Chapitre 4 : Seuls

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« Kelthoum ! »

Réveil brutal lorsque l'image de la jeune femme brune s'imposa à son esprit.

Encore groggy, Christophe venait de revivre en un cours instant la scène qui avait précédé sa chute dans l'inconscience : le bouclier qui s'avançait avec une vitesse fulgurante vers sa mâchoire, tandis qu'en arrière plan, à plusieurs mètres de là, un des guerriers au visage strié de griffures tirait en arrière la chevelure de celle qui avait si vite ravi son cœur. Et de son autre bras, le soudard levait son arme.

Christophe ouvrit les yeux en criant son nom, se redressant brusquement pour la chercher du regard, mais il n'était plus sur les lieux du combat. Dans une pénombre protégée par de lourdes frondaisons, des oiseaux aux couleurs vives se taisaient, le regardant d'un œil rond. Autour de lui, silencieuses, se trouvaient les quatre jeunes femmes qui formaient plus de la moitié de son groupe, sa tribu d'égarés. Et pour seule réponse à son cri, il perçut le regard troublé de larmes de Samya. Elle niait d'un simple mouvement du visage, de gauche à droite, de droite à gauche.

Christophe fronça les sourcils, les idées embrumées, essayant de comprendre.

Sa mâchoire le lançait douloureusement. Un goût de sang dans la bouche, une sourde raideur dans la nuque... le bouclier... il était tombé à la renverse.

Samya, Julie, Kim, Ève, le visage de chacune de ses amies était marqué de pleurs. Olivier ? Omar ? Où ? Un frisson d'appréhension hérissa sa nuque.

« Quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ? »

Samya répondit, d'une voix qu'elle ne maîtrisait pas encore complètement : « Ils l'ont emmenée.

- Qui ?

- Kelthoum.

- Et les autres ?

- Ils ont tués tous les blessés, tous les vi... »

Elle ne finit pas sa phrase, cherchant du regard une ancre à laquelle s'accrocher.

Julie reprit d'une voix froide, malgré ses larmes : « Ils ont tué tout ceux qu'ils ne voulaient pas emmener, et ceux qui résistaient... Tous ! Les bâtards !! Si je les retrouve, je les tue. Dans le dos, pendant qu'ils dorment. L'un après l'autre. Je les laisserai pas s'en sortir comme ça.

- Et Omar ? Et Olivier ? ».

A l'énonce de ces noms, Kim partit en sanglots incontrôlables, cherchant refuge dans les bras d'Ève, tout autant en larmes.

Samya essaya de parler, mais les larmes bloquaient ses paroles. Christophe se mit à genoux et posa une main sur son épaule, avant de l'attirer à lui. Julie, à moins d'un mètre de là, restait debout, rageuse. Christophe lui prit la main, pour ne pas la laisser seule dans son désespoir.

Finalement, réunis dans une même douleur, ils s'agglutinèrent les uns contre les autres, pleurant d'une même douleur.

Les larmes de Christophe était dues autant à la rage qu'à la peine. La peine d'avoir perdu des gens qui en une courte période avaient pris tellement d'importance à ses yeux, la peine de sentir ses amies si proches souffrir autant, et la rage d'avoir échoué, de ne pas être le héros qui aurait su sauver les faibles et les innocents, et Kelthoum... Kelthoum...

De longues minutes s'écoulèrent.

Christophe réalisa soudain qu'ils étaient en pleine jungle, sans repère visible, sans même savoir comment il était parvenu là.

« C'est vous qui m'avez porté ? »

Julie chassa ses dernières larmes d'un revers de la main et vint s'asseoir à côté de lui, épaule contre épaule. Elle sortit un poignard qu'elle portait à la ceinture et commença à jouer avec : « C'est Omar qui nous a sauvé.

Vierge de sangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant