Après une heure de progression dans sa direction, l'ambiance de la jungle avait changé. D'ouvertement hostile, elle était devenue très calme, mais pas du calme de la quiétude, c'était plutôt l'ambiance feutrée des secrets, l'ombre obscure des choses cachées. La végétation n'était plus aussi dense, les grands arbres qui régnaient ici ne laissaient pas passer beaucoup de lumière pour les autres plantes. Seules quelques arbustes résistants épars, et une mousse épaisse, se disputaient la place. De nombreux insectes rampaient ou voletaient de-ci de-là, mais d'une manière très discrète, loin de la fièvre chaotique qui régnait dans la jungle précédente. Et à part les oiseaux, au vol aussi silencieux que celui d'une chouette, ils ne virent pas un animal, même pas les traces qu'ils auraient pu laisser.
Les arbres étaient tous des répliques, en plus petit, de celui que les kyohnis appelait le temple du passage. Ils n'en étaient pas pour autant vraiment petits. La plupart des troncs faisaient au moins dix mètres de diamètre, et leurs racines imposantes s'élevaient parfois plus haut qu'un homme, les obligeant à faire des détours ou à grimper. Cependant, leurs formes étaient si tortueuses que l'escalade en était facile, et agréable, parce qu'elle rompait la monotonie de la marche. Les feuilles qu'ils purent distinguer sur les plus jeunes arbres étaient très épaisses, elles avaient une forme très évasée avec cinq pointes au bout crocheté, elles ressemblaient presque à une fleur, donnant l'impression que les branches portaient une multitude de corolles vert-foncé. Leur forme particulière en faisait des réceptacles, dans lesquels l'eau s'accumulait et gouttait lorsque son poids devenait trop important, ce qui faisait qu'ils avaient l'impression d'être sous une pluie très espacée, mais continue. L'eau gorgeait la mousse qui parsemait le sol en un tapis épais, et formait régulièrement des ruisseaux limpides, qui serpentaient de droite à gauche, venaient s'accumuler contre une imposante racine pour former une marre à l'eau claire, d'où un ruisseau plus imposante repartait.
Il faisait si chaud que la pluie n'était pas du tout désagréable, elle rafraichissait, lavait le corps de la saleté accumulée durant leur longue marche.
Les derniers kilomètres furent un vrai plaisir.
Ils arrivèrent finalement sur une plateforme de larges pierres plates et noires, qui s'étageaient sur une centaine de mètres jusqu'au tronc monumental. Elles formaient des marches inégalement réparties, d'une vingtaine de centimètres de haut. Des racines jaillissaient par endroit, crevant la pierre avant de s'enfoncer de nouveau dans le sol. Plus on s'approchait de l'arbre, plus les racines étaient épaisses, et plus les larges pierres plates étaient relevées, formant un semi-chaos rocheux, contenu entre de véritables murs de bois.
Le tronc de l'arbre sacré était si noueux qu'il fut possible d'en gravir la face en marchant sur les circonvolutions du bois, comme s'il s'agissait de rampes d'accès. Il fallait prêter très attention à ses mouvements, à cause de l'humidité et de la mousse, mais de nombreuses prises émaillaient le parcours, creusées dans le bois, quand il ne s'agissait pas de véritables marches dans les virages particulièrement pentus.
Le tronc était incliné, dans un sens ou dans un autre, facilitant la progression, mais cela les obligea également à prendre un passage donnant sur le vide, consolidé par une corniche de pierre noire, qui leur causa quelques frayeurs de par l'étroitesse du passage qu'elle formait. Plusieurs corniches de ce type étaient réparties sur le trajet. Elles formaient comme des saillies rocheuses, jaillissant littéralement du bois. Iyuh fut incapable de leur dire si leur présence était due à l'œuvre de leurs ancêtres, ou si ces pierres avait été soulevées par l'arbre et emportées lors de sa croissance.
Arrivé à mi-chemin, et face à une vue à couper le souffle, donnant sur toute la vallée, Christophe dû revenir sur ses premières impressions. Définitivement, l'arbre faisait plus de deux cent mètres de hauteur. Il devait être le colosse de la vallée, et s'il ne l'avait pas aperçu plus tôt, ce n'était dû qu'à l'épaisseur de la végétation. Il était empli d'un étrange sentiment de respect face à cette merveille naturelle incroyable, et il reconnaissait la même impression sur le visage de ses amis.
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Vierge de sang
FantasyÈve courait, comme jamais elle n'avait couru. Elle sentait le terrain sous ses foulées, savait instinctivement où poser les pieds, elle était comme le vent qui file entre les arbres. Elle percevait avec une précision incroyable toutes les odeurs qui...