Chapitre 6 - 1 : Les crocs

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Lorsque Christophe ouvrit un œil, le lendemain matin, il était trop tôt à son goût pour se lever, mais la faim était la plus forte et le tirait hors du sommeil. Allongé pêle-mêle avec Julie et Kim, il essaya de se dégager doucement, mais ses mouvements les firent émerger à leur tour.

Samya et Ève les regardaient tout sourire, la bouche barbouillée d'un rouge carmin, un monticule de baies devant elles.

« Elles sont pas très sucrées, mais elles sont super bonnes, déclara la première.

Surtout quand on a très faim » renchérit la seconde.

Elles avaient aperçu un animal, qui ressemblait à une grosse biche, manger les fruits des buissons épineux bordant certains des bassins. Elles en avaient déduit que ces baies charnues étaient comestibles. Pour s'en assurer, Samya avait goûté un échantillon et découvert avec plaisir une saveur légèrement acidulée et sucrée.

La cueillette avait été prodigue.

Grégory reprit conscience à son tour. Il était encore fiévreux et souriait un peu bêtement. Trop affaibli pour parler, il ne leur répondait que par de courts hochements de tête. Kim et Ève le prirent chacune par un bras pour l'adosser à la paroi, et l'aidèrent à manger en leur compagnie.

A eux six, le tas disparut encore plus vite qu'il n'avait été récolté.


« Puisque vous avez vu un animal qui ressemblait à une biche, il faudrait peut-être tenter de chasser. Il faut qu'on trouve de quoi nous redonner des forces ». Christophe regardait le jeune blessé en parlant. Julie hocha la tête et saisit un arc, jaugeant la tension de la corde : « Faudra qu'on s'entraîne un peu avant ». 

Christophe acquiesça et Kim demanda un peu dégoutée : « Mais qui c'est qui va l'ouvrir ? Enfin je veux dire, pour prendre la viande ? ».

Ils s'entre-regardèrent, indécis. Samya haussa les épaules : « Bein faudra apprendre. Mon père prépare souvent le mouton pour l'Aïd. Je l'ai déjà vu faire, ça doit pas être trop dur, ... c'est que de la viande... enfin... je peux vous dire comment on fait quoi.». 

Elle fit à sont tour une moue et regarda Christophe avec espoir.

Il pencha sa tête de côté et confirma : « Si on a faim, faudra bien qu'on passe par là. Et les fruits, je commence à en avoir un peu marre, sans compter que mon système digestif s'adapte pas super bien.

- M'en parle pas, surenchérit Julie. Heureusement qu'on a la rivière pour se nettoyer les fesses ! » 

Et elle partit d'un grand éclat de rire, suivie aussitôt par tous les autres.

« Ouais ! reprit Christophe, et bien suite à cette remarque très poétique, je propose qu'on s'organise, et qu'on y aille après nos petites ablutions matinales... Par contre, s'agit pas de changer nos habitudes : personne ne fait rien tout seul. OK ?

- Ouais, répondit Kim, mais vu ce que tu viens de raconter avec Julie, ça me donne pas trop envie de vous accompagner quand vous avez besoin de vous soulager ! » 

Tout le monde en rit, même si Christophe avait comme un pli un peu amère au coin de la bouche.

« Boh... c'est la vie, dit-il.

- On se surveillera entre nous, ajouta Julie. On est dans la même m... » 

Et elle ouvrit de grands yeux en avalant la fin du mot, avant d'éclater de rire de nouveau.


Pendant que les trois autres s'entraînaient à l'arc, Ève et Kim décidèrent d'améliorer le campement, tout en gardant un œil sur Grégory. Il y avait beaucoup de travail à faire : construire un abris en cas de pluie, envisager la construction d'une palissade, du moins son emplacement. Pour ce qui concernait l'abattage du bois, elles comptaient bien le laisser au mâle du groupe. Et puis il fallait fabriquer un véritable âtre, pour faire cuire la viande que leurs chasseurs ramèneraient, sans compter les quelques touches nécessaires au confort du lieu.

Vierge de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant