, beaucoup plus petite, avait un éclat plus orangé, tirant sur le roux.

Sa présence ne le choqua pas, il était déjà persuadé d'être sur un autre monde. Un petit homme vert aurait surgit qu'il n'aurait même pas été étonné.

Ou peut-être était-ce la fatigue...

Olivier était dans un coin, à demi prostré, Omar à ses côtés, épaule contre épaule. Les quatre jeunes filles ne savaient pas exactement ce qui s'était passé, si ce n'était que des fauves avaient attaqué et tué deux personnes. L'attitude des hommes les avait dissuadées de poser plus de questions. Mais le comportement habituellement ouvert de Christophe les poussa à se réunir autour de lui et à l'interroger.

Il déguisa partiellement les faits, narrant simplement le combat, sans grand détail si ce n'était qu'ils étaient totalement inexpérimentés face aux dangers qui se présentaient à eux.

Ils se tenaient tous les cinq autour d'un feu, les filles collées les unes aux autres, malgré la douceur de la température. Elles tenaient entre les mains les lances que Christophe leur avait fabriquées, et chuchotaient tout bas avec lui, pas seulement à cause de la nuit.

Christophe avait sans doute presque aussi peur qu'elles, mais c'était une peur toute intellectuelle, une appréhension face à ce sentiment aigu que leurs vies ne tenaient qu'à un fil. Il avait de la peine aussi, pour tous les morts, pour ces quatre filles qu'ils appréciaient et avait envie de protéger, et pour tous ceux qui étaient avec eux dans cette tragédie. Il y avait aussi cette jalousie qu'il n'arrivait pas à étouffer à chaque fois que son regard se portait sur ce Rachid qui tenait compagnie à Kelthoum, autour du premier feu sur sa droite, à peine à trois mètres de là. Cela donnait un étrange mélange de sentiments. Étrange mélange, étranges sentiments, étrange situation... Qu'y avait-il de normal en ces instants ?

Kelthoum et Rachid s'étaient un peu dissociés de son groupe. Ils avaient lié connaissance avec d'autres personnes pendant leur absence et étaient restés à discuter avec eux. Il s'agissait de personnes plus âgées. Kelthoum semblait bien en connaître une en particulier, une femme d'une cinquantaine d'années, complètement dépassée par les événements. Comme beaucoup du reste... Comme eux tous.

Christophe ressassait des idées sombres, à cours d'optimisme. Incessamment ses yeux revenaient vers Kelthoum. Elle non plus ne souriait pas, même lorsque Rachid tentait de la détendre avec quelques traits d'humour auxquels il ne croyait pas vraiment.

Vierge de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant