À l'infirmerie, une fois les soins terminés, Téos était venu leur faire la morale. Il avait accusé Aeshma d'être incontrôlable, Atalante de la suivre dans ses délires et leur avait déclaré qu'il était heureux qu'elles ne fussent pas nées à Sparte parce qu'en les voyant, les Lacédémoniens auraient toute suite vu qu'elles étaient folles et les auraient balancées sans plus attendre du haut de la falaise où ils jetaient leurs nouveaux-nés mal formés. Les deux gladiatrices restèrent muettes de surprise de se voir ainsi noyées sous les imprécations alors que derrière lui, Atticus et Typhon souriaient à pleines dents.
— Vous êtes folles, jura Téos. Mais par tous les dieux ! Que ne donnerais-je pour avoir vingt gladiateurs comme vous. Au moins, je n'aurais pas si peur de vous perdre, maugréa-t-il. Peu m'importerait qu'à chaque fois que je vous appaire ensemble, l'une de vous deux manque d'y laisser sa peau ou son intégrité.
— Elles vont bien, dominus, intervint Atticus. Elles pourront rapidement reprendre l'entraînement, mais il faudra attendre un peu avant qu'elles se montrent aptes à retourner sur le sable.
— Je voulais les emmener à Capoue, grogna Téos. On y donne un munus dans dix jours, je suis sûr de pouvoir y ajouter une ou deux paires de gladiatrices et peut-être même de gladiateurs.
Il les avait regardées l'air contrarié puis, il avait pointé un doigt menaçant dans leur direction.
— Vous allez rentrer, mais vous avez intérêt à vous tenir à carreau. Et quand je vous retrouverai, j'espère que Typhon et Herennius ne tariront pas d'éloges à votre sujet.
— Herennius ne s'est jamais plaint de nous, dominus, protesta Aeshma.
— Tu es tellement sûre de toi, Aeshma. Tu sais qu'un jour cela finira mal ? Que tu n'es pas éternelle ? lui dit-il méchamment.
— Je suis gladiatrice, dominus. Je sais cela depuis le premier jour.
— Oui, tu es tellement maligne ! Et toi, Atalante ?
— Dans le désert, chaque nouveau jour qui se lève sonne comme une victoire sur la mort.
— Pff... souffla le laniste énervé. Reposez-vous. Une dernière chose : vous étiez fâchées avant de rentrer dans sur le sable ?
Aeshma se renfrogna, Atalante se mordit l'intérieur de la joue, mais elle répondit :
— Non, dominus. Pourquoi pensez-vous cela ?
— Toi, tu n'étais pas fâchée, Atalante. Mais toi, Aeshma ? Je te regarde combattre depuis huit ans, je te connais. Tu as combattu comme une sauvage. Ça encore, ça peut passer, mais tu t'es montrée fébrile et ça, ça ne te ressemble pas.
— Je n'ai aucun grief envers Atalante. Je voulais seulement montrer à ces gens de quoi nous sommes capables.
— Mmm, fit Téos pas vraiment dupe de son mensonge. Je crois qu'ils se souviendront de votre prestation. Les gardes ont eu de la peine à empêcher vos admirateurs de forcer les portes du ludus. Ils avaient beau leur dire que vous étiez mourantes, ça n'en a découragé aucun. J'ai un tas d'invitations privées vous concernant et on a mis les cadeaux qui vous ont été apportés dans ta cellule, Atalante. Vous êtes insupportables, mais je ne vous volerai pas ce que les gens considèrent que vous méritez.
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Le sable rouge
Historical Fiction78 ap. JC. Province impériale de Lycie-Pamphylie. Une gladiatrice, deux sœurs. Les mirages de l'arène, la haine de l'Empire. Une rencontre entre deux mondes, celui des esclaves et des hommes libres. Des jougs à secouer. Une liberté à conquérir. Mai...