Marcia avait serré les mâchoires quand Téos avait annoncé qu'Astarté partait pour Capoue participer à un munus. Elle ne faisait pas partie de la liste qu'il énonça. Le laniste prévint les gladiateurs qui ne l'accompagnaient pas qu'ils ne l'attendraient pas à Pompéi. Dès que les blessés seraient en mesure de voyager, Tidutanus trouverait un navire sur lequel embarquer et ils rentreraient sans délai à Sidé.
La jeune fille compta mentalement les jours qui la sépareraient de la Dace aux yeux dorés. Si les vents se montraient favorables, il fallait à peine dix jours pour rejoindre Sidé. À ces dix jours, il fallait rajouter une quinzaine de jours pour le munus : le temps de s'y rendre, d'y participer, de soigner les blessés s'il y en avait, de regagner un port, de trouver un navire. Téos voudrait peut-être aussi s'arrêter en route. Elle réalisa qu'elle ne reverrait pas Astarté avant un mois et demi. Elle sentit sa frustration monter.
Atalante pouvait aller se faire foutre avec ses conseils et ses mises en garde.
Téos avait prévu son départ après le déjeuner. Les gladiateurs, quand venaient les grosses chaleurs de l'été, bénéficiaient d'une longue pause après le déjeuner. Les entraînements ne reprenaient qu'à la neuvième heure, parfois à la dixième, et se poursuivaient jusqu'au crépuscule. Le laniste ordonna aux gladiateurs qu'il emmenait avec lui à Capoue, de déjeuner tranquillement, de préparer leurs affaires, de se reposer et de se présenter, prêt à partir, à la huitième heure, dans la cour du ludus.
Astarté évita Marcia au déjeuner et elle mangea en compagnie de Marpessa, de Lucanus et des autres gladiateurs qui participeraient eux aussi au munus de Capoue. Furieuse, Marcia voua Aeshma aux Furies et attendit. Si Astarté croyait qu'elle partirait sans lui dire au revoir, elle rêvait.
Elle la coinça quand la jeune Dace retourna dans sa cellule empaqueter ses affaires. Elle s'introduisit dans sa cellule, pour une fois sans frapper, et barra la porte avec un tabouret.
— Marcia, murmura Astarté en se retournant.
— Pourquoi tu m'évites ?
— Tu sais pourquoi.
— On s'en fout de ce qu'elles pensent, personne ne sait.
— Tu prendrais le risque ?
— Non, mais...
La jeune fille s'approcha. Astarté se troubla et quand Marcia referma ses bras autour de sa taille et que ses mains se posèrent dans le creux de ses reins, elle céda immédiatement à l'attirance qu'elle éprouvait pour la jeune fille. Elle l'enlaça et l'embrassa dans le cou. Marcia accentua la pression de ses mains sur le corps de la jeune Dace et elles gémirent de concert. Astarté eut une pensée pour Aeshma et se reprocha son imprudence. Les lèvres de Marcia se posèrent sur les siennes, une main s'insinua sous sa tunique, caressa l'arrière de sa cuisse et Astarté s'abandonna à son désir. Elles se battirent un instant, chacune cherchant à déshabiller l'autre, Marcia mordit sauvagement Astarté quand celle-ci posa ses mains sur sa poitrine nue. La jeune Dace gémit de douleur. Marcia la retourna vivement et d'un rapide balayage intérieur de la jambe, la fit basculer en arrière. Astarté atterrit sur son grabat, elles ne s'étaient pas lâchées, elle retourna leur position et Marcia se retrouva sous elle, allongée sur le dos. Astarté l'embrassa, mais le baiser se brisa sur leur sourire. Astarté releva la tête. Elles s'observèrent un moment. Le regard bleu rempli d'étoiles de Marcia répondait au regard pailleté d'or d'Astarté.
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Le sable rouge
Historical Fiction78 ap. JC. Province impériale de Lycie-Pamphylie. Une gladiatrice, deux sœurs. Les mirages de l'arène, la haine de l'Empire. Une rencontre entre deux mondes, celui des esclaves et des hommes libres. Des jougs à secouer. Une liberté à conquérir. Mai...