Assis sur un rocher, Christophe contemplait la vallée qu'ils venaient de quitter. Le soleil couchant allongeait les ombres des pics et striait la végétation de larges bandes sombres. La fraîcheur s'installait, parsemant les basses terres de bras de brume langoureux. Quelques rares oiseaux volaient encore, éparses silhouettes gracieuses dans un ciel sans nuage.
Tout était calme, en harmonie avec son état intérieur.
Cela faisait dix-neuf jours maintenant qu'ils avaient quitté le lieu presque idyllique où ils avaient établi leur premier campement. Leur voyage avait été au départ plus difficile que prévu. Dix jours avaient été nécessaires pour apprendre à conjuguer la recherche de nourriture et leur déplacement. Ils avaient finalement trouver des rythmes de cueillettes et de chasses qui leur permettaient de conserver une bonne allure de progression.
Suivre la rivière avait été leur première orientation, partant du principe que c'était près des cours d'eau que les populations avaient l'habitude de s'établir. L'avantage était double, puisqu'ils optimisaient ainsi leur chance de trouver des êtres humains tout en restant près d'une source d'eau potable.
Ce plan avait été relativement praticable durant la traversée des trois premières vallées, mais ils étaient arrivés à une impasse deux jours plus tôt, lorsque la rivière avait pénétré dans un défilé étroit, impossible à emprunter à pied au delà de quelques centaines de mètres.
L'idée d'un radeau avait été repoussée. En dehors du fait qu'ils n'étaient pas qualifiés pour naviguer, qui savait quels rapides pouvaient se trouver plus loin ? Sans parler d'une éventuelle chute. Trop dangereux pour s'y fier.
Ils comptaient donc un peu sur la chance pour que le nouveau chemin choisi leur permette de rejoindre plus loin la rivière. Il s'agissait d'un col un peu éloigné, qui présentait l'avantage d'avoir l'air accessible, qualité non négligeable, eut égard à leurs maigres compétences en escalade.
Après une journée dédiée à la récupération de la nourriture, ils prirent une bonne nuit de repos et se lancèrent dans l'ascension le matin suivant. Deux fois ils durent revenir sur leur pas pour changer d'itinéraire, à cause d'un terrain impraticable. De fait, ils n'avaient parcouru que les deux tiers du chemin jusqu'au col lorsque la nuit s'était annoncée.
Après avoir monté le camp et allumé le feu, Kim, Julie et Samya avaient entamé leur toilette pendant qu'Ève faisait un large tour autour du camp avec Bagheera. Ils avaient pris l'habitude de promener le fauve lors de chaque halte, pour laisser son odeur un peu partout et éloigner d'éventuels prédateurs. Couplée avec la présence d'un bon feu, cette stratégie leur laissait des nuits relativement tranquilles. Bagheera avait bien grossi en presque deux mois. Elle avait dépassé les cinquante kilos, tout en semblant être loin d'avoir acquis sa taille adulte. Encore pataude, elle s'était un peu affinée, mais restait leur gros bébé, attendrissant les filles plus que de raison... et Christophe aussi d'ailleurs.
Le jeune homme se demandait bien ce qui allait se passer lorsque l'animal approcherait de son âge adulte. Pourraient-ils vivre en bonne intelligence ? S'ils avaient été dans leur société, cela aurait constitué une idée stupide. Mais ici, sur ce monde ? C'était eux qui étaient dans l'univers du fauve, eux qui devaient s'adapter. Et s'il arrivait quelque chose à Christophe... Elle pourrait protéger les filles..
Mais c'était un fauve. Un fauve restait un fauve, paraît-il. Deviendrait-elle dangereuse ?
C'était une éventualité qu'il devait envisager, mais il ne voulait pas y penser. Après ces quelques semaines, il l'aimait comme il avait aimé son chien. Il n'aimait pas l'idée d'avoir à choisir entre elle et la sécurité des filles.
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Vierge de sang
FantasyÈve courait, comme jamais elle n'avait couru. Elle sentait le terrain sous ses foulées, savait instinctivement où poser les pieds, elle était comme le vent qui file entre les arbres. Elle percevait avec une précision incroyable toutes les odeurs qui...