Livre IV - Chapitre 25 (2)

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— Je veux être initié, demandai-je à l'aube.

Accoudé sur le muret où, la veille, Ptolemaios m'avait fait sa proposition, Philippos suivait des yeux la forme pâle d'Alexandros. L'adolescent avait repris ses habitudes de Mieza : courir, aux aurores, quand les autres se levaient à peine.

— Tu es sûr de toi ?

— Oui. Je ne veux plus être outil stupide, dans les mains de prêtresses qui n'ont jamais vraiment voulu de moi.

— Elles l'apprendront sans doute. Leurs pouvoirs ont l'air assez grands pour cela.

— Je m'en fiche. J'ai... j'ai besoin d'être avec vous. Avec vous, je pourrais les affronter.

Et de toute manière, la décision était déjà prise : venger Hêphaistion. Qu'importe qu'elles aient la confirmation que mon silence était coupable. Je ne supporterai pas de leur mentir, de répondre à leurs convocations, de prétendre que je les servais encore.

— Il y a une épreuve à passer.

— Tout ce que tu voudras.

— Viens.

Je le suivis jusqu'à sa chambre, aussi spartiate que celle que je partageais avec Alexandros : on y avait guère de place, dans l'espace laissé libre par deux grands coffres, un lit où pouvaient dormir deux hommes et un broc d'eau.

— Tiens, regarde sous le lit pendant que je... m'ordonna-t-il alors qu'il fouillait l'un des deux coffres pour le pot offert par Hermès. Voilà, là, près du pied, il y a une boîte. Elle est pour toi. Tu dois la garder avec toi, toujours, et ne jamais l'ouvrir.

— C'est l'épreuve ?

— Exactement, m'informa-t-il en retirant le couvercle du pot. C'est le premier Mystère.

— C'est-à-dire ?

— Que tu ne dois jamais l'ouvrir.

— Je ne comprends pas.

— Le Mystère est à l'intérieur, et cette boîte doit rester close jusqu'à ce que je t'ordonne d'utiliser ce qui est à l'intérieur.

Après avoir reniflé le baume, il s'en badigeonna généreusement les doigts – le pot avait semblé intact, à première vue, et je me demandai s'il se remplissait par magie à chaque fois que personne ne le regardait.

— C'est tout ? insistai-je.

— Quoi, c'est tout ? s'étonna-t-il en malaxant son genou raide. À ton âge, j'ai crevé de curiosité pendant des semaines avec cette foutue boite. Tu n'es même pas un peu curieux ?

— Je me soigne.

— Ah. De quoi ? De la curiosité ?

— Avant, avouai-je, j'espionnai les gens. (Puis, la tête basse...) Mais plus maintenant. Enfin, pas les gens que j'aime.

Il me jeta un long regard ; puis, lentement, un sourire apparut sur ses lèvres, et il me dit, d'une voix chaude :

— Tu as tellement grandi, en quelques semaines.

Il avait l'air fier de moi – cela fit éclore quelque chose dans ma poitrine. La réalisation, sans doute, qu'il avait raison ; que j'étais presque heureux ; que les choses sombres qui rodaient sous la surface me laissant en paix depuis que j'avais trouvé un équilibre, fragile, avec Hêphaistion, avec Alexandros, avec tout le reste.

Je ne savais combien de temps cela durerait ; j'évitai d'y penser. J'avais été si souvent misérable que je voulais déguster chaque instant. Je caressai le couvercle de la boite, qu'une simple ficelle maintenait fermée. C'est parce que je vous ai vous, pensai-je, vous tous, ma famille.

La Flèche d'ArtémisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant