Ceci n'est pas un livre d'Histoire - Amour, gloire et beauté

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La romance joue un rôle important dans l'intrigue de la Flèche d'Artémis. Certains choix ont été faits pour combler d'importantes zones d'ombre, généralement en faveur de l'option la moins problématique de notre point de vue.

L'homosexualité, telle qu'on la conçoit en tant qu'identité, n'était pas connue en Grèce Antique. Les sources (principalement athénienne) font davantage référence à des pratiques, acceptables ou non selon l'âge et le milieu social. Ainsi, à Athènes, dans les milieux favorisés, il était acceptable d'être le « bien-aimé » lorsqu'on était adolescent, c'est-à-dire d'être poursuivi par des « amants » plus âgés. Ici, le terme « d'adolescent » est peu clair, car les vases et les récits indiquent que le « garçon » ou « jeune homme » pouvait en fait avoir jusqu'à la vingtaine. Le fait de porter la barbe faisait passer le « garçon » dans la catégorie des hommes. Quel était cet âge précisément ? Le point de vue des Macédoniens était-il le même ?

La vie amoureuse tumultueuse de Philippe de Macédoine

La relation entre Pausanias et Philippe est bien attestée dans les sources, mais baigne dans le flou. J'ai décalé l'événement de leur aventure et de la mort d'Hippostratos, souvent appelé Pausanias par les sources (ce qui aurait été peu clair), qui s'est sans doute déroulé en 345, lors d'une campagne de Philippe en Illyrie, durant laquelle il fut également blessé à la jambe. Certaines sources parlent de Pausanias comme d'un « garçon », ce qui est très peu précis, et nous savons qu'il était « page ». Les pages étaient principalement des adolescents, mais des sources plus tardives indiquent que seuls les plus âgés accompagnaient le roi à la guerre. De plus, si Hippostratos a pu mourir au combat pour racheter son honneur, il n'était certainement pas un adolescent de quatorze ans, mais sans doute dans la classe d'âge des éphèbes (18-20 ans environ), ce qui correspondait à l'âge du service militaire à Athènes.

Rien n'indique, dans nos sources, que Philippe préférait de jeunes hommes aux adolescents (et encore moins des hommes adultes, ce qui était considéré comme la débauche la plus totale par les Athéniens, pour qui une relation consentie entre deux adultes barbus paraissait plus problématique que la prostitution infantile). J'ai choisi de me baser sur ce qu'on sait de Thèbes, où les relations entre hommes liaient les soldats du Bataillon Sacré. De plus, le général Epaminondas, même s'il n'en faisait pas partie au moment de sa mort, ne se maria jamais et fut enterré avec son bien-aimé.

À Thèbes, la troupe d'élite était composée de paires d'amants, un bien-aimé et un amant. Si le bien-aimé est plus jeune que l'amant, là aussi, on imagine très mal une troupe d'élite composée pour moitié d'adolescents ; de même, Epaminondas, grand général, ne se serait pas rendu sur le champ de bataille accompagné par un jeune garçon. Paul Cartledge suppose que les bien-aimé étaient de jeunes hommes, encore non mariés, dans une tranche d'âge qui pouvait donc aller de 18 à 30 ans, alors que les amants étaient, eux, plus âgés.

Philippe a réellement vécu à Thèbes, pour une période difficile à définir, de plus ou moins trois ans. J'ai donc choisi de combler la zone d'ombre macédonienne avec le peu qu'on sait des Thébains, et de lui attribuer des amants qui auraient l'âge de former une paire dans le Bataillon Sacré. La différence majeure est que ces paires étaient censées être durables, un lien indéfectible, alors que Philippe était réputé volage. La liste de ses amants inclus (potentiellement) Alexandre d'Épire, le frère de la mère d'Alexandre, qu'il aurait placé sur le trône d'Épire en récompense de leur aventure.

Un autre amant possiblement imaginaire de Philippe est le général thébain Pammenes. J'ai délibérément choisi d'écarter cette possibilité : Philippe devait alors avoir entre 13 et 17 ans, Pammenes était son gardien et était, bien évidemment, bien plus âgé que lui. Si cette relation n'aurait sans doute pas choqué la bonne société de son temps, j'ai décidé que nous pouvions nous passer de ce qui, de notre point de vue actuel, aurait été un viol sur mineur.

Philippe se maria sept fois. Les rois de Macédoine étaient souvent polygames, et aucune épouse ne portait de titre spécifique pour la distinguer des autres. En dehors de son dernier mariage, dont les motivations sont troubles, il se maria toujours pour d'évidentes raisons politiques, même si certaines sources nous disent qu'il épousa la mère d'Alexandre par amour.

Cinq de ses enfants seulement atteignirent l'âge adulte : Alexandre, Arrhidaios, et leurs sœurs Kynané, Kléopatra et Thessaloniki. L'aîné, Kynané, reçu bien un entrainement aux armes, ce qu'on attribue au fait que sa mère, Audata, était Illyrienne et que des princesses guerrières existaient au sein de ce peuple. Kynané aurait vaincu une reine en combat singulier, lorsqu'elle aurait accompagné son père en campagne. C'est une des seules femmes de l'antiquité à être attestée au premier rang de son armée, menant des hommes et combattant. Il est regrettable qu'on ne sache rien de la position de Philippe à ce sujet, ni de la perception qu'avait sa cour de sa fille Kynané.

Dans le roman, j'ai choisi d'attribuer à Philippos des motivations secrètes probablement très éloignées du Philippe historique. Comme tous les hommes de son temps, il n'était probablement pas secrètement féministe, et en tant que roi, ne rêvait pas non plus de matins qui chantent et de l'aube rougeoyante du socialisme... d'ailleurs, est-ce vraiment ce que Philippos désire ? Après tout, il ne cesse jamais de mentir. Il est néanmoins vrai que le culte de Dionysos pouvait avoir des aspects disruptifs pour la Cité, et que la figure de Dionysos lui-même était très ambigüe, entre chaos, mélange de masculin et de féminin, de vie et de mort, de rage et de douceur. Dionysos est une marge, plus ou moins apprivoisée, qui semble bien accueillante pour ceux qui la société écrase...


La Flèche d'ArtémisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant