Après avoir roulé mon butin dans la cape et l'avoir remis dans mes affaires, dans le dortoir, je partis à la recherche de Pausanias et le trouvai occupé à prendre soin d'un des chevaux de Philippos. L'animal avait gardé son poids d'été, contrairement à ceux des Skuthoi que nous avions laissés plus au nord : notre cavalerie avait bien profité des céréales volées aux athéniens.
Je dégottai un gros peigne et me glissai contre l'animal pour démêler sa crinière, tout en saluant mon camarade.
— J'ai croisé Démêtrios.
— Ouais. Il est arrivé de Pella juste après ton départ.
Le beau visage de Pausanias m'apparaissait par-dessus le garrot du cheval, avec la bouche tordue d'un homme qui a mordu dans un fruit pourri.
— Qu'est-ce qu'il fout là ? Je croyais qu'il préférait rester à coller Amyntas comme une mouche à merde.
— Tu n'as qu'à demander à Alexandros. Y'en a qui bavassent que c'est lui qui a décidé de l'emmener.
— Et les autres...
— ... disent que c'est son oncle Attalos qui veut qu'il traine près de Philippos avant d'avoir trop de barbe.
Je savais que Pausanias en avait, mais il depuis notre départ de Pella, je ne l'avais toujours vu qu'impeccablement rasé.
— Pourquoi Alexandros voudrait emmener ce merdeux ?
— Il espérait peut-être qu'il se prendrait une balle de fronde perdue ou une fièvre de camp. Tu sais... non, tu ne dois pas savoir, tu étais absent. Il parait que Démêtrios a raconté à tout le monde, à Pella, qu'Alexandros n'oserait jamais exécuter Térês pour sa trahison.
Ma main se figea sur le peigne.
— Et Alexandros l'a laissé faire ?
Pausanias haussa les épaules.
— Qu'est-ce que tu voulais qu'il fasse ? Qu'il le fouette un bon coup ? Attalos est général, il a plus d'influence que lui dans le royaume. Remarque, si Démêtrios continue à chercher la merde, vu la qualité de ses magouilles, c'est Philippos qui va lui mettre une bonne correction et là, même Attalos n'y pourra rien.
Je fixai le gros nœud sur lequel j'avais arrêté mon peigne. Je me forçai à y porter mes doigts pour le démêler, malgré le froid qui envahissait mon visage. Je n'avais pas pensé à Térês depuis un moment – je me l'étais interdit, parce qu'Alexandros était mon seul espoir de survie... mais si le parti d'Amyntas l'avait poussé à force de moqueries...
— Pausanias, dis-je d'une voix creuse, on est amis, n'est-ce pas ?
— Ah bon ? s'étonna l'autre. Tu m'aimes bien, toi ?
Le nœud céda. Je repris mon peigne ; oui, les choses avançaient. J'attrapais les fils laissés volants par le hasard pour tisser ma toile.
— Oui, promis-je en me rendant compte que c'était vrai. Tu as pris soin de moi quand je n'allais pas bien.
Il convint que j'avais raison et que, vu mon air de mort vivant, ça n'avait pas été une partie de plaisir.
— Le général Attalos, il a un fils ?
À part moi.
— Non, répondit Pausanias, un peu désarçonné par mon changement de sujet.
— Donc, Démêtrios, c'est son héritier ?
— Oui, tu penses bien que sinon, il ne s'embêterait pas à pousser un abruti comme lui.
— Il le pousse ?
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La Flèche d'Artémis
FantasyAlexandre, fils de Zeus, est destiné à vaincre au nom de l'Olympe. Orestis, fils de personne, n'est que l'assassin qu'on a privé de nom. Sous l'identité d'Hêphaistion, un jeune noble désargenté dont il a pris la vie, il devra tout faire pour que le...