Chapitre 8 : Le pourpre

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— Comment, aboya la reine, comment cette garce a-t-elle pu faire cela !?

Au passage, une amphore subit sa fureur et s'écrasa au sol, en mille éclats. La salle d'apparat trembla en chœur et observa la reine. Celle-ci marchait d'un pas rapide et ferme, folle de rage.

— Elle bafoue mon autorité ! Elle me provoque à la vue de tous !

Une seconde amphore connut le même sort juste aux pieds de la souveraine. Terpsis s'en moqua complètement. Les cheveux châtains s'étaient dressés comme les serpents de la gorgone Méduse, et Clelia ne put s'empêcher de penser qu'en des moments pareils, sa mère aurait fortement apprécié être à sa place pour se venger.

— Ma reine, fit un des conseiller, il est nécessaire de retrouver ton calme et de...

Il se tut, soudain effrayé par le regard froid de Terpsis. Même Aédone ne savait que faire et se tenait en retrait, désemparée. À vrai dire, tous les fidèles de la reine, allant des conseillers aux nobles en passant par les esclaves ne savaient comment agir avec leur souveraine.

— C'est mon autorité qu'elle bafoue, par tous les dieux ! Faut-il être aveugle pour ne pas le comprendre ? Aux yeux de tous, des souverains de Sparte, de Mycènes et pire encore de Corinthe, elle se déclare comme mon égale ! Une esclave !

Elle avait tapé du poing sur le mur, de rage. Elle ne se rendit pas compte du sang qui coulait le long de ses doigts ni même de la douleur. Aédone avait réprimé un cri de peur et se maîtrisait à grand peine, tremblante. La reine, en d'état pareil, était complètement incontrôlable et il fallait attendre qu'elle explose tout les objets à sa portée pour afin cesser de s'agiter. Mais hélas, son emportement était trop fort et plus personne ne voulait faire quoi que ce soit pour la calmer.

— Il est temps qu'elle sache où est sa place ! ajouta-t-elle en se tournant vers l'assemblée, hébétée. J'exige des mesures immédiatement ! Que l'accès au trésor royal soit faite sous la surveillance de garde et quiconque qui arbore le pourpre ou même l'emblème de la cité le puisse uniquement sous autorisation des souverains, écrite ou alors orale en présence de témoins. Que cela ne se reproduise plus !

L'ordre avait été donné à l'intendante qui s'empressa de hocher de la tête, livide malgré elle. En vérité, tous l'étaient, Clelia comprise. Mais c'était la colère, comme sa mère qui dominait ses sentiments. Elle n'avait jamais supporté l'esclave qui s'affichait officiellement avec son père et profitait de sa position de maîtresse pour s'en prendre aux autres esclaves comme Timia ou alors en l'insultant derrière son dos, comme la lâche qu'elle était.

Voyant que la reine n'avait plus rien à dire, ou du moins plus rien à crier, les personnes qui étaient présentes prirent congé en saluant avec déférence la souveraine qui continuait de s'agiter et de pester contre son époux et sa maudite maîtresse.

À la fin, il ne resta que Clelia et Aédone qui étaient encore présentes. L'intendante s'approcha longtemps et posa doucement sa main sur le bras découvert de bijoux ou de la manche du chiton, doucement et tendrement. L'affranchie esquissa un sourire qu'elle voulait tendre mais néanmoins timide. Sur l'immédiat, Terpsis s'apaisa et caressa la joue de son amante, en rendant sa tendresse.

— Cette femme n'est personne, Terpsis, souffla-t-elle doucement. Délia n'est ici que parce qu'elle est née belle mais en vérité, qui peut te surpasser ? Tu es fine politicienne, pas comme elle.

— Ma brave Aédone, que serais-je sans toi ?

Elle voulut l'embrasser mais rapidement, Aédone lui signala la présence de Clelia qui avait détourné la tête par pudeur. La reine prit conscience et s'approcha de sa fille qui enfin, pour observer sa mère.

De Delphes toute puissanteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant