Chapitre 99 : « Là où le vent m'emportera »

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Un léger sourire étira les lèvres de Desdémone quand elle entendit les moqueries de ses cousins envers leur père. Celui-ci prenait un air comique qui faisaient redoubler les rires.

- Il est temps pour vous deux d'aller vous couchez, déclara Thysié à ses fils. Il est tard. Embrassez votre cousine et votre père.

Ils protestèrent d'abord mais se résignèrent à obéir. Desdémone sentit Ilos se jeter dans ses bras avec une telle force qu'elle tomba presque à la renverse. Le rire de Thysié s'éleva quand Tros reproduisit le même geste que son frère.

- La prochaine fois que tu viendras ici, tu nous ramèneras Pyrrhos ? demanda Tros avant de monter à l'étage pour rejoindre sa chambre.

- Il est blessé et il doit se reposer. Mais s'il va mieux, vous le verrez. Allez dormir.

Ils obtempèrent, leur mère derrière eux pour les border et leur tenir compagnie le temps qu'ils dorment. Il ne restait plus que Desdémone et Pistos qui vida la carafe pour remplir leurs coupes. Desdémone prit une gorgée et apprécia le goût de la boisson.

- Quand partez-vous pour la campagne ?

- Après-demain, si tout va bien. Tu peux venir avec nous si tu le souhaites, ça te changera du palais.

- C'est très aimable, mon oncle, mais je ne veux pas imposer ma présence à ton père, déclina-t-elle en souriant poliment. Je resterai au palais, il y a beaucoup de choses à faire entre le temple d'Apollon et d'Hécate. Et puis j'ai des choses à régler en ce moment et qui nécessite ma présence ici. Est-ce qu'il y a encore du vin ?

- Plus rien, malheureusement. Mais il y a une amphore de vin de Corinthe qui devrait te plaire. Je vais la chercher, elle est bien cachée pour que les esclaves n'y boivent pas.

La jeune fille hocha la tête et le regarda partir. Puis quand il passa la porte, elle inspecta toute la salle, craigant un esclave qui se cachait dans une alcôve. Quand elle s'assura que personne ne se trouvait ici, elle décrocha de sa ceinture le sachet de plantes séchées qu'elle avait dissimulé sous son himation et prit une petite pincée. Elle attrapa aussi des mèches de cheveux qui appartenaient aux habitants de cette villa et les mêla. Elle jeta le mélange dans le feu, provoquant une petite fumée puis versa le fond de sa coupe sur le sol, comme une libation. Elle s'agenouilla et tourna ses paumes de la main vers la terre. Elle devait faire vite avant qu'on ne la surprenne.

- Reine invincible, Hécate aux flambeaux, je t'appelle, toi et les ombres des Enfers. Que sur cette maison et sur ceux qui la peuplent ta protection leur soit accordée, que leurs ennemis connaissent le pire des châtiments si le mal leur est fait. Hécate la lumineuse, je place Pistos, Thysié, Tros, Ilos et tous leurs esclaves sous ta bienveillance. Éloigne-les du danger et de la haine des autres ou fasse qu'ils goûtent à ta colère. Ombres des Enfers, je vous convoque, et sous mon ordre, vous demande de veiller sur ces lieux. Ombres des Enfers, je place sous votre protection Pistos, Thysié, Tros, Ilos et tous leurs esclaves. Liez les membres de leurs ennemis, engourdissez leur langue, menez-les doucement vers l'Hadès s'ils osent s'en prendre aux gens de cette maison.

Elle sentit autour d'elle un changement de température de la pièce qui s'opérait. L'atmosphère n'était plus le même, elle perçut cette variation comme un signe positif. Le long des murs, elle voyait des ombres noires qui léchaient les colonnes avant de disparaître. Exactement la même chose qui était arrivée quand elle les avait invoqué une première fois au temple d'Hécate.

- Ombres des Enfers, jusqu'à ce que j'ordonne le contraire, je vous lie à cette maison et à ses habitants. Ne faillez pas aux devoirs que je vous donne et protégez-les.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant