Chapitre 88 : Héritage de poussière

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Les fils de Thysié et Pistos, Tros et Ilos, avaient choisi la cuisine comme terrain de jeu malgré les ordres que leur lançait en vain leur mère. Celle-ci se tourna vers Timia qui riait en le voyant son air désespéré.

- Quand je pense que j'étais peu sereine à l'idée de laisser les garçons à Pistos et qu'en plus de ça, c'est toi qui t'es dévouée à sa place. Je ne sais pas comment te remercier pour ton aide...

- Ce n'est rien, je les trouve bien plus sage que les jumeaux, Alopex et Andrios à leur âge. Et puis ce sont les fils de mon frère de lait, je peux rendre au moins ce service, même si j'avoue qu'il me faisait un peu de peine quand je le voyais au palais avec sa tête des mauvais jours.

- Ton frère de lait ? Je ne le savais pas.

- Nous avons partagé brièvement la même nourrice, et puis nous avons grandi ensemble, il est comme mon frère. Enfin, quoi qu'il en soit, tu peux laisser ici tes fils quand tu le désires, ça ne me dérangera pas. Et surtout, ne cache pas ta joie, tu es trop heureuse de cette proposition. Encore du vin ?

- Du lait de chèvre au miel si ça ne te dérange pas.

L'intendante hocha la tête et se leva du banc en bois brut pour chercher. Thysié la regarda faire avant de chercher ses fils qui traînaient au plein milieu du passage, en train de caresser le chat de leur cousine et gênant les esclaves. Mais aucun ne rabroua les deux garçons, pas par respect et mais par crainte de une réprimande pour la remarque. Thysié avait beau les rappelé, ses fils ne réagirent pas.

- J'ai du lait chaud avec un part de gâteau au miel, lança Timia d'une voix forte. Qui en veut ?

- Moi ! s'écria Tros en se relevant d'un bond.

Et sans l'aide de quiconque, il se hissa sur le banc et tapa la table de ses mains pour goûter à son lait et son gâteau. La rousse sourit et adressa un clin d'œil à la mère des garçons avant de mettre devant eux la boisson et la gourmandise qu'ils mangèrent avec voracité.

- Je sais maintenant quoi faire une fois chez moi, rit la médecin. Ilos, mange et laisse le chat, tu en mets partout.

Mais il demeurait pencher vers le félin roux qui continuait à arpenter la cuisine avant de griffer les pieds de la table et enfin sortit par la porte de service qui donnait à la cour du palais. Thysié préféra ne pas se tordre le cou pour observer l'animal et porta son gobelet à ses lèvres avant de regarder Timia.

- Le fils de ton frère, comment s'appelle-t-il déjà ? Et les trois autres ?

- Cestrinos, et les fils qu'Andromaque a eu de Néoptolème sont Molossos, Pielos et Pergamos. Mais elle n'est pas heureuse, elle vit encore dans le souvenir d'Hector et Astyanax, et je ne peux que la comprendre. Les fils ont davantage les traits de Néoptolème et j'ai même eu l'impression de voir Achille. Elle n'est plus que l'ombre d'elle-même, elle est brisée, et Hélénos aussi, depuis qu'il sait la mort de Cassandre.

- Qui ne l'est pas ? soupira Timia avec tristesse. Personne ne s'est sorti de cette guerre sans des blessures au cœur et des sacrifices. Mais au moins, ton frère est vivant et toi aussi. Mais j'ai remarqué Desdémone davantage tourmentée depuis votre retour. Ses crises ont reprises ?

- Hélas. Après la naissance de Cestrinos, ses cauchemars ont repris mais aucune crise de panique. Je crois qu'en revoyant Hélénos, elle a songé à son père et cette naissance à Astyanax, et ensuite...

- Pauvre enfant. J'espère qu'elle retrouvera la paix. J'ai trouvé Clelia très préoccupée par son état en ce moment, je pense que nous irons passer l'hiver au sud pour que Desdémone aille mieux.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant