La progression jusqu'au Sanctuaire, ou du moins la partie du Sanctuaire dans laquelle les Kyohnis avaient le droit de s'installer, dura quatre heures, émaillées de-ci de-là par quelques leçons d'histoire supplémentaires, ainsi que quelques explications sur les lieux.
Parmi les animaux présents dans cette grande vallée, tous n'étaient pas plus dangereux que ceux qu'on rencontraient dans les autres vallées, mais certains d'entre eux étaient des animaux-rois, ainsi appelés parce qu'ils survivaient depuis un nombre incalculable d'années. Ils avaient acquis la sagesse et l'intelligence que confère une expérience séculaire, ils avaient acquis la force d'un corps qui ne vieillit pas et qui, au contraire, s'endurcit au cours du temps. Certains d'entre eux étaient même capables de communication, comme le roi singe-bleu, qui parlait le Kyohnis, entre autre. Mais les animaux-rois n'étaient pas les seuls à avoir une durée de vie très longue, tous les animaux vivaient sans vieillir. Et parmi ceux-ci, les prédateurs étaient nombreux et particulièrement féroces. La chasse se révélait donc une pratique à haut risque, sauf sur l'île qui les hébergeait. En ce lieu, les indigènes étaient les seuls prédateurs. Leur Arbre-Roi en avait décidé ainsi.
L'esprit de Christophe tournait autour de cette idée d'immortalité. Il ne tarda pas à s'étonner qu'un tel lieu puisse être vivable, car en absence de mort naturelle, les animaux devaient en toute logique devenir un danger pour eux même, en menaçant l'équilibre de la chaine alimentaire. Aëlep apprécia la remarque, ainsi qu'Iyuh qui s'étaient rapproché d'eux pour partager la discussion. Le khohu répondit que c'était entre autre pour cette raison que les humains, prédateurs ultimes ne devaient pas vivre en ce lieu. Ils constituaient un danger pour la chaine alimentaire, mais, en dehors d'eux, les Arbres-Rois parvenaient à tout gérer. Car c'était ces derniers qui prenaient en charge la préservation de l'équilibre. Les anciens Kyohnis disaient que c'étaient les Arbres-Rois qui décidaient des naissances de tout être dans la vallée, et que par ce biais, ils étaient le dernier, et le plus important maillon de la chaîne de vie en ces lieux saints.
Quant aux hommes, en venant ici, ils se devaient de ne pas perturber l'équilibre et de faire très attention à leurs actes. C'était pour cette raison d'ailleurs qu'ils se plaçaient sous la protection et l'autorité d'un Arbre-Roi durant leur séjour.
Mais de toute évidence, cette politique n'avait pas toujours été respectée, du moins pour les peuples qui avaient précédés les Kyohnis en ces lieux. Il existait en effet de nombreux vestiges de civilisation, comme le montraient les antiques ruines qu'ils avaient croisées en descendant dans la vallée, ainsi que les restes de routes pavées qu'ils avaient longuement emprunté. Les ruines étaient très anciennes, Christophe avait vu quelques-unes d'entre elles sur des falaises lointaines, mais Iyuh lui avait assuré qu'ils en existait d'autres dans la jungle, cachées sous la végétation. Les Kyohnis avaient pris pour habitude de les éviter, parce qu'elles constituaient une sorte d'offense aux règles qu'ils respectaient. Pour autant, ils n'essayaient pas non plus de les détruire, disant laisser à la nature le temps de faire sa propre œuvre de nettoyage, selon le plan que les Arbres-Rois établiraient.
Christophe ne tarda pas à identifier l'Arbre-Roi sous lequel les tribus unifiées allaient s'établir. Il se révélait comme un gigantesque phare vers lequel la colonne de Kyohnis pointait tout au long de sa progression. Le tronc en était d'un blanc cassé, tandis que le feuillage était très sombre, d'un violet presque noir. Une bande de terre avançait profondément dans le lac au centre duquel il trônait, tandis que de nombreux petits îlots parsemaient l'espace restant. En s'approchant plus avant, Christophe distingua des espèces d'ombres indistinctes qui reliaient certains îlots végétaux entre eux. Ceux-ci se révélèrent être des ponts de corde, que les Kyohnis empruntèrent pour se rendre jusqu'au géant.
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Vierge de sang
FantasíaÈve courait, comme jamais elle n'avait couru. Elle sentait le terrain sous ses foulées, savait instinctivement où poser les pieds, elle était comme le vent qui file entre les arbres. Elle percevait avec une précision incroyable toutes les odeurs qui...