Chapitre 61 : La colère d'Achille

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Les pressions des soldats sur Agamemnon avait fini par porter leur fruits. Il avait cédé et rappelé le père de la captive, Chrysès. Le prêtre avançait jusqu'à sa fille, indifférent des regards qu'on posait sur lui. Il était heureux de retrouver sa fille et remercia d'un mouvement de la tête Agamemnon. Au contraire du prêtre et de sa fille, le chef de guerre avait le visage fermé et les mâchoires contractées. Il était furieux d'avoir été contraint de rendre sa captive.

Clelia observa les retrouvailles avec un petit sourire. La douleur du père l'avait touché quand il était venu demander qu'on lui rende Chryséis en échange d'or. Devant son refus, le prêtre qui servait Apollon, lui avait prié de punir les grecs. C'était pour cela que la peste touchait des soldats. Par chance, Clelia avait pu se prémunir du terrible mal en sacrifiant autant de bœufs qu'il fallait. Et Achille, par l'entremise de sa mère, avait lui aussi évité la maladie sur ses hommes. Aujourd'hui, si la peste cessait, Achille n'y serait pas pour rien, son discours avait fait effet sur les hommes et ainsi, en faisant pression sur Agamemnon, ils l'avaient contraint de se séparer de Chryséis.

L'ancienne captive et son père s'éloignèrent de ce campement maudit. N'ayant plus rien à faire ici, Clelia rappela son cousin et sa belle-sœur afin de rentrer. Achille allait faire de même quand une voix retentit, les appelant. Clelia s'immobilisa d'abord avant de se retourner lentement. Agamemnon leur faisait face et il pointait un doigt vers la princesse troyenne.

- C'est par votre faute si je suis réduit à rendre ma captive, asséna-t-il. Je mérite un dédommagement pour l'outrage que j'ai subi. Donne-moi cette fille.

- Certainement pas ! s'insurgea la souveraine. Je ne te donnerai pas ce plaisir.

- Nous verrons bien.

Il fit signe à deux de ses soldats de se saisir de Thysié. Celle-ci fit plusieurs pas en arrière avant de heurter accidentellement le torse de Pistos. Elle se tourna vers lui et lui adressa un regard suppliant, pour la protéger. Mais assez vite, les soldats du mycénien s'approchaient et tendaient déjà leurs mains vers elle. Elle ferma les yeux pour ne pas les voir mais sentit bien assez vite quelqu'un se glisser derrière son dos et poser un objet froid contre son cou. Thysié les rouvrit et vit avec horreur la lame d'une dague qui la menaçait, ferme contre sa fine peau blanche. Un seul mouvement et elle risquait de se trancher la gorge. Elle tentait par tous les moyens de s'apaiser, mais elle n'y parvenait pas. Elle était effrayée.

Clelia était derrière elle, le corps tendu. Tous s'étaient figés et regardaient la pointe effilée prête à trancher le délicat cou de cygne de la fille de Priam. La pression de la lame contre sa gorge ne diminua pas. Pourtant, malgré la menace que Clelia faisait peser, Agamemnon éclata dans un rire sordide et toisa avec mépris la reine.

- Tu n'oseras jamais, Clelia, et tu es ridicule. Sois raisonnable et donne-la-moi. Avoir pour captive une princesse de Troie vaut davantage que cette misérable fille de prêtre.

La pointe se pressa contre la peau et une goutte chaude et poisseuse coula. Thysié devint plus blanche que de l'écume et menaça de s'effronder à tout moment sur le sol, terrifiée. Sur le moment, il lui sembla qu'elle ne s'en tirerait pas, de cette situation, qu'elle mourrait sans avant d'avoir revu son frère.

- Ne me tente pas, Agamemnon, je peux la tuer sous tes yeux, peu m'importe, pourvu qu'elle ne tombe pas entre tes mains.

La voix terriblement froide de Clelia lui fit peur. Thysié commençait à prier les dieux pour éviter qu'elle ne perde sa vie. Maintenant, en plus de cette goutte de sang, d'autres, plus froides coulèrent de ses tempes. Sa gorge devenait sèche et ses jambes lui parurent si fragile qu'elle se demanda comment elle arrivait à tenir encore debout.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant