Chapitre LXXXI : Le sang du laniste

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Le temps était couvert. La pluie était venue, repartie, mais les nuages persistaient et le ciel recouvrait la ville d'une chape de plomb aussi grise et noire que l'étaient les pensées d'Aeshma depuis quatre jours. Atalante avait essayé de savoir ce qui la contrariait, Marcia s'était inquiétée, mais son inquiétude avait vite laissé place à la contrariété, à la tristesse et à l'incompréhension. La venatio avait eu lieu cet après-midi, Marcia avait une fois encore brillé de tous ses feux.

Aeshma était fière de sa pupille, mais elle retenait surtout qu'elle l'avait laissé tomber, qu'elle ne l'avait même pas saluée avant son départ pour l'amphithéâtre. Incapable de la regarder en face, de croiser son regard amical et heureux. De lui mentir. Elle avait donné, comme Marcia l'avait soupçonné, des instructions à Atalante. La grande rétiaire n'avait rien dit à ce moment-là. Mais, plus tard, elle avait essayé de savoir. Aeshma n'avait pas desserré les dents.

Atalante n'avait pas abandonné pour autant, elle était venue la rejoindre sur le toit un peu plus tôt. Aeshma l'avait provoquée, insultée. Atalante s'était fâchée. Elles avaient failli se battre. Atalante, malgré sa colère, avait renoncé avant que le premier coup ne partît. Aeshma n'était pas prête à parler, mais parfaitement prête à se défouler au dépend de son intégrité physique. La jeune Syrienne combattait dans trois jours, Aeshma aussi. Elles ne ressortiraient ni l'une ni l'autre indemnes d'un affrontement qu'Atalante pressentait violent. Désirait violent.

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Aeshma lui en voulait d'être partie et elle s'en voulait d'être ce qu'elle était. Une brute sanguinaire. Une vulgaire tueuse. Incapable de parler. Elle méritait la croix. Un châtiment encore trop doux pour ce dont elle s'était rendue coupable.

Toutes ses entrailles avaient menacé de disparaître quand elle avait regardé le sceau que lui avait tendu Marcia cinq nuits auparavant. La plante aux fleurs délicates, flanquée du casque et de l'épée en pale. Elle avait trouvé le courage de demander ce qu'il représentait pour la jeune gladiatrice.

Atalante avait raison. Téos avait fait de Marpessa, de Typhon, d'Astarté et d'elle-même, des assassins de la pire espèce. Des exécutants de basses besognes sans états d'âme.

Elle se souvenait de leur cynisme. Comment elles avaient séduit les légionnaires. Comment elles avaient exigé sept as en échange de leurs charmes et de leur savoir-faire de courtisanes. Comment elles s'étaient montrées gentilles et dociles à leurs désirs. Comment elles avaient satisfait avec enthousiaste et complaisance tous leurs fantasmes. Comment elle et Astarté, après avoir égorgé les soldats qu'elles avaient baisés durant une semaine, avaient feint l'ivresse pour approcher le campement des légionnaires, pour finir le massacre. Les mensonges. La manipulation. L'indifférence. La trahison.

Comment faire pour effacer cette infamie ? Comment dire à Marcia qu'elle avait planté son poignard dans le cœur de son père ? Qu'il lui avait dit merci.

Le sable rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant