Chapitre 25 - 1 : Le choix

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J'ouvre mes paupières. Le matin est là.

Bleu dans le ciel, rayons dorés faisant chatoyer les verts profonds de la canopée... Mon regard suit l'indolence des feuillages sous un vent timide, j'observe avec envie la paix mouvante qui règne au-dessus de moi.

Je cherche une raison de ne pas me lever.

J'ai une boule dans la gorge, une impression de ... culpabilité.

Je tourne la tête, celle de Kim est posée sur mon bras, endormie. De ma main libre je caresse sa joue. Sa peau est si douce. Elle est sereine.

Je l'aime. Immensément en cet instant, sentiment décuplé par cette impression d'avoir été déloyal. Ce qu'il y avait dans nos regards hier soir... « J'ai confiance en toi » a-t-elle dit. Je n'ai rien ajouté, je pourrais dire que je n'ai rien juré...C'est faux, certaines promesses n'ont pas besoin de mots. Seuls les coupables disent le contraire.

Et je suis coupable.

Bien sûr, il ne s'agit que d'une pierre, une petite gemme magique d'un bleu saphir.

Peut-être aurait-elle pu me tuer, mais la question n'est pas là. Je m'étais engagé...

Je ne sais plus qui a dit que c'est dans les petites promesses qu'on voit les capacités à tenir les grandes... quelque chose comme ça.

Bientôt, elle va ouvrir les yeux, me sourire... et puis son sourire s'effacera lorsqu'elle verra la gemme sur mon front. Peut-être sera-t-elle inquiète ? Ou peut-être en colère ?

Je ne l'ai jamais vu en colère, ni même irritée.

Ce geste égoïste va-t-il tout gâcher ?

...

Pourtant, grâce à ce geste, je pourrai la protéger. Je sais maintenant utiliser la gemme, de par le bon vouloir d'Ehntehag, elle m'ouvre les chemins qui mènent à la magie, je pourrais lancer des sorts, devenir magicien. Je pourrai la protéger, elle et les autres...

Je pourrais...

Quel imbécile... d'un minable, je passe à l'autre. Je veux être l'homme. Être fort pour exister, ne pas être un suiveur, un second, celui que j'étais dans mon autre vie, loin d'ici.

Je ferme les yeux juste un instant, prend une profonde inspiration.

J'embrasse Kim sur le front, ses sourcils frémissent, elle bouge un peu, elle ne va pas tarder à se réveiller.

Pourtant, par son amour, j'existe déjà non ?Ne me fait-elle pas me sentir vivant ?

Pourquoi est-ce que cela ne me suffit pas ?

Du bout de l'index, je caresse la pierre lisse et tiède sur mon front. J'ai appris ses pouvoirs, à la vitesse de la pensée, je projette mon esprit à l'intérieur, entre en harmonie avec elle par le biais de mon Gosheruhn, et la reconfigure pour activer un des pouvoirs que je n'ai pas encore essayé cette nuit, la vision des auras.

A peine une seconde s'est écoulée, je réintègre mon corps et observe les changements que la pierre me montre. Le monde s'est paré de nouvelles couleurs ; chaque chose, chaque être est entouré d'un halo indistinct que je peux appréhender lorsque je me concentre dessus.

A côté de moi, je regarde Kim, son aura est d'un blanc très doux, peut-être en écho de sa propre douceur. il n'y a pas de malice en elle, seulement la somme des émotions et des désirs qui font son humanité.

Je me retourne. L'aura de Julie est blanche, l'aura de Samya est blanche, celle d'Ève, tellement plus forte que les leurs, est teintée d'une couleur qui m'est inconnue, je ne connais nul mot pour elle, tout comme celle de Bagheera, sans doute la magie divine qui les a touché. Et puis finalement, moi. Je lève ma main, l'observe, regarde mon corps.

Mon aura est grise.

Un cours instant, je me demande si je ne me trompe pas, si ma perception est troublée par quelque interférence... Mais non...

Mon aura est grise.

La leur est blanche, pure... et moi je suis gris.

...

Je suis gris...

Je... je... Je n'aime pas cette impression de malaise qui m'envahit. Je me sens confus.

Je suis gris ?

Gris...

Je pourrais m'en étonné, m'insurger, mais je sens la culpabilité au fond de moi.

J'approche la main de mon front et ordonne mentalement à la gemme de se détacher.

Je n'ai plus envie de voir ça... moi.


Vierge de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant