Chapitre LXXIX : Le sceau de Valens

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Leurs retrouvailles avaient été pleines de tendresse et de rires. Derrière la gladiatrice solide, malgré les épreuves, la dureté de sa vie, les dangers et le sang versé, Julia avait retrouvé la jeune fille qu'avait été Marcia avant que le malheur ne la rattrapât. Cette jeune fille qui menait une vie insouciante, protégée par son père. Marcia avait gardé sous sa cuirasse de gladiatrice, son esprit vif et joyeux. Julia s'était inquiétée la dernière fois qu'elle l'avait vue, quand elle l'avait recueillie avec les survivants de l'Artémisia. Sa profonde tristesse, l'éclat dur de ses yeux jadis si pétillants de joie et de malice lui avait serré le cœur.

Elle avait retrouvé une personne plus sereine à Rome. Gaïa n'était pas morte. Aeshma non plus. Ses camarades blessés avaient guéri et le cœur de Marcia ne se tordait plus dans l'attente de revoir la femme qu'elle aimait passionnément. Un voile subsistait, mais comment n'aurait-il pas subsisté ? La jeune fille avait dix-sept ans, elle avait tué, elle avait vu des amis ou des camarades mourir, on lui avait arraché ce qu'elle croyait être, quand c'était arrivé, l'amour de sa vie, elle frémissait d'appréhension à chaque fois que des gens à qui elle tenait, entraient sur le sable. Même pour celles qu'elle pensait au fond invincibles. Une blessure était vite arrivée. Un faux pas, un moment d'inattention et le fer mordait la chair.

Marcia parlait avec autant de feu qu'avant d'Aeshma et d'Atalante, mais sa voix et ses yeux trahissaient plus encore de tendresse que d'admiration aveugle. La jeune fille avait choisi la voie de la gladiature à cause des deux gladiatrices qui l'avaient tant fascinée au Grand Domaine. Comme elle avait été bien avisée, s'en félicitait Julia alors que Marcia lui racontait comment les melioras avaient cloué la jeune Parthe furieuse sur une table parce qu'elle opposait à leur joie une tête de sanglier grognon et comment, sous la menace de se voir couverte de peinture, elle avait cédé. Comment les autres avaient refusé et comment, grâce à ce refus, elle avait gagné son surnom de la Gladiatrice Bleue.

Atalante et Aeshma. Les deux jeunes femmes, n'avaient pas seulement formé et protégé Marcia. Elles l'avaient aimée, mais pas seulement. En écoutant la jeune fille, Julia devinait entre les deux gladiatrices une relation qui avait illuminé la vie de Marcia. Une relation qui lui avait apporté du réconfort et de la sérénité. Un exemple aussi. L'exemple vivant qu'au-delà du sang et de la violence pouvait exister et subsister autre chose que l'indifférence, la peur, la méfiance et la rivalité. Que des sentiments plus élevés et plus nobles pouvaient s'épanouir, grandir et resplendir. N'importe où. Même au sein d'une école de gladiateurs. Aeshma et Atalante lui avaient offert l'image exemplaire et sans fioritures d'une amitié sincère, parfois houleuse, mais jamais remise en question.

Julia avait décelé l'affection de la grande rétiaire pour sa camarade au Grand Domaine. Elle s'était exprimée avec plus de force et beaucoup de retenue à Patara parce qu'Atalante espérait qu'Aeshma eût survécu à son naufrage, mais qu'elle craignait de se tromper.

Le sable rougeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant