Gaïa grimaça et retint un gémissement. Rien ne l'avait préparée à se faire pétrir comme une masse informe de pâte à pain.
Non seulement pétrie, mais tordue et étirée dans tous les sens. Les pieds, les jambes, les cuisses, les fessiers, les bras, les épaules, le dos, le cou, la tête. Même ses mains avaient eu droit à l'attention de la thrace. Celle-ci était à présent installée à cheval sur elle et ses paumes de main remontaient de ses reins à la base de son cou. La jeune gladiatrice ajoutait son poids à la force de ses bras et Gaïa pensa que si elle lui infligeait ce traitement pendant dix jours, elle gagnerait les quelques doigts qui lui manquaient pour atteindre une taille de six pieds.
La thrace l'avait sagement suivie en quittant la forge. Gaïa l'avait conduite aux bains. Elle savait que Julia s'y trouvait et tandis qu'elle la rejoignait, Aeshma avait été abandonnée aux mains et à l'attention de Serena. Elle avait demandé à la thrace de l'attendre, propre et prête à prendre soin de son corps endolori dans la salle de soins. La gladiatrice avait hoché la tête. Son visage n'exprimait rien et un quart d'heure plus tard, elle attendait Gaïa vêtue d'un pagne et d'un strophium propre, pieds nus, les cheveux attachés et remontés sur le haut de sa tête. Elle avait étendu un linge sur l'une des banquettes et placé dessus un petit coussin. Deux flacons, un strigile, des instruments de massages et des serviettes pliées avaient été préparés sur la deuxième banquette. Gaïa en s'introduisant dans la pièce, avait congédié Serena et spécifié qu'elle ne voulait pas être dérangée. Elle avait négligemment laissé tomber le drap dans lequel elle était drapée et s'était assise sur la banquette.
— Sur le dos ou sur le ventre ?
— Sur le dos.
Elle s'était allongée, les bras croisés derrière sa tête.
Aeshma l'avait regardée, pas très sûre de ce qu'attendait vraiment la domina.
— Je suis venue à cheval, expliqua celle-ci. En fait, j'ai chevauché au grand galop à travers les champs et les vergers. Je me sens percluse et j'ai promis à mon invitée de nouvelles courses. J'aimerais être capable de tenir ma promesse.
— Mmm.
Aeshma lui avait offert un massage complet de gladiateur.
Depuis son intégration dans la familia de Téos, la jeune gladiatrice était passée si souvent entre les mains des masseurs de la familia, qu'elle avait fini par connaître le moindre de leurs gestes, l'effet qu'avaient sur ses muscles, sur son squelette, ses tendons, ses tensions, chaque manipulation, chaque doigt, chaque mouvement. Daoud avait été le seul à bénéficier de ses attentions et du savoir-faire qu'elle avait peu à peu acquis. Elle était jeune quand elle s'était occupée de lui, mais elle s'était entraînée sur lui pendant presque quatre ans, même si ses massages avaient été sommaires et qu'ils s'étaient souvent limités à ses jambes, ses bras, son cou et ses épaules. Personne n'avait jamais su qu'elle prenait ainsi soin de lui. Elle le massait la nuit, quand il souffrait trop. Il lui avait proposé à plusieurs reprises, de lui retourner la faveur, mais Aeshma avait toujours refusé. Passer entre les mains d'un masseur lui apportait soulagement et relâchement, et elle trouvait cela agréable et naturel. C'étaient des masseurs professionnels, Daoud ne l'était pas. Lui... elle avait confusément rejeté l'idée qu'avec lui, le massage eût pu être plus personnel, qu'elle eût peut-être ressenti autre chose qu'un simple délassement. Elle voyait Daoud comme un corps quand elle s'occupait de lui, une addition de muscles, de tendons, de peau et d'os, mais elle n'avait pas voulu que les mains attentives du garçon se posassent sur elle, pas très sûre de ne pas relier les mains à un corps, au jeune homme et à ses pensées. Pas très assurée de le considérer comme un simple masseur. Elle ne voulait pas qu'il lût son corps et que, peut être à travers celui-ci, il s'immisçât dans ses pensées, qu'il y découvrit des clefs à l'aide desquelles il entre ouvrirait des portes qu'Aeshma tenait jalousement fermées.
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Le sable rouge
Fiksi Sejarah78 ap. JC. Province impériale de Lycie-Pamphylie. Une gladiatrice, deux sœurs. Les mirages de l'arène, la haine de l'Empire. Une rencontre entre deux mondes, celui des esclaves et des hommes libres. Des jougs à secouer. Une liberté à conquérir. Mai...