Chapitre XCVI : Un cadeau princier

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Astyanax arrêta Gaïa au moment où elle s'apprêtait à sortir de la loge. La fête malgré la fin des combats n'était pas finie. L'Empereur avait encore réservé des surprises au public. On devait tirer la loterie et attribuer les lots promis : vaisselles, esclaves, bijoux, vêtements, amphores de vin, lopins de terre, petites propriétés campagnardes, animaux... Les deux sœurs n'avaient pas eu à se consulter du regard pour se décider à quitter l'amphithéâtre. Elles avaient eu leur compte d'émotion et de sang, elles aspiraient au calme. Julia arborait une mine contrariée et Gaïa serrait les dents.

— Madame, le Prince aimerait que vous restiez encore un peu, déclara l'affranchi d'un ton qui se voulait sans réplique.

Je suis fatiguée, fit Gaïa.

Est-ce une excuse ?

Non, en convint-elle.

Ne partez pas sans que le Prince ne vous en ait donné l'autorisation.

L'affranchi les raccompagna courtoisement à leurs sièges avant de retourner prendre sa place auprès de Titus.

— Il est parfois difficile d'échapper comme on le voudrait à l'Empereur, leur déclara avec sympathie Claudius Pera. Il ne s'embarrasse guère des contingences dont pourrait souffrir le commun des mortels. La loterie va s'éterniser, les gens vont hurler. Personne n'osera quitter l'amphithéâtre tant que Titus n'aura pas donné son aval.

Je ne comprends pas, s'étonna Gaïa. Je suis venue plusieurs fois et chacun m'a toujours paru pouvoir partir quand bon lui semblait.

Vous ne connaissez pas tous les usages, le signal vous a échappé et sans le savoir, vous n'avez jamais commis d'impairs.

.

Claudius Pera n'avait pas menti, le tirage de la loterie dura des heures. Une collation fut offerte aussi bien aux invités de la loge impériale qu'au public. Les cohortes urbaines interdisaient toutes sorties des pectateurs. Les hommes se soulagèrent sans honte dans les escaliers, les femmes protestèrent avec véhémence, mais elles durent comme les vestales prendre leur mal en patience. Malheur à celles qui avaient abusé de boisson. L'ambiance était joyeuse, les plaisanteries courraient, les bonnes histoires s'échangeaient, on commentait les derniers combats, ceux d'hier et ceux de demain. On pariait. Le soleil avait brillé toute la journée et la température était encore douce, la froidure du soir n'était pas encore descendue sur les épaules du public, les lots ravissaient les gagnants et maintenaient l'attention de tout le monde. Des acrobates, des dresseurs d'animaux et des lutteurs s'ébattaient sur le sable. Des esclaves chamarrés de couleurs courraient dans les gradins pour récupérer les numéros gagnants et remettre les bons des lots qu'on ne pouvait distribuer, d'autres proposaient à volonté, boissons et nourriture. Certains spectateurs succomberaient à l'ivresse bien avant l'ouverture des portes. Ils seraient jetés dehors par les gardes urbains si Titus ne leur accordait pas le droit de dormir dans l'amphithéâtre.

Le sable rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant