Chapitre 33 - 2

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Les jours passaient ainsi, d'apprentissage en quiproquo, où chacun essayait de comprendre l'autre. Les Nesqs formaient une tribu très ouverte et conviviale, et apprendre d'eux était aisé. Les Nesqs, tout comme les Kokoris, faisaient parti du grand et très ancien peuple Kyohnis, alors que les Shoakss était des descendants du peuple Aghimé, le peuple qui avait bâti l'empire des Hauts Mages. A leur grande époque, le royaume kyohnis recouvrait toutes les montagnes d'Athallin, l'immense chaîne de montagne dans laquelle les « Français » se trouvaient depuis quelques mois. Ils habitaient les nombreuses jungles qui y étaient disséminées, de vallées en plateaux. Ils pratiquaient une magie saine, qui leur permettait de vivre en paix et en harmonie avec les non-humains, et avaient bâti une civilisation riche et harmonieuse, qui attirait la convoitise des barbares alentours, dont les Aghimés. Leur royaume avait perduré longtemps, éclairant les autres peuples de leur connaissance et leur sagesse, ce que beaucoup avaient oublié depuis, dont les maudits Akheraïs. Puis les barbares avaient évolué, principalement les Aghimés, dont la puissance magique reposait sur des secrets qui n'auraient jamais dû être maîtrisés. Et les raids s'étaient transformés en conquêtes, et le royaume kyohnis avait décliné, pour finir par être englobé. Le peuple Kyohnis suivit ensuite l'empire aghimé dans sa chute lors de l'horrible guerre des peuples, qui avait ravagé tout le continent.

Mais contrairement aux Aghimés, les Kyohnis n'avaient pas renoncés à leurs secrets, leur magie était juste, elle était étroitement liée à leur culture, à ce qu'ils étaient, et ils refusaient de l'abandonner. Pour cette raison, les Akheraïs, ceux que les humains nommaient parfois les Chasseurs Nocturnes rodaient dans les montagnes et les pourchassaient. Car l'alliance des peuples, qui avaient vaincu l'empire aghimé, avait accepté de ne pas éradiquer l'espèce humaine si celle-ci renonçait définitivement à toute magie.

Les Aghimés, avaient acceptés, parce qu'ils n'avaient pas d'autre choix. Mais les Kyohnis vivaient dans des vallées difficilement accessibles, et plus que tout, leur relation avec les gosheruhns faisait partie de l'âme de leur peuple. Ils avaient déjà trop perdu durant les siècles précédant pour accepter de perdre cela aussi...

Heureusement, les autres peuples non-humains laissaient les Kyohnis tranquilles, alors qu'ils occupaient quasiment tout le reste de l'empire, trois cent ans après la fin du gigantesque conflit. Seuls les Akheraïs poursuivaient les humains jusque dans les coins les plus reculés, justifiant leur chasse sanglante par la nécessité de faire respecter les accords qui mirent fin à la guerre.

Les tribus kyohnis vivaient donc ainsi, entre la crainte des Akheraïs et les raids Shoakss. Pour s'en protéger, les tribus changeaient régulièrement le site de leur village, chacune occupant un vaste territoire, de façon à demi-nomade. Ils vivaient de la cueillette et de la chasse, au rythme des saisons, et évitaient de prendre des habitudes, ne revenant pas toujours aux mêmes endroits aux mêmes saisons.

Bien sûr, tout cela ne suffisait pas. Ils étaient conscients que leur peuple était moribond, mais n'en tiraient aucune amertume. Il leur restait encore un peu de temps devant eux, pensaient-ils, et la nature leur était clémente. Peut-être les choses changeraient en mieux un jour. Les époques passent et la chance change de main. Il ne leur restait qu'à attendre que les peuples dominants déclinent à leur tour, et peut-être alors pourraient-ils de nouveau vivre en paix.

Quant à leur magie, elle reposait sur la nature et l'équilibre. Christophe l'assimilait au chamanisme dont il avait connaissance sur le monde d'où il provenait. Il profitait des cours de langue qu'il avait avec Aëlep pour s'informer sur sa pratique. Il avait été ravi d'apprendre que ni le khohu, ni le kiyé, ni la khaada ne faisait appel à Ehntehag pour obtenir du pouvoir ou de la connaissance. Il se mit alors à espérer qu'une autre voie vers les arcanes mystiques lui reste accessible, et sans oser demander à apprendre, puisque le khohu avait déjà un apprenti, il se mit à lui parler des sorts que la déesse de la magie lui avait enseignés, pour avoir son avis sur ceux-ci.

Vierge de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant