Chapitre 140 : Jeu de survie

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Le vent glacial qui soufflait depuis les montagnes et le mont Parnasse joua avec les chlamydes et himations et gela jusqu'aux os ceux qui étaient trop frileux comme Sophia. Elle se retint de claquer des dents et rabattit sa chlamyde volante autour de ses épaules, réarrangeant au passage sa pelisse de renard.

- Nous aurons un hiver plus froid que les autres années, prédit Tharros en serrant aussi sa chlamyde.

- Quelle horreur, ça va coûte cher en bois de chauffage et les dépenses du palais vont augmenter. J'aurai préféré un hiver un peu plus clément.

Tharros haussa les épaules et marcha jusqu'au grenier à blé de la cité pour contrôler son niveau. Sophia le suivit en tenant encore son himation et quand les portes du grenier leur furent ouvertes, ils purent pousser un soupir de soulagement. Il y avait assez de blé pour ne pas mourir de faim jusqu'à la fin de l'hiver. Et surtout, ils avaient enfin fini de contrôler la cité et ils pouvaient rentrer se réchauffer.

- Je dois récupérer quelque chose, tu peux rentrer, dit Tharros en se dirigeant vers le quartier des marchands.

- Je viens avec toi.

Il parut embêté mais s'abstint de dire quoi que ce soit et ils se rendirent ensemble au quartier. Bien sûr, là où ils passaient ils étaient reconnus. Tharros rendait chaque salutation avec un sourire tandis que Sophia les ignorait et suivait son jumeau qui s'arrêta devant l'étal d'un marchand d'épices et regarda attentivement. Sophia resta près de lui, ses bras serrés contre son corps, battant ses pieds pour se réchauffer un peu.

- C'est pour le cadeau de noces de Desdémone ?

- Je l'ai déjà acheté il y a un moment, répondit-il distraitement en montrant du sel aromatisé au safran au marchand. Je vais en prendre.

- Pour Timia alors ? C'est vraiment une faute de goût, si tu as quelque chose à lui demander ou à te faire pardonner, il vaut mieux lui offrir du poivre ou de la cannelle, elle te remerciera et elle t'inclura même dans ses prières.

- Ce n'est pas pour Timia, corrigea-t-il, mais un peu plus rudement.

Sophia écarquilla les yeux, mécontente qu'on lui adresse un ton pareil. Elle dressa une liste dans sa tête en essayant d'imaginer à qui du sel au safran pourrait plaire mais parmi tous ses proches, il n'y en avait aucun. Puis une personne en particulier lui vint et un sourire malicieux releva les coins de ses lèvres. Elle observa son jumeau qui déposa quelques drachmes dans la main du marchand. Elle se sentait à présent d'humeur à le tourmenter un peu et elle se glissa derrière son dos pour dire assez fort :

- C'est un cadeau pour mon beau-frère ? s'enquit-elle. Il s'est passé quoi ? Ou alors c'est pour célébrer quelque chose entre vous ?

Il sursauta et se tourna pour la regarder, effaré. Déjà, ses joues prirent une teinte écarlate et le marchand qui les avaient entendu gloussa malgré lui devant une telle réaction. Sophia s'en délecta et tandis que son jumeau s'éloignait à grandes enjambées, elle trotta pour le rattraper et s'accrocha à son bras pour éviter qu'il s'éloigne d'elle.

- Dis-moi, est-ce que je serai la première avertie quand vous vous marierez ? Ça fait un moment que vous êtes ensemble et tout semble aller pour le mieux entre vous deux. Tu devrais aller faire ta demande à son père, non ? Je serai vraiment heureuse d'assister au mariage de mon jumeau. Alors, pour quand est le mariage ?

- Sophia, tais-toi ! s'écria-t-il, à présent cramoisi.

- Ça veut dire que c'est prévu ? Et tu ne me l'as même pas dit ? Je suis déçue, je pensais que tu pouvais me faire confiance.

- Par Apollon tout puissant, tais-toi ! supplia-t-il cette fois-ci, désormais pourpre jusqu'aux oreilles.

- Ce n'est pas le chemin vers le palais mais plutôt vers le quartier populaire. Tu vas rendre visite à mon beau-frère ? Quelle excellente idée, allons-y tout les deux, je vais demander sa main pour toi !

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant